Point de crispation sur la place politique, la révision de l’architecture institutionnelle est pourtant incontournable. Le professeur Ferdinand Mélin-Soucramanien évoque des pistes.
Prévue au terme de l’accord de Nouméa, l’évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie est « inéluctable puisque de toutes les options, on le sait, la seule qui doive être exclue est celle du statu quo », rappelle Ferdinand Mélin-Soucramanien, professeur de droit public à l’Université de Bordeaux.
Le coauteur des Réflexions sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie observe cependant que cette révision statutaire est aujourd’hui devenue « très difficile à réaliser, pour ne pas dire presque impossible, tant la “machine infernale” créée par les référendums successifs » a causé « des ravages destructeurs ».
Néanmoins, de son point de vue, trois éléments relevant du « gros œuvre » mériteraient d’être redessinés. Le premier a trait à l’équilibre des pouvoirs entre le Congrès et le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie. Le passage vers un statut plus durable devrait « induire à terme un changement du comportement des acteurs politiques » mais aussi, « sans doute, des textes » régissant cet équilibre des pouvoirs.
D’ailleurs, selon Ferdinand Mélin-Soucramanien, « la formule du “gouvernement de consensus” qui a d’ores et déjà volé en éclats ne devrait pas pouvoir survivre à l’après accord de Nouméa ».
« PLACER LE CURSEUR »
Le deuxième axe précisé par l’universitaire s’intéresse à l’équilibre des pouvoirs entre la Nouvelle-Calédonie et les provinces. « Il est très probable que l’ouvrage devra être remis sur le métier s’agissant non seulement des compétences respectives de la Nouvelle-Calédonie et des provinces, mais aussi de la clé de répartition financière. » Et ce, pour des raisons démographiques, économiques… Mais aussi parce que « les inégalités sociales se sont encore accrues ».
Pour le président de l’Association des juristes en droit des outre-mer, la véritable question ne repose pas « tant sur le point de savoir si cette répartition des compétences doit être modifiée, mais plutôt sur celle de savoir où placer le curseur ».
L’équilibre des pouvoirs entre la Nouvelle- Calédonie, les provinces et les communes est le dernier pan de la réflexion. D’ailleurs, la piste s’intéressant au statut et aux compétences des 33 communes pourrait être explorée, souligne le professeur de droit public. Les maires réclament des évolutions. Ces communes sont « les seules collectivités de droit commun sur le territoire ».
L’article 27 de la loi organique mentionne les règles relatives à l’administration des provinces, des communes et de leurs établissements publics, ou encore de leur contrôle de légalité. Le transfert de ces compétences n’a jamais eu lieu. « Si la Nouvelle-Calédonie avait en main cette carte, elle pourrait jouer sur plusieurs leviers tels que les compétences, les ressources financières, voire la place de la coutume dans l’administration communale », estime Ferdinand Mélin-Soucramanien. Pour qui, « en somme », une nouvelle donne institutionnelle est « absolument indispensable ».
Y.M.