Gilles Tavergeux, des cages à la présidence

Ancien gardien de la sélection et du CA Saint-Louis, Gilles Tavergeux était déjà l’une des figures emblématiques du ballon rond. Élu samedi à la présidence de la Fédération calédonienne de football, il en est désormais le patron.

Gardien de but, gardien de la paix et aujourd’hui gardien des bonnes pratiques dans le football calédonien ? C’est en tout cas la philosophie affichée par Gilles Tavergeux, tout récemment élu à la tête de la Fédération calédonienne de football pour quatre ans. Car c’est un légaliste qui est arrivé à la présidence, un homme qui annonce vouloir ne parler que de droit et de statut et surtout ne laisser personne avoir de passe-droit ou de petits arrangements. « Je n’ai rien contre personne, explique Gilles Tavergeux. Mais pour moi, c’est comme ça que les choses doivent se passer. Sans cadre, on n’arrivera à rien. » La discipline, une valeur qui arrive très tôt dans la vie de cet homme de 61 ans dont les racines se retrouvent à Moméa et à Boghen. « Je suis l’enfant d’une famille nombreuse, avec sept enfants, et mon père était du genre strict. »

De Tahiti à Saint-Louis

Une mentalité qui va lui faciliter les choses dans la vie professionnelle quand, en 1982, il devient policier à Nouméa, avant de gravir petit à petit les échelons pour devenir commandant de police. Côté football, c’est sur les terrains en scorie de Nouméa que ce gosse de Montravel découvre le football, d’abord comme milieu à l’ES Nouméa. Avant de devenir gardien à Lössi, où il avait suivi ses copains. « Le coach devait remplacer le gardien qui s’était blessé, se souvient-il. Je n’ai pas hésité, parce que pour nous, c’était l’intérêt général qui primait. » Un amour pour le foot qui le mène à Tahiti, après un passage en Métropole durant son service militaire. Gardien de l’AS Pirae, il tape dans l’œil de la fédération du Fenua, qui espère même le garder pour défendre les buts de la sélection. Mais c’était sans compter sur l’esprit de famille de Gilles Tavergeux, qui décide de rentrer au pays pour aider sa mère, veuve.

Un retour en 1982, qui coïncide avec deux moments marquants de sa carrière, en parallèle de ses débuts de policier : l’obtention du brassard de capitaine de la sélection calédonienne et son arrivée au CA Saint-Louis. C’est d’ailleurs au Mont-Dore que le footballeur deviendra un dirigeant. Après avoir participé cinq fois à la Coupe de France avec les verts et blancs, il quitte le navire en 1999 pour fonder l’AS Mont-Dore, devenu depuis l’un des clubs emblématiques du championnat. « L’idée, c’était d’ouvrir le football de la commune vers l’extérieur. Les joueurs de Saint-Louis se sont retrouvés à évoluer avec des footballeurs de partout ailleurs. » Avec même, parfois, le commandant dans les cages. « J’ai joué jusqu’à 40 ans en fait, » s’amuse-t-il.

À l’assaut de la FCF

Forgé par Martin Wamytan et Guyèdre Wamedjo, respectivement présidents du CA Saint-Louis et de la Ligue de football, c’est en 2011 que Gilles Tavergeux se lance pour la première fois dans la course à la présidence de la FCF. Après un premier échec face à Edmond Bowen, puis un second face à Steeve Laigle en 2016, il réussit enfin son coup cette année en battant le président sortant. Et en plus de ce légalisme assumé, un autre cheval de bataille est désigné par le nouveau président : la formation des jeunes. « La Fédération, c’est juste une entité qui chapeaute, mais en réalité, c’est dans les clubs et les provinces que les choses se font avec la détection et la formation. C’est de la base que doit se construire notre football, pas d’en haut. » Il a désormais quatre ans pour fédérer le ballon rond autour de lui, pour réussir sa troisième carrière, après celles de gardien et de policier.


Des dossiers sur le feu

En cette année de crise sanitaire mondiale, le nouveau président de la Fédération calédonienne de football aura du pain sur la planche. Premier dossier chaud, celui du rythme des championnats. Pour lui, pas de réticence à passer sur une saison étalée sur deux années civiles, « mais uniquement pour la Super Ligue (élite calédonienne, NDLR) et seulement après un bon travail de préparation ». Pas question de toucher au rythme pour les plus jeunes, « qui doivent suivre le rythme scolaire et le climat ». Autre enjeu, la Coupe du monde des clubs. Avec l’arrêt brutal de la Ligue des champions d’Océanie, il n’y a pas de représentant régional désigné sportivement. À l’OFC, dont Gilles Tavergeux est désormais de facto le vice-président, de régler la situation, alors que Magenta et Auckland tiennent la corde pour être choisis. Et puis l’annulation de la participation des clubs du Pacifique à la Coupe de France sera aussi en question, avec la possibilité d’un dédommagement pour Hienghène, vainqueur cette année. « C’est une discussion qu’il faudra avoir avec la Fédération française de football », prévient le nouveau président.

A.B.

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