Parmi la vingtaine de poissonniers que compte le marché de Port-Moselle, Dominique Deschamps fait partie des plus anciens. Ayant connu le précédent marché de Nouméa, il a assisté ces quarante dernières années à son évolution, entre déménagement et changement d’habitudes.
C’est l’un des premiers commerçants que l’on aperçoit en entrant dans l’espace poissonnerie du marché de Port-Moselle. Derrière son stand contenant rougets, thons et mulets, Dominique Deschamps y assure ‒ en compagnie de sa femme – la vente de sa propre pêche.
Une activité qu’il pratique depuis son plus jeune âge, avec son père pêcheur, et qu’il a lui-même pris soin de transmettre à ses cinq enfants. « Ils ont grandi là-dedans. Je les emmenais pendant les vacances camper et pêcher sur les îlots », se remémore-t-il.
Son expérience de poissonnier débute en 1981. Alors âgé de 18 ans, le Calédonien intègre « l’ancien marché », autrefois situé au niveau de l’actuelle place Rolland, au centre-ville. « À cette époque, tout le monde venait en ville, ça bougeait. Il n’y avait pas tous les grands commerces qu’on a aujourd’hui. C’était facile de gagner sa vie », souligne-t-il.
L’ambiance y est familiale. Le fonctionnement, « archaïque ». « On n’avait pas de glace sur les étals. Mais le poisson partait tellement vite qu’on n’en avait presque pas besoin », s’amuse-t-il. La « belle époque », lorsque le kilo de dawas ne représentait que 120 francs, et le litre d’essence, 20 francs. « Aujourd’hui, c’est plus pareil. On est obligés de rogner sur nos marges. Il faut travailler plus pour gagner moins », regrette- t-il, néanmoins positif : « On y arrive quand même, on s’adapte ».
UNE ÉCONOMIE EN BERNE
En 1991, le marché municipal de Nouméa est inauguré à Port-Moselle. Un point de vente « plutôt pas mal » que Dominique Deschamps intègre dans la foulée, du mardi au vendredi. « Aujourd’hui, on est davantage présents du vendredi au dimanche, précise le sexagénaire. La semaine, il n’y a plus personne. » Une diminution de la fréquentation qu’il a vue apparaître « il y a deux-trois ans ». Résultat, selon lui, « d’une économie qui se dégrade » et du développement de commerces, de poissonneries et de marchés. « Maintenant, les gens n’ont plus besoin de venir en centre-ville pour trouver du poisson », commente-t-il.
Résultat, son chiffre d’affaires diminue. « Il y a 20 ans de cela, je vendais mes mulets à 500 francs le kilo, et il n’y en avait pas assez. Aujourd’hui, le prix est resté le même, mais on peine à les vendre. Ça se complique ». Restent certains clients fidèles. « Il y a plein de personnes que je connais depuis des années », sourit-il. En parallèle, « l’administratif » prend de plus en plus le pas sur son métier de poissonnier. « Pour la sécurité, ils nous demandent un tas de papiers », explique celui qui réserve son lundi pour « régler la paperasse ».
Afin d’arrondir ses fins de mois, Dominique Deschamps envisage d’intégrer le marché de Ducos, le mercredi après-midi. « Mais ça va demander du boulot ».
Nikita Hoffmann