En mars 2023, le quotidien Les Nouvelles Calédoniennes, alors propriété du groupe Melchior, a fermé ses portes, laissant derrière lui une centaine d’employés, plus de 50 ans d’histoire de la presse et une volonté de neutralité. La fermeture d’un journal est toujours un coup dur porté à la démocratie et cette disparition s’est opérée dans le quasi-silence du monde politique. Depuis, un autre quotidien papier est né, La Voix du Caillou, et les Nouvelles Calédoniennes ont ressuscité de leurs cendres, sur internet et avec une équipe réduite.
Mais le scénario de 2023 se répétera-t-il cette année ? Car, cette fois, c’est la télévision qui est concernée. Mercredi 12 mars, la province Nord n’a octroyé qu’un quart des subventions de fonctionnement de Caledonia lors du vote du budget primitif 2025. « La télé qui nous rapproche » avait d’ores et déjà modifié
ses programmes face aux restrictions budgétaires. Aujourd’hui, la crainte d’une fermeture grandit. Directement, les conséquences seront économiques et
sociales. Caledonia emploie une trentaine de personnes et travaille régulièrement avec des sociétés de production locales.
Mais les effets vont toucher l’ensemble des citoyens. À travers ses journalistes
professionnels, Caledonia tente, comme les autres médias, de délivrer des informations vérifiées, avec un souci de neutralité et de pluralité. Cette déontologie est précieuse dans une période agitée, où les plus radicaux tentent d’imposer leurs idées. Cette potentielle disparition est d’autant plus inquiétante qu’elle est accompagnée d’un autre phénomène.
À l’approche de chaque élection provinciale, les réseaux sociaux calédoniens voient émerger de nouveaux « médias ». Créées inopinément depuis le mois de janvier, ces pages sont anonymes, ne donnent jamais leurs sources et certaines ont une couleur politique marquée, au ton parfois agressif, flirtant avec la diffamation, un délit au regard de la loi. Le terreau idéal pour la prolifération de la désinformation. La méthode Trump a traversé l’océan Pacifique. Alors que Manuel Valls, le ministre des Outre-mer, prône un dialogue apaisé entre les partenaires calédoniens, la disparition d’un média professionnel et la prolifération des fake news sont autant de mauvaises nouvelles pour la constitution d’un chemin de la réconciliation.