Les émeutes ont accéléré la dégringolade des comptes publics, affectés par le Covid ‒ qui avait entraîné la contraction de deux prêts pour près de 50 milliards de francs auprès de l’AFD en 2020 et 2022 ‒ et le fléchissement de l’économie amorcé à la fin des années 2010. Le rendement attendu des recettes fiscales est en baisse de 30 milliards de francs et celui des cotisations sociales de près de 11 milliards, selon la Direction des finances publiques (DFiP), aggravant le déficit des régimes sociaux et oblitérant la capacité de la Nouvelle- Calédonie à payer son dû à Enercal.
Les difficultés rencontrées par le territoire se répercutent sur les collectivités. Provinces et communes voient leur budget fondre, ce qui ampute notamment leur capacité d’investissement. Et la crise a engendré des dépenses supplémentaires, comme celles liées au fonds de solidarité pour les entreprises et au chômage partiel. En tout, l’État a apporté 67 milliards de francs, affirme la DFiP, dont la dernière tranche de 18 milliards (sur une enveloppe de 27), versée après le vote de l’augmentation de 1 % de la CCS et du jour de carence dans la fonction publique territoriale.
Une aide globale sous forme de subventions, mais surtout d’avances remboursables et de prêts, octroyée en contrepartie de réformes, selon la règle imposée par Bercy. « Il ne faut pas penser que l’État va nous aider sans faire d’effort », glisse cet ancien haut responsable. Le taux d’endettement du pays a explosé, à plus de 300 % selon ce dernier.
UN BUDGET 2025 SERRÉ
La priorité, désormais, pour le nouvel exécutif, est d’élaborer un budget 2025 dans un contexte économique anémié et politique instable, et « avec l’inconnue sur les recettes fiscales ». Si la France n’a toujours pas adopté son budget, il semblerait que le prêt garanti de 120 milliards de francs, dont 55 milliards doivent servir à rembourser les emprunts de 2024, n’ait pas été remis en cause par le gouvernement Bayrou. « Cela devrait suffire à passer l’année s’il est acté. »
Le timing est serré. Le document doit être adopté par le Congrès avant le 31 mars sous peine d’être piloté par la Chambre territoriale des comptes. Mais, considèrent les services des finances publiques, « le gouvernement sortant comme le gouvernement élu ont entamé le travail nécessaire pour doter la Nouvelle-Calédonie d’un budget ».
Si le territoire n’est pas en faillite, assure la DFiP, se relever devrait prendre du temps, analyse cet ancien haut responsable. « On va digérer 2024 en 2025, et 2026 sera une année plate pour préparer 2027. » Il s’agit désormais, pour l’exécutif collégial, de plancher sur les solutions connues depuis bien longtemps déjà : réaliser des économies et des réformes.
Anne-Claire Pophillat