Remis par le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, à l’issue de son séjour en Nouvelle-Calédonie, un document pose, dans son propos introductif, le cadre souhaité du futur accord.
Manuel Valls l’a répété, avec insistance. Au terme des rencontres avec les partenaires politiques calédoniens à Nouméa, le gouvernement central a dévoilé ses « orientations » sur l’avenir de l’archipel. « Elles ne valent pas accord, elles n’engagent pas les différents protagonistes » a soutenu le ministre des Outre-mer.
Le document expose, sous chaque thème clé, de l’autodétermination aux communes, les hypothèses présentées comme un condensé des positions des uns et des autres.
Les premières pages sont certainement les plus importantes. Car ce propos introductif du ministre pose le cadre du futur accord, ou plus exactement, du futur « compromis », le mot est indiqué plusieurs fois. Ce qui implique « des rapprochements », « des concessions consenties par toutes les parties », et ce, « dans l’intérêt des Calédoniens ».
Cette quête du chemin à tracer entre les aspirations politiques des non-indépendantistes et des indépendantistes rompt donc catégoriquement avec la méthode du prédécesseur Gérald Darmanin.
Surtout, aujourd’hui, il y a « une base politique et juridique », écrite lors de la rencontre de Nainville-les-Roches et par les accords de Matignon-Oudinot et de Nouméa. Voici donc le socle, même si le moment fondateur de 1998 doit être renouvelé. Vers quoi ? « Le lien avec la France » figure parmi les « principes essentiels » réaffirmés par l’État. Dans le document, Manuel Valls observe la volonté d’une majorité de Calédoniens de maintenir la Nouvelle-Calédonie au sein de la République française. « Que la dernière consultation ait laissé un sentiment d’inachevé est un fait, mais le résultat de ces référendums est là », mentionne le ministre d’État.
L’accès du territoire à la pleine souveraineté est ainsi une option écartée. Des notions trouvent toutefois un écho auprès des indépendantistes : « l’achèvement du processus de décolonisation » ainsi que « le droit inaliénable à l’autodétermination ». Les conditions d’exercice suscitent, elles, un lourd débat.
GRANDE NOUVEAUTÉ, LA LOI FONDAMENTALE
D’après les échanges tenus à Nouméa, une période de stabilisation pour bâtir un avenir durable est nécessaire afin de progresser dans la constitution du « peuple calédonien ». Une expression qui unirait donc toutes les communautés, sans distinction.
La Nouvelle-Calédonie serait de même « unie et indivisible », un principe apprécié comme essentiel. Ces deux termes peuvent constituer un avertissement : ne pas aller trop loin dans l’hyperprovincialisation ou le fédéralisme interne, concept cher au groupe Les Loyalistes.
Une suggestion est par ailleurs formulée : la question de la citoyenneté peut renvoyer à la constitution d’un code qui établirait les droits et les devoirs des citoyens de la Nouvelle-Calédonie. Et parmi ces droits, figurerait celui de participer aux élections. Autrement dit, le corps électoral serait lié à la citoyenneté. Cet élément, entre autres, pourrait être intégré, Manuel Valls le pense, dans une loi fondamentale calédonienne, inscrite au titre XIII de la Constitution française. Cette disposition d’une grande force légale représente une réelle nouveauté.
Des phrases ne sont pas arrivées par hasard dans le document. Pour le ministre, « une seule voie s’ouvre à nous : celle d’un accord politique suivant un chemin de réconciliation ». Mais, voilà, « sans ce chemin, aucune reconstruction solide de la Nouvelle-Calédonie ne sera possible après les dommages humains, moraux et matériels, mais aussi politiques, nés de la catastrophe du 13 mai 2024 ». Une lecture est alors possible : le premier élu qui quitte la table des discussions sera responsable de l’échec de l’accord, et de la désormais difficulté d’accès aux financements de l’État.
Yann Mainguet
Les Loyalistes préviennent, le FLNKS aussi
Sur l’autre rive, le FLNKS « rappelle que ce document n’engage que l’État », et des éléments jugés incontournables restent à clarifier : « la trajectoire vers la pleine souveraineté [qui] doit être assumée par la puissance administrante » ou encore « la présence du président du FLNKS [Christian Tein actuellement placé en détention provisoire en Métropole] aux négociations et le traitement judiciaire de la situation des prisonniers politiques ». La convention du mardi 4 mars à Dumbéa a confirmé le mandat de discussion de la délégation politique du FLNKS. Toutefois, ces éléments devront « trouver des réponses avant de s’engager dans la phase de négociation ».