En garde à vue, un huis clos glaçant et palpitant

Avis aux amateurs d’histoires criminelles. La compagnie Fokesasorte monte sur les planches du Théâtre de l’île pour jouer le roman policier de John Wainwright. Une pièce captivante où le suspense règne en maître.

La tension est palpable dans la salle d’interrogatoire du commissariat. Georges Bergerot rêve d’être partout, sauf ici. Il imaginait sûrement une soirée de Noël bien tranquille auprès de sa famille. Raté. Le maire de la petite station balnéaire est bel et bien coincé là. Entre deux policiers qui le questionnent sur des affaires de viols et de meurtres de trois jeunes filles. Une sale histoire. Surtout lorsque l’on passe de simple témoin à suspect numéro un. Le commissaire Toulouse et l’inspecteur Berthil en sont persuadés. Le maire de la ville les a tuées. Une seule issue : la garde à vue.

Malgré les apparences et les accusations, Georges Bergerot est-il vraiment coupable ? « On obtiendra la réponse à la fin de la pièce. » Le metteur en scène, Alain Mardel, ne « spoilera » pas. Il donne simplement cette indication : l’histoire se déroule en 1980, juste avant l’élection de François Mitterrand. La peine de mort n’est pas encore abolie en France. Si Bergerot est coupable, il risque la guillotine. Seule une heure et demie de représentation mettra un terme à ce suspense.

LE GOÛT DU FRISSON

La pièce En garde à vue, adaptée d’un roman policier de John Wainwright, a tout pour plaire aux amateurs du genre. Alain Mardel, le premier. « Je suis passionné de faits divers et des grandes affaires criminelles. J’ai souvent assisté à des procès en correctionnelle ou aux assises quand j’étais plus jeune. Ce qui m’a fait monter Douze hommes en colère. »

Dès qu’il s’agit d’histoire de gangsters, de voyous, de coups de feu, le metteur en scène retrouve tout de suite son âme d’enfant. « Dans cette pièce, il s’agit d’un interrogatoire du début à la fin. C’est passionnant. » John Wainwright a longtemps travaillé dans la police d’investigation. D’où sa capacité à décrire avec justesse l’ambiance d’un commissariat. « Il a écrit près de 80 romans dont la plupart était des romans policiers. »

En garde à vue fait partie de ceux qui, dès le départ, devait être adapté sur les planches. « En 1981, Claude Miller a réalisé un film en lien avec ce livre qui me faisait dire, déjà à l’époque, que c’était un huis clos fait pour le théâtre. » Il a été adapté en 2017. Alain Mardel a sauté sur l’occasion pour le monter à sa sauce.

TENIR LE SPECTATEUR EN HALEINE

Fluidité, rythme et tension sont les trois maîtres mots de sa ligne directrice. Sa mission : tenir le spectateur en haleine jusqu’à la fin de la pièce. Pour y parvenir, quatre comédiens l’accompagnent : Sophie Guérin, Vincent Ginguené, Daniel Biheauro et Alain Camus. Tous incarnent des personnages à la psychologie bien complexe. À commencer par le principal accusé, Georges Bergerot. Une personne qui a d’abord de l’autorité, de par sa carrière d’homme public, mais aussi ses fragilités. « Il a quelque chose de touchant. L’homme va s’affaiblir face aux questions et au harcèlement des deux policiers. »

Avec le commissaire, les échanges se situent entre le rapport de force et la séduction. « Je compare ça au tango, à une danse psychologique et intellectuelle. » Pour Vincent Ginguené, le personnage qu’il incarne est un homme discret. « Il est très intéressant, drôle, cynique et blasé. »

Le commissaire Toulouse, lui, agit avec psychologie. C’est un « cérébral ». Un personnage expérimenté, persuadé que l’homme qui se trouve en face de lui est coupable. « Comme il en est convaincu, il est très invasif. Il utilise la colère, l’agressivité, l’ironie pour le faire craquer », explique son interprète, Alain Camus.

Et puis il y a l’inspecteur Berthil. Le « mauvais flic ». Cet ancien militaire qui pense obtenir des aveux par les coups et par la force.

Sans oublier la femme du maire qui se positionne comme témoin à charge. Déterminée, elle aussi, à le faire tomber. Quatre personnages énigmatiques qui dévoileront leur vrai visage quelques minutes seulement avant que le rideau ne tombe.

 

Edwige Blanchon

 

Georges Bergerot (Vincent Ginguené) est cuisiné par deux inspecteurs de police durant toute la pièce. (© E.B.)

 

Où et quand ?

La pièce est à découvrir au Théâtre de l’île vendredi 24 mars à 20 heures, samedi 25 et dimanche 26 mars à 18 heures. Réservations sur tickets.nc.