Dix jours après le début des violences sans équivalent dans le Grand Nouméa, et alors que rien n’est vraiment réglé sur le terrain, une autre bataille s’est engagée. Celle de l’image.
Le président de la République arrivait ce jeudi à Nouméa pour 12 heures et finalement, sans limite de temps. Cette visite surprise, éclair, préparée en coulisse apparemment depuis le début de la semaine, a rappelé à beaucoup celle de François Mitterrand en 1985 sur le territoire déjà secoué par des émeutes. « Vous partez demain ? », avait demandé un journaliste. « Demain », avait répété le président.
Les Calédoniens, bien trop occupés, ne savent pas quoi en attendre. Emmanuel Macron lui aussi doit rattraper cette affaire, devenue centrale dans le débat politique national. Mais on s’interroge déjà sur le message qu’il vient apporter alors qu’il est accompagné de Gérald Darmanin et Sébastien Lecornu, personnalités contre lesquelles se dirigent les griefs des indépendantistes. La délégation compte aussi des profils administratifs, dont le préfet Rémi Bastille, longtemps en charge du dossier, pour installer une mission de dialogue. Absent, l’ancien Premier ministre, Édouard Philippe, que beaucoup auraient bien vu diriger une telle mission, a dit « espérer » du président des annonces « à la hauteur de la situation ».
Le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer a aussi essayé de trouver la parade ces dernières heures. Gérald Darmanin avait repris le flambeau de Sébastien Lecornu, très proche des Loyalistes, avec les résultats que l’on connaît. On l’a entendu dénoncer les ingérences de l’Azerbaïdjan et expliquer que les violences qui ont sévi dans l’agglomération n’ont rien de politique. Pourtant, au-delà de l’ordre et du traitement des délinquants et criminels, la délégation vient bien régler une question politique. Les manifestations qui avaient précédé les violences étaient politiques et les messages sur les barrages le sont aussi.
Tous, avec le Président, ont en tout cas été mal conseillés, mal avisés notamment par leurs plus proches partenaires. Ceux-là même qui semblent aujourd’hui avoir la mémoire courte sur tous les gestes dont ils ont bénéficié. Sonia Backès et Nicolas Metzdorf, en première ligne, expliquent la situation par un défaut des renseignements et dénoncent la stratégie de l’État sur le terrain. Ils posent même un ultimatum : le rétablissement de l’ordre dans les 48 heures. Et réclament la tenue du Congrès de Versailles. Aucune temporisation…
Tous ces protagonistes, et même les indépendantistes, sont aussi occupés à bien travailler leur communication avec les journalistes rivés sur notre histoire. La pièce, pour ceux qui ont tout perdu, est pathétique.
Chloé Maingourd