[DOSSIER] Sur la voie de la justice transitionnelle

Emmanuel Nyipiengo Kouriane est doctorant en droit à l’Université de la Nouvelle-Calédonie. © F.D.

Doctorant en droit, Emmanuel Nyipiengo Kouriane défend le principe de la justice transitionnelle, pour sa thèse et pour le Sénat coutumier.

La justice transitionnelle, le concept est encore récent en Nouvelle-Calédonie. « Au niveau du droit international, c’est très développé dans certains pays. En France, ça ne l’est pas encore », souligne le chercheur. En Métropole, elle commence à être exploitée dans des affaires comme les enfants de la Creuse (le transfert forcé de plus de 2 000 mineurs de l’île de La Réunion vers l’Hexagone dans les années 1960 et 1970) ou les abus sexuels dans l’Église catholique. Le concept repose sur quatre piliers : le droit à la vérité, à la justice, à la réparation et aux garanties de non-répétition.
Au sein de la commission droit et justice du Sénat coutumier, « nous travaillons sur un projet de chemin de réconciliation qui est en lien avec ces piliers », assure le juriste qui occupe un rôle de « technicien » dans ce projet. Les 11 et 12 mars 2024, le site de Nouville a ainsi accueilli un séminaire sur la vision kanak de la justice transitionnelle. « L’objectif est de sortir avec une délibération du Sénat coutumier » et « proposer une réconciliation qui nous ressemble ».
Cette démarche trouve un écho aux travaux universitaires du jeune homme puisque sa thèse a pour sujet « la justice transi- tionnelle et le processus d’émancipation en Nouvelle-Calédonie ».
Emmanuel Nyipiengo Kouriane en est convaincu : « Les principes de la justice transitionnelle pourraient aider à trouver une voie de réconciliation solide et durable ». Pour cela, il défend les piliers de ce concept comme des étapes naturelles à suivre. « À ma connaissance, c’est une première qu’un président de la République ait parlé d’un chemin de pardon, mais ce n’est pas suffisant, estime-t-il. Si on prend l’histoire du pays telle qu’elle est, on se rend compte que beaucoup de répétitions de violations des droits de l’homme ont eu lieu. Il faut dès lors la vérité, la justice, la réparation et des garanties de non-répétition pour permettre la réconciliation et in fine une paix durable. »

F.D.

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