Du beat, du graff et du battle dans l’air

Pour la quatrième fois, la Quinzaine du hip-hop propose de faire vibrer la province Sud du 1er au 16 avril. L’événement est l’occasion pour le mouvement de mettre en avant ses multiples talents, tant dans le rap que le graff ou encore la danse. Comme chaque année, le programme promet d’être riche. Focus sur la commune de Dumbéa qui propose cette année une résidence de graffeurs et de danseurs. Le travail des artistes sera présenté sur la commune au cours de la quinzaine.

Les portes grandes ouvertes de la salle d’exposition du centre culturel de Dumbéa laissent échapper une odeur de bombe de peinture et des notes de rap. Depuis deux jours, trois graffeurs ont investi le lieu d’exposition de la commune de Dumbéa. Ils ont une petite quinzaine de jours de résidence pour monter une expo dont le but « n’est pas de redorer le blason du graff, mais de lui donner véritablement ses lettres de noblesse », résume Kuby, un des trois artistes.

Konexion, c’est le nom donné à la rencontre de trois artistes et de trois univers. Les trois hommes sont graffeurs autodidactes et c’est précisément leur parcours qui a permis à chacun de se construire un monde graphique propre. Outre Kuby, Grégory Minassian, artiste aux multiples casquettes (à l’envers), que les Calédoniens ont appris à connaître ces trois dernières années, et de Quentin Volia, alias Choc, graffeur présent sur la scène calédonienne depuis de nombreuses années, les visiteurs de l’exposition en construction découvriront Julien Raynaud, métropolitain invité pour l’occasion. Si lui aussi vient du graff – c’est par ce biais qu’il a forgé son style – aujourd’hui, son métier, c’est « artiste peintre ».

Le partage et de moins en moins de barrières

Le fait est suffisamment rare pour être souligné, les graffs seront « posés » sur des toiles, dans une galerie. Si ces pratiques sont banalisées dans les grandes capitales mondiales, le public du Grand Nouméa reste peu habitué à voir entrer l’art urbain dans les galeries. L’idée a germé des discussions entre Kuby, Alexia Duchesne, chargée d’actions culturelles à la province Sud, et Alice Pierre, la responsable du centre culturel de Dumbéa. Konexion est d’ailleurs le résultat du partenariat entre les deux collectivités et les graffeurs. « C’est notre première expo d’art urbain et c’est une vraie démarche des artistes, souligne Alice Pierre. Notre espace s’y prête et nous sommes friands des projets que nous pouvons accompagner du début à la fin

La commune du Grand Nouméa, qui est une des seules du territoire à offrir des résidences d’artistes, voit l’opportunité dans ce mode de création de permettre au public de rencontrer les graffeurs. Deux nocturnes sont proposées les jeudis soirs afin de voir évoluer les artistes au cours de leur processus de création.

Ces rencontres ont notamment été rendues possibles grâce à l’organisation de l’événement en galerie, ce qui est loin d’être anodin pour le graff. Cet art, partie intégrante du mouvement hip-hop, est l’expression d’une contestation. Longtemps le hip-hop a été une manière de déconstruire les codes d’une société dans laquelle les jeunes ne se retrouvaient pas. Si c’est encore le cas aujourd’hui, « il y a de moins en moins de barrières », note Kuby. « Ce n’est pas une expo uniquement pour les amateurs de street art, confirme Quentin. Ce sera assez représentatif du graff, de l’art urbain mais aussi de l’art contemporain et des différentes techniques que l’on peut utiliser comme la bombe, le pinceau ou le pochoir. »

De l’art de rue, mais de l’art quand même

« L’idée de la mise en abîme, de recréer la rue dans une galerie, est intéressante », analyse la responsable du centre culturel. Un moyen de mieux prendre à contre-pied ceux qui n’aiment pas le graff. « Il y a des gens qui vont nous dire que ce n’est pas du graff parce que normalement, le graff, c’est laid », s’amuse Kuby qui, en parallèle de la Quinzaine du hip-hop, prépare une autre exposition de graff en galerie, Packaging (à partir du lundi 11 avril à 18 h 30). La discipline sera particulièrement à l’honneur cette année avec encore un autre événement de la quinzaine au Mont-Dore (lire par ailleurs). Pendant que les graffeurs travaillent à faire tomber les dernières frontières psychologiques entre leur discipline et l’Art, les danseurs de la compagnie Moebius mettent au point les derniers détails de leur spectacle Génération hip-hop dans la salle de spectacle du centre, là encore, dans le cadre d’une résidence. Autre discipline, autre rencontre. Quatre jeunes danseurs, espoirs du break calédonien, ont rencontré quatre danseurs chorégraphes pour une fois encore faire tomber les barrières et proposer un spectacle rassemblant tous les styles du hip-hop.

M.D.

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 Il existe autant de styles de graff que de graffeurs. Cette exposition est un moyen de découvrir cette diversité et de prendre conscience de la place qui revient à cet art qui, au même titre que les autres, est autant une question d’esthétisme que de fond. Si le graff, à l’origine, est une pratique spontanée répondant à des besoins d’expression.

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Pour la mairie de Dumbéa, ces résidences étaient l’occasion de développer des projets transversaux. C’est le cas d’un chantier jeune de socialisation. L’idée est que des jeunes déscolarisés réalisent un court-métrage sur les résidences, l’occasion pour eux de mesurer le travail nécessaire à l’aboutissement de tel projet mais aussi la diversité des intervenants nécessaires.

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A noter

Vous pouvez rencontrer les graffeurs pendant leur résidence, les jeudis soir (24 et 31 mars) de 17 à 19 heures. L’exposition Konexion ouvrira ses portes le mercredi 6 avril et s’achèvera le 14 mai. Le vernissage aura lieu le mardi 5 avril à partir de 18 heures à la Villa des Arts du centre culturel. Les artistes proposeront chacun un travail individuel ainsi qu’un travail collectif, fruit de leurs échanges. À noter que les toiles seront proposées à la vente par les artistes.

Le projet de danse Génération hip-hop de la compagnie Moebius sera présenté au centre culturel le jeudi 31 mars et le 1er avril pour les scolaires. Le spectacle sera également joué le vendredi 8 avril à 20 heures et le samedi 9 avril à 18 heures pour le public (tarif de 1 500 francs, 1 000 francs au tarif réduit et 750 francs avec le multipass). Renseignements auprès du centre culturel de Dumbéa au 41 23 07.

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Les mix qui donnent l’eau à la bouche

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La scène rap n’en finit pas de grandir. Cette année encore, les rappeurs reviennent avec la soirée Mix en bouche au Mouv’, à Rivière-Salée, organisée le 8 avril. En partenariat avec la province Sud, l’association Dix Vers Cités et le collectif Ina Di Street font venir Demi Portion, rappeur montant de la scène Sétoise. Ce fan de Georges Brassens, il lui a du moins rendu hommage, a sorti son premier album en 2009. Mais au-delà de son goût pour la poésie, ses influences sont plutôt à chercher du côté du rap new-yorkais qu’il affectionne tout particulièrement. Plusieurs master class et des soirées rencontres seront organisées pendant la quinzaine. Des concerts gratuits auront également lieu dans des bars. Côté Dj’s Netik et Fly, aux palmarès qui comprennent plusieurs titres mondiaux, reviennent faire chauffer les platines. Des rappeurs et DJ’s du Pacifique seront également présents pour l’occasion. C’est le cas Jay-P Nalei, un rappeur francophone de Port-Vila ainsi que de King Kapisi de Nouvelle-Zélande, que le Siapo (association solidarité itinérante d’artistes du Pacifique) fait venir une nouvelle fois. La scène calédonienne ne sera pas en reste avec le groupe Youdnit, du quartier de Tindu, et leur nouvel album, sans compter toute la clique du collectif Ina Di Street et bien d’autres encore.

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Le Mont-Dore cœur du graffiti mondial !

Les Calédoniens vont pouvoir admirer ce qui se fait de mieux en matière de graff. L’expo Out For Fame sera de passage au centre culturel du Mont-Dore à partir du 15 avril. Elle rassemble des œuvres d’une cinquantaine d’artistes en provenance des cinq continents et, pour l’occasion, quelques Calédoniens se joindront au mouvement. Une expo à ne pas rater !