[DOSSIER] L’environnement, point de blocage persistant

Selon Jean-Guy M’Boueri, technicien agricole de formation, certaines « terres cultivables sont touchées par des dépôts de la SLN ». (© A.-C.P.)

La question des conséquences de l’exploitation minière sur la nature et des nuisances aux habitants, liées aux roulages et aux poussières, reste un sujet sensible.

En 2013, les averses provoquées par le cyclone Freda font déborder la rivière qui coule dans la vallée jusqu’au lagon. Le village est inondé. En colère, la population se mobilise et demande le curage de la Thio. C’est la naissance de l’association Chavaa Xûâ, présidée par Jean-Guy M’Boueri. L’accumulation de sédiments charriés par la pluie depuis les débuts de l’exploitation, il y a plus de 150 ans, serait en partie responsable du phénomène. « Avant, jusque dans les années 1970, tout était poussé sur les bords dans les ravines. À force, cela a engravé la rivière, le niveau de l’eau a monté et quand il y a des fortes précipitations, tout déborde. »

Des travaux ont été réalisés à plusieurs reprises depuis et l’année dernière au niveau de l’embouchure. « Une intervention était prévue en juin sur la rive droite, côté village, mais cela n’a pas été fait. Il faudrait un programme annuel », plaide le petit-chef de Saint-Philippo II. Selon lui, la SLN ne fait « pas assez niveau environnement : quand elle sort une tonne de minerai, elle devrait sortir une tonne de caillasses ».

Certains jeunes ne sont pas tendres. « Je préfère faire des petits chantiers que de fracasser les montagnes », appuie Dimitri. Pour Félix, « la SLN n’est pas bonne pour la nature ». « Quand il pleut, la mer est rouge, c’est sale partout », déclare un troisième. « Quand j’accroche mes chemises dehors, le col est plein de pous- sière. Maintenant, c’est mieux, il n’y en a plus », raconte Jean-Guy M’Boueri. Et le roulage, qui passe non loin de sa maison à Thio Mission, abîmant la chaussée, a cessé.

Sur son site internet, l’industriel affirme s’être engagée à « développer des solutions pour réduire le sur-engravement ». Le plan est basé sur le curage de la section d’écoulement, le confortement des berges et l’aménagement de plage de dépôt. Enfin, la SLN poursuit un objectif, celui de « reconstruire quatre digues aux embouchures des rivières, le réaménagement de creeks et la réhabilitation de ravine ».

 

Rivières et milieu marin
En 2019, l’Observatoire de l’environnement (OEIL) a mené des analyses dans la rivière.Les résultats soulignaient principalement « l’érosion des sols et le colmatage des cours d’eau dus aux anciennes pratiques minières, à l’exploitation actuelle, aux incendies à répétition et au développement d’espèces envahissantes telles que les cerfs et les cochons ».
Et l’état chimique des eaux douces, dans lesquelles pêchent les habitants, montrait des « teneurs supérieures aux valeurs de référence en chrome et chrome VI – forme toxique du chrome – signalant l’érosion des sols ».
Le milieu marin n’est pas épargné. L’OEIL observait, sur certains points de mesure près dela côte, « en particulier dans les zones sous influence de l’activité minière, des quantités élevées de métaux dans les sédiments et une augmentation des lésions coralliennes ».

Anne-Claire Pophillat