Tous les ans, le Centre d’apiculture organise un concours pour départager les meilleurs miels de Nouvelle-Calédonie. Emmanuel Récamier, membre du jury depuis trois éditions, explique les étapes à suivre
Emmanuel Récamier observe le miel à travers le verre. Il détaille sa robe, s’attarde sur « sa couleur, sa propreté et sa transparence ». Avant de le mettre en bouche, il sent pourdétailler les arômes.
L’ancien œnologue a l’habitude de répéter ces gestes pour élaborer les meilleurs vins. Sauf qu’ici il ne déguste pas le fruit de la vigne, mais le labeur des abeilles. « Les techniques de dégustation du miel et du vin sont proches », estime le membre du jury du Concours des miels de Nouvelle-Calédonie.
Un bon miel, qui sort du lot, est un équilibre entre acidité, amertume et sucre gras. »
D’abord, les goûteurs observent, puis sentent et enfin dégustent. À la différence du vin, ils jugent en plus la texture. « Il ne faut pas que le miel dégouline de la tartine, poursuit Emmanuel Récamier. La couleur du miel est aussi très importante, mais cela n’a aucun rapport avec la qualité. Un miel clair ou foncé peut être très bon. »
Odeur crevette
L’essentiel demeure donc le goût et le parfum. Pendant le concours, tout l’enjeu va être de réussir à décrire ce que le palais et les narines ressentent. « Un miel parfumé et complexe pourra ne pas correspondre en bouche, les saveurs et les odeurs sont relativement différentes », prévient l’expert.
À l’image du vin, l’appréciation du miel s’apprend. Il faut faire confiance à ses propres sensations pour évaluer l’intensité ou la longueur en bouche. « Ce n’est pas naturel d’aimer le vin, on ne l’apprend pas spontanément, compare Emmanuel Récamier. N’importe qui peut apprécier le miel sur une tartine, mais tous les miels ne se ressemblent pas. Il y a une gymnastique à apprendre. »
Le miel ne se périme pas
C’est bien l’un des seuls aliments que l’on peut consommer presque éternellement. Même oublié au fond du placard, il sera toujours consommable.
Les abeilles retirent une grande quantité d’eau du nectar récolté sur les fleurs, ce qui permet d’éviter la fermentation. Sa faible teneur en eau et ses enzymes naturels empêchent les bactéries de venir se développer.
Il faut simplement le conserver dans un endroit sec et à l’abri de la lumière.
Une roue des saveurs, allant du fumé aux crevettes, aide les jurés dans leur travail. Ils utilisent le même vocabulaire pour détailler au mieux, sans jugement de valeur. « C’est l’intensité qui compte, on sent plein de choses dès qu’on ouvre le pot. Si on associe du tabac aux arômes floraux, cela peut donner quelque chose de super. »
Mais gare aux excès. La dégustation du miel ne tolère pas non plus les abus. Comme le vin contient de l’alcool, le produit des abeilles est saturé en sucre. « Il y en a tellement que ça excite l’organe du plaisir et détourne des autres sensations. On peut être écœuré au bout d’un moment. » Le miel se savoure, oui, mais avec modération.
Brice Bacquet
Photo : Janie Airey / Cultura Creative / Cultura Creative via AFP
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