Fondation Kaddour : « Nous voulons montrer aux enfants que tout est possible »

« Je pense que d’ici la fin de l’année, les programmes phares de notre fondation seront écrits », indique Laurent Calleja. Photo N.H.

Présentée lors d’une conférence, jeudi 9 octobre, la Fondation Roger Kaddour, nouvellement créée et soutenue par de nombreux sportifs calédoniens, ambitionne de faire du sport un « levier de transformation sociale ». Les explications de son coprésident, Laurent Calleja.

DNC : Sur quels financements compte s’appuyer la Fondation Roger Kaddour ?

Laurent Calleja : Dans un premier temps, il faut savoir que le rôle d’une fondation n’est pas de produire, mais d’aider et de construire des programmes pays. Les fonds viendront de l’Europe et des entreprises calédoniennes. L’Agence française de développement en débloquera également à destination de programmes de dimension pays. Nous sommes sous l’égide de la Fondation du sport français, qui contrôle les comptes, le bureau, etc. Notre structure est verrouillée juridiquement.

Vu le contexte économique actuel, cela ne risque-t-il pas d’être compliqué de compter sur les entreprises calédoniennes ?

Oui, mais la fondation est amenée à durer dans le temps. Cela signifie que, dans dix ou vingt ans, elle sera encore présente. J’espère que la Nouvelle-Calédonie s’en sortira, afin que nous puissions compter sur le tissu écono- mique calédonien. Après, l’avantage d’une fondation, c’est qu’elle permet de chercher des financements européens et mondiaux. De nombreuses entreprises et groupes, comme LVMH, financent des programmes pays. C’est pour cette raison que nous sommes sous l’égide de la Fondation du sport français. Deux ou trois fois par an, celle-ci met en avant plusieurs programmes. L’occasion, pour les entreprises qui le souhaitent, de soutenir la Nouvelle-Calédonie ou l’un de ses projets.

L’un des trois piliers présentés par la fondation est l’insertion professionnelle par le sport. Des projets se dessinent-ils ?

La réinsertion professionnelle par le sport fait effectivement partie d’un de nos programmes. Un important projet, similaire, existe déjà en France et il porte ses fruits : des entreprises recrutent des jeunes en décrochage scolaire, en les réinsérant par le sport. C’est ainsi que cela fonctionne. Nous souhaitons mettre en place ce type de programme. Pour l’heure, il nous reste à en terminer l’écriture. Nous nous donnons trois à six mois pour rédiger le projet pays.

La lutte contre toutes les discriminations est aussi un axe fort. Comment tendre vers cet objectif, notamment après les émeutes de 2024 ?

En construisant des salles de sport. Pas uniquement en province Sud, mais égale- ment dans le Nord et dans les Îles. Je suis intimement persuadé qu’il faut lutter contre le décrochage scolaire. C’est primordial. Pour ce faire, le sport et la culture sont des solu- tions. Ensuite, nous allons essayer de créer un programme de formation d’éducateurs sportifs dans plusieurs disciplines, avec l’objectif de multiplier leur nombre par dix, dans tout le pays. Ainsi, lorsque les enfants sortiront de l’école, ils ne traîneront pas dans la rue, mais iront dans une salle de sport.

Construire des bâtiments, ce n’est pas très compliqué. En revanche, y mettre de l’âme et de l’humain, c’est plus difficile. Former des personnes va donc être important. Ensuite, qu’est-ce qui fait qu’un enfant ne décroche pas ? Sa confiance en lui. Or, certains élèves sont moins à l’aise avec le français que d’autres. Résultat, ils décrochent plus vite. Afin de contrer cela, nous pourrions nous inspirer du modèle anglo-saxon, qui laisse davantage de place au sport l’après-midi. Cela peut changer la donne et leur donner confiance en eux. Changer le programme scolaire en Nouvelle-Calédonie, avec des écoles pilotes sur les deux, trois premières années, pourrait faire partie d’un de nos programmes.

Vous souhaitez monter en puissance, avec en ligne de mire les Jeux olympiques de Brisbane, en 2032. Concrètement, que cherchez-vous à atteindre à cet horizon ?

L’objectif n’est pas de remporter des médailles olympiques. En revanche, nous allons profiter des Jeux de 2032 pour embarquer tout le pays dans un rêve sportif, un peu comme lors des Jeux du Pacifique de 2011, où un réel mouvement s’était mis en place. Nous souhaitons également réaliser des passerelles entre la Nouvelle-Calédonie et l’Australie, car de nombreuses choses peuvent être réalisées. L’un de nos objectifs est de doubler, voire tripler les classes d’anglais. Si des enfants de 10-12 ans commencent dès aujourd’hui à être parfaitement formés à l’anglais, à 18 ans, ils seront bilingues. Lors des Jeux de Brisbane, nous pourrions ainsi envoyer 300 bénévoles bilingues, grâce à une convention signée avec l’Australie.

De grands noms, comme Antoine Kombouaré et Robert Teriitehau, s’associent à cette action. Que vont-ils pouvoir apporter ?

Leur image du sportif qui a réussi. Nous voulons montrer aux enfants que tout est possible et leur donner envie de faire du sport. Cela donne également de la crédibi- lité à la Fondation Roger Kaddour. Antoine Kombouaré y associe son nom, alors qu’il ne l’a jamais fait pour une autre structure. Nos ambassadeurs ont exactement le même rôle. Ils donnent leur image, leur soutien, leur temps, leur bénévolat. C’est aussi l’occasion pour eux de rendre au pays ce qu’il leur a apporté.

Propos recueillis par Nikita Hoffmann