Sa carcasse imposante avait fait d’elle un repère incontournable de l’entrée de ville de Nouméa. Aujourd’hui, la salle omnisports François-Anewy n’est plus qu’un squelette attendant sa démolition définitive.
Cette infrastructure, construite pour les Jeux du Pacifique, NC 2011, n’a pas survécu aux nombreux incendies provoqués durant les émeutes de 2024.
La première victime de cette démolition est la Jeunesse sportive Vallée-du-Tir (JSVDT), un club iconique du quartier créé en 1960. Maintenant, les licenciés doivent jouer à Rivière-Salée ou à l’Artillerie. « Je perds tous mes jeunes. J’en avais une soixantaine, je n’en ai plus qu’une dizaine », déplore Éric Saminadin, président de la section basket-ball. J’avais quatre ou cinq jeunes du quartier, je les ai perdus. »
UN TERRITOIRE MARQUÉ
Un lieu de vie, parmi d’autres, que perd le quartier, sans savoir s’il sera reconstruit un jour. Car la liste des bâtiments détruits suite aux émeutes de mai 2024 est longue dans la deuxième Vallée-du-Tir. Plusieurs commerces, dont des magasins d’alimentation et un concessionnaire automobile, n’ont pas survécu aux flammes. Des organisations caritatives ont aussi été touchées, les locaux de la société Saint-Vincent-de-Paul ont été brûlés et pillés, ainsi que le café solidaire de la Banque alimentaire.
La voirie et la signalisation routière, notamment Néobus, n’ont pas été épargnées. Les images qui ont le plus marqué les esprits restent les incendies d’une dizaine de maisons d’habitation, principalement dans les rues Paul Bert et des Frères Devaux, et le départ précipité de ses occupants. Les incendies de deux maisons en mai 2025 ont ravivé ces souvenirs.
DES ABSENCES
Ces semaines de violence ont laissé des traces dans les esprits, comme dans les lieux. Des graffitis aux messages politiques et des bâtiments détruits parsèment encore les rues. Mais le quartier s’illustre aujourd’hui surtout par ses absences. « Il n’y a plus rien », estime un natif de la Vallée-du-Tir.
Les démolitions ont commencé et ont laissé place à des espaces vides. Certains tentent d’effacer les traces. En avril 2025, la province Sud a lancé la reconstruction de ses bâtiments publics avec la rénovation de son pôle technique situé dans la première Vallée-du-Tir. Des travaux de voirie ont par ailleurs été entamés par la mairie.
Une absence qui s’illustre aussi par les rideaux de fer baissés des commerces et des services publics. « Il ne reste plus que deux magasins. Il n’y a plus de médecin et de pharmacie. Et l’espace municipal est fermé », énumère une habituée des lieux. Le réseau Tanéo ne passe également plus au cœur du quartier et le contourne par la route provinciale. Des services de restauration, qui attiraient une clientèle extérieure, ont rouvert ailleurs.
Cette situation entraîne aussi des effets indirects. « Notre local n’est plus assuré », se désole une membre d’association. Un courtier confirme que le quartier est considéré comme une « zone rouge » par les assureurs.
Dans ce quartier de 1 823 habitants (recensement de 2019), dont une partie est précaire, la vie tente de se réinventer en innovant. Chaque deuxième samedi du mois, un marché solidaire est organisé avec des vendeurs de Houaïlou, Thio et de la Vallée-du-Tir. Le 26 avril dernier, le « Lisapo, le mois du conte » s’est achevé sur la place Constantine, au cœur de la deuxième Vallée-du-Tir. Un nouveau chapitre dans ce quartier déjà riche en histoire. F.D.