Parmi les grands axes de réflexion définis par le gouvernement au travers de son plan S2R, se trouve l’aspect sociétal. Une thématique vaste, qui peut regrouper plusieurs problématiques.
Les émeutes débutées le 13 mai n’ont pas seulement mis à mal la vie économique du pays, elles ont également révélé les dysfonctionnements de la société calédonienne. À l’heure où l’on parle de reconstruction, quels sont les leviers à activer afin de trouver un équilibre global ? Pour Patrice Godin, anthropologue et cofondateur du collectif Pays pour le dialogue, la priorité est de « refaire du lien entre la classe politique et la population ». Surtout, « de permettre que cette population soit entendue ».
UNE CONCERTATION ÉLARGIE
Car « aujourd’hui, dénonce-t-il, quand les politiques veulent entendre la population, ils font des commissions, ils mettent en place des enquêtes, etc. Mais en vérité, celle-ci est rarement entendue ou, quand elle l’est, c’est parce qu’elle a répondu aux questions des politiques. […] Il y a un vrai problème d’écoute ». Il ne s’agirait donc pas seulement d’écouter « les réponses », mais aussi « les questions que la société se pose, et les réponses qu’elle souhaite leur apporter ».
Le faire sous forme d’un questionnaire ? Pourquoi pas, « mais pas uniquement », insiste l’anthropologue. Outre la voie de la rencontre directe, l’important est d’instaurer « une habitude ». « Il ne faut pas le faire ponctuellement quand tout à coup il y a une crise. Il s’agit de faire en sorte que la concertation et la participation citoyenne se fassent dans la durée et en profondeur. » Plus important encore, le fait « d’entendre tout le monde » afin que cela soit « profitable à toute la société ».
Ces quatre mois de crise ont eu pour effet d’interroger la population sur l’existence et l’état du vivre ensemble. Pour Patrice Godin, si le lien social a « fortement été ébranlé » depuis le 13 mai, le vivre ensemble n’est « pas cassé ». « Il y a une volonté collective qui s’affirme en vérité partout. La majeure partie des gens croient encore au vivre ensemble et ceux qui n’y croient plus en tout cas le désirent. […] C’est ce que montre le travail qui a été fait avec le collectif ». Selon lui, c’est avant tout « une question de volonté ». Ceci étant, même s’il « faut faire face à la crise économique et qu’il y a toute une série d’enjeux, […] ce chaos offre une opportunité d’y réfléchir sérieusement et d’afficher cette volonté ».
Nikita Hoffmann