Ils développent notre industrie

Malgré le contexte économique et institutionnel instable, des entrepreneurs ont choisi de développer leur activité. À l’occasion de la Semaine de l’industrie qui se déroule jusqu’au 13 août, trois d’entre eux ont accepté de partager leur parcours, leurs espoirs et leurs difficultés.

Frédérique Tini / Écopavement

« Il était vraiment important d’avoir une activité éthique »

À 22 ans, Frédérique Tini vient de racheter l’entreprise Écopavement, qui fabrique des dalles et bordures à partir de matériaux recyclés comme le verre ou le plastique. « Beaucoup de gens s’étonnent de me voir si jeune, mais j’ai grandi dans ce milieu. Ma mère a créé Écotrans il y a 16 ans, à une époque où personne ne croyait au recyclage des déchets. Et en 2016, elle a fondé, avec mon père, l’entreprise OZD, explique la jeune femme titulaire d’un bac ES. Forcément, l’environnement, c’est quelque chose d’essentiel pour moi. Il était vraiment important d’avoir une activité éthique qui participe à une démarche environnementale. »

Quand le fondateur d’Écopavement, Paul Ligeard, lui a proposé de reprendre son entreprise en fin d’année dernière, elle n’a donc pas hésité longtemps. En janvier, elle remet l’activité en route, recrute deux personnes, met les mains dans le cambouis pour développer la phase pilote, optimise la production et démarche de nouveaux investisseurs. « Par chance, j’ai signé un contrat de 8 400 dalles avec le MK2 », souligne la jeune cheffe d’entreprise à l’emploi du temps de ministre. Ce marché lui permet d’avoir un peu de visibilité et d’envisager le développement en phase industrielle. C’est prévu pour janvier. « L’idée est de diversifier nos produits, d’augmenter la cadence et de baisser les coûts. »

Chloé Jeandidier / Biscuiterie Donna

« J’ai hâte de revoir les touristes. »

La biscuiterie Donna, à Pouembout, avait essentiellement une clientèle de touristes internationaux. Mais ça, c’était avant. La crise du Covid a obligé la jeune cheffe d’entreprise à revoir son modèle économique pour ne pas sombrer. Tout simplement. « On a créé de nouvelles gammes, de nouveaux produits et on a démarché de nouveaux points de vente. Heureusement, on a été plutôt bien accueillis et aujourd’hui on vend sur tout le territoire », précise-t-elle.

La jeune femme, gourmande décomplexée, a imaginé des « boxs », des mélanges prêts à l’emploi pour cuisiner rapidement et facilement des granolas, cookies et autres pancakes. Elle a étoffé sa gamme de biscuits sucrés et salés pour l’apéritif. « Je me suis inspirée de la gastronomie locale et je propose des associations coco-curry, sésame-paprika ou bientôt piment-soyo… » Parallèlement, elle a dû revoir le packaging de ses produits pour les rendre plus attrayants. Grâce aux aides et aux efforts mis en place, son entreprise a résisté à la crise. « Aujourd’hui, ça va, mais j’ai vraiment hâte qu’on ouvre les frontières pour revoir les touristes. »

Régis Ballu / Entocal

« J’en avais assez de jeter mes déchets organiques à la poubelle. »

« Après deux ans de travail, nous sommes parvenus à optimiser la production, mais nous avons besoin, très rapidement, d’investisseurs. » Régis Ballu, cogérant de l’entreprise Entocal, qui vient de mettre au point un procédé agricole de culture de larves de mouches à partir de matière organique, ne cache pas les difficultés. « J’en avais assez de jeter mes déchets organiques à la poubelle », explique le chef d’entreprise qui a décidé de passer à l’action il y a deux ans avec l’aide d’un associé. Ensemble, ils se sont plongés dans les livres, les tutoriels et les documents techniques pour apprendre à produire les asticots. « Le procédé marche bien, mais nous avons été confrontés à des problèmes réglementaires pour l’approvisionnement des matières premières et de nombreux problèmes administratifs. Or, l’administration doit être à notre service, pas l’inverse. »

Autodidacte, ancien aide-comptable devenu en 30 ans directeur du Betico, Régis Ballu n’en est pourtant pas à son coup d’essai. Il vient d’ailleurs de racheter la franchise CrédiPro, une société de courtage en crédit pour les entrepreneurs. Mais à ce stade, Entocal peine à écouler ses larves qui pourraient servir d’alimentation pour les animaux ou même d’engrais.


L’industrie calédonienne cherche un nouveau souffle

Lorsque l’on parle de l’industrie calédonienne, on pense tout de suite au nickel. Pourtant, l’industrie de transformation emploie, à elle seule, les trois-quarts de la main-d’œuvre de ce secteur (10 700 personnes). Dans un contexte de crise sanitaire, avec l’augmentation du prix des matières premières et du fret, l’industrie locale est à la peine, ainsi que le BTP et le commerce international. « Il faut repenser le modèle. On doit se poser deux questions : qu’est-ce que la Calédonie veut faire de son industrie et qu’est-ce qu’on a vraiment besoin d’importer ? Selon moi, c’est une aberration de faire venir des yaourts, de la terre ou des cailloux de l’extérieur », déplore Xavier Benoist, président de la Fédération des industries. La Finc, qui se veut force de proposition, est actuellement en train de travailler sur un document d’aide à la décision politique dans lequel elle apporte des éléments de réponse. Ce document devrait être présenté dans les prochaines semaines.


Une tribune à la Foire de Bourail

La 9e édition de la Semaine de l’industrie, qui a débuté lundi, a pour objectif de promouvoir et faire connaître l’industrie calédonienne. Une vingtaine d’entreprises ont ouvert leurs portes et des visites pour le grand public sont organisées jusqu’au 13 août. La Finc sera présente à la Foire de Bourail, du 13 au 15 août, pour aborder les problèmes auxquels sont confrontées nos industries.

Programme complet sur www.finc.nc

V.G.

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