En ce premier mois de l’année, nous avons demandé à plusieurs acteurs de la société civile ce qu’ils attendent en priorité en 2022. Leurs réponses témoignent d’un besoin de lisibilité et de construction, tant au niveau environnemental, économique, culturel que sociétal.
Sonia Togna, présidente de l’Union des femmes francophones océaniennes (UFFO)
« Le droit des femmes doit exister en dehors du phénomène de violence »
« Nous ne changeons pas de discours, ce qui est important pour nous est de ratifier les accords internationaux qui permettront aux Calédoniens de bénéficier des avancées politiques en faveur des femmes. Nous souhaitons la mise en œuvre de ces conventions qui permettront leur meilleure intégration à tous les niveaux. Ce sont des discussions qui doivent avoir lieu maintenant dans un objectif de préparation de la fin de l’Accord de Nouméa. À plus court terme, nous préparons la Journée internationale du droit des femmes le 8 mars. À cette occasion, nous rappelons que le droit des femmes doit exister en dehors du phénomène de violence. Car bien souvent, on assimile cette journée aux violences faites aux femmes. Il est temps d’imaginer un autre modèle. »
Marc Oremus, responsable du bureau WWF en Nouvelle-Calédonie
« Prendre en compte l’environnement à sa juste valeur »
« Globalement, ce qui sera important pour moi, c’est la prise en compte de l’environnement à sa juste valeur dans les projets qui construisent la Calédonie de demain. Dans cette période de transition, la protection de l’environnement me semble capitale. À notre niveau, au WWF, nous avons beaucoup de projets dont la plupart me semblent urgents. Nous sommes impliqués dans des sujets très divers comme les incendies, la protection des dugongs ou la perte de biodiversité. Nous sommes six personnes en Nouvelle-Calédonie pour les gérer, mais on peut compter sur l’appui du WWF France. Nous travaillons aussi avec des associations qui interviennent de différentes façons, soit en assurant un relais, soit en nous aidant sur un chantier particulier. »
Silvio Pontoni, président de la Fédération calédonienne du BTP
« Nous comptons sur la relance des projets dans le privé »
« Il serait important que le privé reprenne confiance et relance les travaux. La situation est déjà un peu meilleure depuis le référendum, on espère que cette dynamique va se poursuivre. Il y a déjà les projets de l’Étrier et de Lucy, qui va démarrer dans le Sud. Au niveau de la commande publique, nous nous réjouissons des travaux engagés par la mairie de Nouméa sur l’Anse-Vata, mais pour relancer la filière, nous avons besoin de davantage de commandes. Nous ne croyons pas trop au développement d’infrastructures publiques, même si on nous annonce une étude sur un pont à Dumbéa ou dans le Nord. Nous comptons davantage sur la relance des projets dans le secteur privé. Les bailleurs sociaux ont déjà engagé le pas, notamment avec l’appel d’offres pour la construction du siège social du Fonds social de l’habitat, à Koutio. »
Christophe Coulson,président du syndicat UT CFE-CGC
« Reprendre les discussions pour construire le projet de société »
« Ce qui m’importe, c’est la reprise des discussions après le référendum. Les Calédoniens doivent savoir où l’on va sur des sujets aussi importants que la santé, la couverture sociale ou le chômage. Nous sommes inquiets, car nous devons rendre un projet de société pour juin 2023 et depuis le référendum, aucune discussion n’a été engagée. La cause de cette inaction est récurrente : pour engager des réformes, nous avons besoin de temps. Or, nous allons d’élection en élection, ce qui retarde à chaque fois les actions. Certains sont en campagne pour la prochaine présidentielle et après, ce sera les législatives. »
Jacqueline Bernut, présidente du conseil d’administration du CHT, du CHS et de l’association des parents d’enfants handicapés (APEI)
« Accueillir les enfants handicapés avant l’âge de 6 ans »
« Dans le cadre de l’APEI, nous avons lancé une étude de besoins concernant l’accueil d’enfants handicapés avant l’âge de 6 ans. Il y a bien quelques crèches qui reçoivent ce public, mais l’idée serait d’avoir du personnel formé et dédié à ces enfants. Cette étude se termine et nous entrons dans la phase de présentation aux élus pour déposer un projet en avril. Et puis, en tant que présidente du conseil d’administration du CHT et du CHS, j’espère que cette année, on trouvera une organisation pérenne et sereine pour le financement du Ruamm et du CHS afin de maintenir le fonctionnement optimal de nos hôpitaux. »
Guillaume Soulard, directeur artistique du centre culturel Tjibaou
« Ne pas abandonner l’action culturelle »
« Il me semblerait important que le projet de l’Agence de développement de la culture kanak, ADCK, c’est-à-dire le centre culturel Tjibaou, retrouve un nouvel élan. Il me semble essentiel de considérer à nouveau l’action culturelle comme un outil indispensable pour améliorer notre rapport aux autres et au monde. On a trop tendance à penser les productions artistiques dans un aspect consumériste, alors qu’il conviendrait d’utiliser l’art dans sa dimension de recherche, de questionnement, de relation à notre entourage. Aujourd’hui, la planète brûle, on laisse des populations sombrer dans leur misère, la défiance des uns envers les autres favorise la peur et la haine, ce n’est certainement pas le moment d’abandonner l’action culturelle. Je souhaite donc que l’on puisse redéployer des actions de fond afin de redonner du mieux-être à chacun, ici et ailleurs. »
Cédric Faivre, délégué général du Medef-NC
« L’enjeu de cette année sera la relance économique »
On sort de deux années de récession avec une diminution de l’emploi. Il s’agit maintenant de redonner confiance aux investisseurs locaux et extérieurs, ainsi qu’aux consommateurs. L’enjeu de cette année sera la relance économique. Cela signifie qu’il leur faut davantage de lisibilité, mais étant donné que tous les indicateurs sont au rouge, la marge de manœuvre est faible. Au sein du Medef, nous pouvons contribuer à deux niveaux : à travers NC ÉCO, nous participons à la réflexion d’un modèle économique adapté, porteur de valeurs et inclusif. NC ÉCO travaille également sur différentes notes concernant la fiscalité et le développement économique en aire coutumière. Elles devraient être présentées courant 2022. Le Medef participe également à la concertation avec le gouvernement pour la réforme fiscale.
Jean-Christophe Niautou, élu de la Chambre d’agriculture et de la pêche
« Le monde agricole a besoin d’une stabilité institutionnelle et économique »
Comme tous les secteurs, nous avons été lourdement touchés ces deux dernières années. La météo, avec des pluies records, a par ailleurs été dévastatrice et ça continue. C’est dire si le moral des agriculteurs est assez fragile. Le monde agricole a besoin, plus que jamais, d’une stabilité institutionnelle et économique. Au sein de la Chambre d’agriculture et de la pêche, nous nous préparons à une année très importante. Nous sommes actuellement en phase organisationnelle pour accueillir les pêcheurs. Par ailleurs, fin 2022, nous élirons ensemble le nouveau président de la chambre consulaire. Et contrairement à 2017, les élections seront territoriales et non provinciales. C’est un grand changement qui a pour objectif, notamment, de fédérer les acteurs du secteur.
Jean Yves Lemenant, président du Secours catholique en Nouvelle-Calédonie
« Créer une société plus juste et plus fraternelle »
« Tout en poursuivant nos missions d’entraide quotidienne, nous avons plusieurs échéances importantes. Tout d’abord, à Koné, deux projets importants : l’ouverture, à la rentrée, du pôle Secours catholique Nord et parallèlement, nous nous préparons à notre future mission au centre de détention de Koné, dont l’ouverture est prévue dans le courant du deuxième semestre. À Lifou, nous souhaitons réactiver notre projet Peejee, en sommeil depuis la crise sanitaire et destiné à accompagner nos jeunes en perte de repères. Enfin, à Nouméa, nous ouvrirons, en milieu d’année, notre espace solidaire près de la cathédrale. Tous ces projets concourent à un objectif principal : créer une société plus juste et plus fraternelle. »
Propose recueillis par Virginie Grizon (© DR / Archives DNC)