La cession des parts de Glencore constitue un processus complexe. Trois multinationales se sont rapprochées des actionnaires de KNS.
Pilier historique du rééquilibrage entre les provinces Nord et Sud, le complexe métallurgique de Koniambo Nickel est passé d’une veille chaude à froide, en septembre 2024. « L’usine n’est pas fermée, elle est en suspension d’activité », précise Karl Therby, PDG de la SMSP, l’entité actionnaire à Vavouto à hauteur de 51 %.
Le reliquat au capital, 49 %, est placé sur le marché pour une cession, après l’annonce du retrait du géant anglo-suisse Glencore, en février 2024. Une soixantaine de salariés de KNS et une centaine de sous-traitants maintiennent en état aujourd’hui les infrastructures, de l’outil industriel à la gestion des eaux, en vue d’une reprise.
Le long processus de vente est toujours actif. En septembre, des représentants du groupe chinois Lygend Resources & Technology, communément appelé Lygend, ont visité le site de Voh. Cette enseigne œuvre dans le négoce du nickel, mais déclare aussi avoir été l’une des premières entreprises de « l’Empire du Milieu » à avoir lancé simultanément des projets de pyrométallurgie et d’hydrométallurgie en Indonésie. Quoi qu’il en soit, « il s’agit d’un process de vente d’un actif complexe sur un marché complexe », explique Karl Therby. « Toutefois, nous continuons de travailler. Des groupes sont intéressés et étudient le dossier pour potentiellement remettre des offres. Il y a toujours de l’espoir ».
Trois multinationales porteraient un regard sur l’usine du Nord. Un temps mentionnés, les Indiens de JSL, pour Jindal Stainless Limited, figurent toujours dans ce cercle, mais leur présence serait un peu plus discrète. Un point certain, la SMSP recherche, au-delà d’un partenaire financier, des compétences industrielles.
« EXPORT TEMPORAIRE » DE MINERAI
Le site de KNS a des atouts tels que la qualité du gisement du Koniambo. Et l’usine ainsi que le port sont situés à proximité. L’annulation de la dette de Glencore, chiffrée à 15 milliards de dollars US, ne constituerait pas un point bloquant actuellement dans les discussions. En revanche, le potentiel démantèlement du système pyrométallurgique – en raison des lourds soucis techniques sur les fours par le passé – ou la possible reconstruction d’un autre procédé, représentent le sujet principal pour tout repreneur.
Faut-il enlever la technologie de fusion du nickel NST pour une facture de 150 à 200 millions de dollars US ? Produire du ferronickel et de la matte ? Même exporter du minerai du Koniambo en parallèle ?… À ce stade, aucun schéma n’est arrêté. « Notre travail aujourd’hui est de se conformer à la réglementation, relative notamment aux risques environnementaux, et en même temps, de supporter nos actionnaires dans la cession des parts de Glencore et de se préparer à tous les scénarios », estime Alexandre Rousseau, président de Koniambo Nickel, pour qui « la vente de minerai ne peut pas être découplée d’un retour à l’industrie de transformation », la perspective absolue.
Sur ce point, selon Karl Therby, « un export temporaire, pour des quantités limitées, destinées aux usines du territoire et à notre usine en Corée du Sud, est une étape que nous envisageons afin de nous aider à réindustrialiser le site. Mais, là aussi, le chemin est long : discuter avec toutes les parties prenantes, remobiliser les salariés et financer cette reprise d’activité ».
Yann Mainguet
NMC : les difficultés de la côte Est
Copropriété de la Calédonienne SMSP (51 %) et l’aciériste sud-coréen Posco (49 %), la Nickel Mining Company (NMC) extrait le minerai sur le Caillou et approvisionne l’usine SNNC. « Nous avons beaucoup souffert des émeutes et de ses conséquences », observe Karl Therby, PDG de la SMSP.
Si l’activité a pu reprendre rapidement sur la côte Ouest, à Ouaco et Poya, l’affaire fut plus compliquée à l’Est : au bout de six mois à Kouaoua – commune où des discussions sur l’accès à des concessions se poursuivent – et en ce mois d’octobre, à Nakety. Ce décalage a généré « une perte conséquente en termes de revenus opérationnels », ajoute le dirigeant. Puisque chacun de ces sites représente entre 400 000 et 600 000 tonnes sur les 3 millions de capacité totale d’export annuel.
Élément défavorable en sus, les prix de vente du minerai, davantage calés sur le cours du Shanghai Metals Market (SMM) que sur celui du London Metal Exchange (LME), sont bas.
Le choix stratégique en Corée

La Corée du Sud, pays dans lequel est établie la Société du nickel de Nouvelle-Calédonie et Corée (SNNC), à Gwangyang depuis 2008, ne subventionne pas l’énergie. De fait, depuis la guerre en Ukraine, son coût reste élevé. En outre, le manque de minerai calédonien, en raison de la fermeture des deux centres de la côte Est depuis les émeutes, a été compensé par moments par un achat auprès d’autres mineurs du territoire : SMT, SMGM et MKM.
Déficitaire en 2023 et 2024 sur un marché mondial en dépression, l’usine SNNC, au capital identique à celui de sa sœur NMC, s’appuie désormais fortement, au-delà de sa production de matte, sur le rendement d’un ferronickel low-carbon ou à faible teneur en carbone, plus rémunérateur que la formule classique. Ce qui devrait limiter la perte comptable en fin d’exercice 2025.
La SNNC va produire cette année autour de 35 000 tonnes de nickel, pour une capacité nominale de 48 000 tonnes. Alors que d’autres pays, comme le Japon, ont sensiblement diminué leurs achats de minerai calédonien, « notre modèle offre un débouché stable vers la Corée et la SNNC », souligne Karl Therby, PDG de la SMSP, société qui doit ainsi tenir la cadence de livraison.

