[DOSSIER] Patrice Faure : « Le nouvel accord doit permettre de passer du rêve à la réalité »

Le 6 février, la Nouvelle-Calédonie accueillera un nouveau haut- commissaire, Louis Le Franc, ancien militaire doté d’une solide connaissance de l’Outre-mer et du territoire. L’action de Patrice Faure a été largement saluée. Il revient sur sa mission calédonienne, rythmée et « passionnante ».

DNC : Avez-vous demandé à partir ?

Patrice Faure : C’est une décision concertée. Il y a des moments où vous avez des obligations vis-à-vis de vous-même, de la famille, de l’État. Nous allons entrer dans une nouvelle phase de négociation du nouvel accord, c’était un moment opportun pour que les calendriers puissent s’accorder. Et cela permet à un nouveau haut-commissaire d’entamer le début de cette nouvelle phase.

Je suis très heureux que Louis Le Franc ait été choisi pour occuper ce poste. C’est déjà un grand préfet et ce sera un très grand préfet pour la Nouvelle-Calédonie.

Y a-t-il une passation de pouvoir où l’un prodigue des conseils à son successeur ?

Bien évidemment nous nous sommes téléphoné, nous allons nous recontacter. Je n’ai pas de conseils à lui donner, parce que les affaires de l’État sont gérées dans la continuité, chacun avec sa personnalité et son expérience.

Je lui ferai part de mon expérience, de l’évolution de ma perception parce que ce dossier a évolué ; de ce que j’ai constaté, apprécié ; ce que j’envisageais mais c’est à lui, avec sa personnalité, son ressenti, de poursuivre l’action gouvernementale dans ce dossier qui est parfois un peu compliqué. Avec des têtes nouvelles, des visions parfois différentes et/ou complémentaires, on arrive à avancer, peut être encore plus efficacement.

Le maintien du troisième référendum, l’envoi de renforts militaires impressionnants ont marqué les esprits… Des moments difficiles ?

Le pouvoir politique s’appuie sur un ensemble de faisceaux, de considérations, de travaux de fond pour prendre ses décisions. Une décision devait être prise et, comme toute décision, elle a été sujette à contestation. Nous avons fait en sorte d’organiser le troisième référendum en bonne intelligence, avec l’ensemble des acteurs et des renforts pour qu’il se déroule dans la plus grande quiétude.

En dehors du résultat qui est considéré comme illégitime pour certains, extraordinaire pour d’autres, le référendum s’est particulièrement bien déroulé, grâce à tout le monde qu’ils soient issus des services de l’État ou des mairies.

Quel message souhaitez-vous délivrer aux Calédoniens ?

Quand je suis arrivé, un personnel du haut-commissariat venait de réussir un concours. Elle voulait bénéficier des avantages acquis sans suivre sa formation en Métropole, appuyée par différentes interventions politiques. Je lui ai expliqué que la règle devait être respectée, qu’elle devait se former, avoir d’autres expériences.

Un an plus tard, elle est venue me remercier. Elle se plaisait beaucoup et, surtout me disait-elle, nous devrions tous faire cela, parce qu’on peut ainsi voir qu’on est beaucoup plus heureux que les autres en Nouvelle-Calédonie. On l’oublie trop souvent !

Pensez-vous que les Calédoniens vont réussir cette nouvelle étape ?

Je suis intimement persuadé qu’ils sont en passe de réussir. Les premières victimes des évènements de 88 se sont offert un pardon mutuel. Je n’imagine pas qu’une population qui n’a pas connu cette période, puisse encore vivre en justifiant des actes, des postures, d’un côté comme de l’autre, par ces évènements.

Deuxièmement, les différents accords ont conduit à la paix. Chacun a rêvé, pour les uns de l’indépendance, pour les autres d’une autonomie accrue dans la France. Le nouvel accord doit, de mon point de vue, permettre aux calédoniens de passer du rêve à la réalité.

Il faudra que les uns et les autres fassent tomber les masques, qui sont évidemment le préalable à une négociation. Cette entente sous-jacente, dont on nous a parlé en off mais pas en public, est partagée par les jeunes générations.

L’État veut que les Calédoniens soient heureux. »

Que veut l’État ?

L’État veut que les Calédoniens soient heureux. Et pour qu’ils soient heureux, il faut qu’ils s’assument et s’en donnent les moyens. La Nouvelle-Calédonie a tous les moyens pour s’administrer, s’enrichir intellectuellement, culturellement, etc. L’État, lui, est là pour permettre les débats, les travaux qui doivent conduire à cet accord.

Après les trois référendums qu’on nous a demandés, nous sommes obligés de nous mettre autour d’une table, faire ensemble le bilan de l’Accord de Nouméa ainsi que l’audit de la décolonisation.

On pourra constater que beaucoup de choses ont été faites, qu’il reste encore beaucoup à faire, mais qu’en se mettant autour d’une table, on peut réussir à ce que la Calédonie puisse se développer, mieux s’insérer dans sa région, avec une économie forte qui s’exporte, qui instruit et qui partage.

Les armées se renforcent. Faut-il craindre un conflit ?

Le fondement même d’une armée est de montrer ses muscles pour qu’il n’y ait pas la guerre. Un État responsable, fort, est capable de montrer sa puissance, ses savoir- faire. Le chef de l’État a annoncé une loi de programmation militaire de 413 milliards d’euros ce qui est le plus gros budget depuis 1960, avec une attention toute particulière pour les outre-mer.

Les FANC s’entrainent, se préparent au quotidien sur le volet strictement militaire, mais aussi dans le cadre de missions de secours. Les conséquences du changement climatique rendent cette posture de plus en plus évidente, importante et rassurante pour la Nouvelle-Calédonie, bien évidemment, mais aussi pour les états voisins.

Il est possible qu’une catastrophe mette à mal toute une île et il faut qu’avec nos grands voisins, nous puissions intervenir, gérer les déplacements de population. Nous nous préparons.

Propos recueillis par Chloé Maingourd

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