Feux de forêt : peut-on continuer comme ça ?

Les pluies commencent à revenir, mais elles auront du mal à faire oublier une saison des feux particulièrement éprouvante pour les pompiers calédoniens. Celle-ci a une nouvelle fois mis en lumière le manque de moyens matériels et humains de la lutte contre les feux de forêt et rappelle la nécessité de mener une grande réflexion sur la question.

Une habitation ravagée par les flammes, une exploitation agricole détruite et plus de 1 100 hectares de végétation partis en fumée, le bilan est une nouvelle fois catastrophique. L’incendie qui a touché la commune du Mont-Dore le 10 janvier est à l’image de la saison des feux 2017, une saison qui n’en finit plus. Du point de vue administratif, elle s’achève le 15 décembre. Force est de constater que les incendies n’ont pas cessé pour autant.

La Nouvelle-Calédonie a connu une saison administrative des feux de forêt tristement exceptionnelle. Officiellement, 12 979 hectares ont brûlé, mais la réalité est bien pire. Selon l’Union des pompiers calédoniens, qui va chercher les chiffres directement auprès des soldats du feu, les surfaces ravagées par les flammes sont plus proches des 40 000 hectares chaque année. À titre de comparaison, en France, au cours de l’année 2017, ce sont 18 000 hectares qui sont partis en fumée. À l’occasion d’un passage en Métropole, le président de l’Union des pompiers calédoniens a d’ailleurs attiré l’attention de Gérard Collomb, le ministre de l’Intérieur, sur le fait que les surfaces calédoniennes n’étaient pas prises en compte dans les statistiques nationales.

De l’argent public qui part en fumée

La Calédonie manque cruellement de moyens matériels et humains. Si les soldats du feu parviennent à faire face à un foyer, ils peuvent difficilement lutter contre plusieurs incendies à la fois. Cela a notamment été le cas pour le dernier incendie du Mont-Dore. Les moyens étant déjà mobilisés sur un feu à N’Go, ils n’ont pu être en place sur Mouirange que tardivement. Des délais qui ont permis au sinistre de se développer et d’engendrer les dégâts que l’on a pu observer.

L’organisation actuelle ne favorise pas vraiment un traitement des sinistres optimal. Chaque commune est actuellement compétente en matière de lutte contre les incendies. Certaines communes ont franchi le pas de l’intercommunalité qui offre la possibilité de mutualiser les moyens et donc de réduire la facture, mais c’est loin d’être le cas de toutes et certaines ne disposent même pas de centre de secours et d’incendie.

Comme le souligne Nicolas Metzdorf, le porte-parole du gouvernement, « quand les forêts brûlent, ce sont nos impôts qui partent en fumée ». Et ne rien faire, c’est également laisser brûler le patrimoine naturel calédonien d’une richesse exceptionnelle. Au-delà de la biodiversité, c’est la ressource en eau qui disparaît avec les forêts, une ressource qui sera de plus en plus précieuse avec le réchauffement climatique.

Insister sur la sensibilisation

Le manque de moyens n’empêche pas de mettre chaque année davantage de contributions sur la table. Nicolas Metzdorf souligne notamment, en tant que président de l’Agence pour la prévention des calamités agricoles ou naturelles, que l’établissement public verse tous les ans près de 200 millions de francs pour le financement des hélicoptères bombardiers d’eau. Pour le porte-parole du gouvernement, la question budgétaire doit néanmoins s’inscrire dans le cadre plus général d’une réflexion sur la gestion des risques et leurs prévisions. Le Congrès devait d’ailleurs se pencher sur la question, mercredi, à l’occasion d’une commission plénière.

Si une partie de la population calédonienne a conscience de la problématique des feux, ce n’est pas le cas de sa totalité. Le 11 janvier, alors que le feu s’approchait des habitations des lotissements de La Coulée, les pompiers ont enregistré une dizaine de départs de feu volontaires. L’origine du feu du col des Deux Tétons ou encore l’incendie des cases du Sheraton de Deva sont autant d’illustrations de l’inconscience quant à l’utilisation du feu et de l’importance de la sensibilisation.

M.D.