[DOSSIER] Les bons petits plats de Dominique Wing-Ka

Dans la cuisine de Dominique Wing-Ka, tous les produits calédoniens se transforment en de délicieuses recettes. Le cuisinier, passé par les cantines scolaires, promeut des plats colorés aux saveurs bien locales, sans forcément vider son porte-monnaie.

Entre ses mains, tout se transforme, se râpe, se cuit dans l’eau bouillante ou se glace dans une poêle. Grâce à son imagination, les chouchoutes se dégustent crues, accompagnées de copeaux de coco et arrosées de jus de citron réhaussé de miel. « C’est une salade de crudités pas chère à laquelle on peut rajouter ce qu’on veut », commente Dominique Wing-Ka.

La recette du chef

Pour préparer un babafigue, éplucher jusqu’au cœur la fleur de bananier, en enlevant les pousses de banane qui donnent un goût âcre et amer.

Émincer le cœur et le mettre à tremper 20 minutes dans l’eau avec du gros sel ou du vinaigre. Rincer et porter à ébullition dans une casserole remplie d’eau. Cuire 20 minutes. Égoutter et rincer
à l’eau froide.

Avec de la citrouille, le fruit grimpant se cuisine en coleslaw. Ses jeunes pousses et ses tiges n’échappent pas non plus à l’imagination culinaire débordante de chef Dodo. Aux chouchoutes cuites, il ajoute du cerf pour revisiter un plat de chez lui : le rougail saucisse de La Réunion.

Des assiettes colorées

Photos : Assiette de carry de babafigue avec poitrine fumée et salade de blette rôtie. / Dominique Wing-Ka

Membre fondateur du collectif Pacific Food Lab, le cuisinier milite pour révéler les produits du territoire. Il incite à les « voir autrement ». Dans ses marmites, choux kanak s’accordent avec graines d’ambrevade. « Tout le monde se rabat sur la facilité, il faut réapprendre aux gens à utiliser les produits d’ici », estime-t-il.

Dans son cuiseur, les légumes coupés durant le week-end mijotent avec du lait de coco plus souvent que le riz. Le manioc s’accompagne aussi de lait de coco, puis s’écrase avec deux cuillères à soupe de farine complète et deux œufs, avant de se déguster en gaufre sucrée ou salée.

L’astuce du chef

Envie de poisson ? Pour baisser le prix, Dominique Wing-Ka conseille de demander le ventre du thon. « Le morceau n’est pas cher et se trouve chez tous les poissonniers », insiste-il.

Le chef l’apprécie parce qu’il « tient bien à la cuisson et ne sèche pas ». Le ventre de thon peut se faire en salade ou en rillettes, voire même en parmentier avec un écrasé de manioc.

Son maître-mot : l’exploration. « Avec un seul produit, on peut faire plusieurs recettes ». Dominique Wing-Ka compose ses menus selon ce qu’il a et ce qui lui donne envie. Contre la vie chère, il conseille de multiplier les ingrédients. « Si on part que sur un seul ingrédient, ça ne passe pas. Je défends les recettes bénéfiques, c’est-à-dire dès qu’on apporte au moins un produit local. »

« Réapprendre »

Sa technique, il l’applique d’abord dans les cours qu’il dispense avec Pacific Food Lab aux cantiniers du territoire. « J’amène les chefs de cantine vers une nouvelle manière de voir les produits locaux, explique celui qui est passé des grandes tables étoilées à la restauration collective du lycée du Grand Nouméa. Même dans les îles, ils ont tendance à ne pas utiliser les produits qui sont chez eux. »

La page du chef

Dominique Wing-Ka partage ses explorations culinaires sur la page Facebook à son nom. Son fil nous apprend à cuisiner la fleur de bananier (babafigue) ou à griller taros et ignames pour accompagner une côte de porc braisée.

Sa passion pour les fruits locaux, les fleurs de bananier et les plantes comestibles dépasse de loin les assiettes des enfants et des adolescents. Tous les Calédoniens doivent « réapprendre à utiliser les produits d’ici ». L’expert est conscient de l’ampleur de la tâche. Ses facilités à découper fruits, légumes, viandes et poissons en différentes recettes n’ont rien d’innée. Ces produits, il les travaillle depuis des dizaines d’années pour en extraire tous les secrets.

Brice Bacquet

Photo : Dominique Wing-Ka s’amuse à revisiter les plats épicés de ses origines réunionnaises, avec les fruits et légumes qu’il trouve sur les étals calédoniens. / B.B.

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