[DOSSIER] Des entreprises qui peinent à recruter

Méconnaissance du handicap et des dispositifs existants, absence d’un service dédié… Malgré les obstacles à l’embauche, Cegelec, aidé par Handijob, a trouvé le candidat idéal, témoigne Nicolas Roger, le responsable administratif et financier.

L’embauche de Nicolas Gaveau, travailleur handicapé, chez Cegelec, répond à la volonté de l’entreprise de jouer « son rôle d’employeur social », explique Nicolas Roger, responsable administratif et financier, qui a géré son recrutement. « Il faut intégrer ces travailleurs qui sont loin de l’emploi dans nos équipes. »

Pour cela, il s’est rapproché d’Handijob, qui l’a accompagné tout au long du processus. L’association est également intervenue dans les locaux « afin de sensibiliser le personnel ». Les réticences, au début, venaient plutôt de quelques salariés. « Certains avaient peur, se demandaient quelle était la nature du handicap, les conséquences que cela allait avoir, etc. Cela est simplement dû à une méconnaissance du handicap en général. »

TROP DE CONTRAINTES ?

Le problème a été de trouver des candidats potentiels. « On veut bien les embaucher, mais il faut qu’on sache où les trouver. » Nicolas Roger plaide pour la mise en place d’un guichet unique. Le responsable évoque aussi « les dépenses sur la durée et le trop grand nombre de contraintes », ce qui ferait peur aux employeurs. « Il faudrait simplifier les choses. » Autre difficulté ? « La formation. » En clair, « il faut que l’employeur ait le poste qui corresponde, que le travailleur ait la formation qui lui permette de postuler et un guichet unique pour les trouver ». Car finalement, ce n’est pas si différent d’une embauche classique, considère Nicolas Roger. « Il existe différents handicaps et chaque poste est adaptable en fonction des besoins, il suffit parfois de quelques investissements. »

DES AVANTAGES

Si l’adaptation de Nicolas Gaveau a son nouvel environnement s’est bien passée, c’est grâce notamment à l’adéquation du poste retenu. Le choix s’est porté sur l’administratif. « On avait un poste parfait pour lui au service comptabilité fournisseur. C’est ce qui convenait. » Son supérieur direct confirme. « Je n’y fais même pas attention, ça ne se voit pas. Je me suis juste dit que je devrais prendre le temps avec lui, je suis peut-être plus attentif. » Pour Sudi Rakit, comptable, la présence de personnes en situation de handicap est naturelle. « Elles ont toute leur place dans le monde du travail, il ne faut pas les rejeter. » Cette dernière peut en effet en retirer des avantages, estime Nicolas Roger. « À partir du moment où une société fait des efforts dans ce domaine, cela donne un sens, participe à l’inclusivité et favorise le fait que les salariés se sentent bien. »

 


Handijob

L’association, qui œuvre pour l’inclusion des personnes en situation de handicap intellectuel, gère un établissement médico-social à Dumbéa-sur-Mer (où elle accompagne une centaine de bénéficiaires) et une antenne à Poindimié. Handijob fait partie des 27 associations regroupées au sein du MCI, Mouvement pour une Calédonie inclusive, créé en 2016.

 

« Je suis dans mon élément et je suis heureux »

C’est Handijob qui a fait le lien entre Cegelec et Nicolas Gaveau. L’association lui a proposé le poste au service comptabilité fournisseur et il a « dit oui tout de suite », parce qu’il correspondait à ses compétences. Et à son handicap. S’il est invisible, il exige qu’il ne reste pas trop longtemps debout ou qu’il ne soit pas soumis au stress. Avec ses collègues ? « Tout s’est bien passé. » Après une période en CDD, à 41 ans, il s’apprête à signer son premier CDI à temps partiel au mois de janvier. « Ah l’engin, quel soulagement ! Je suis dans mon élément et je suis heureux », lâche-t-il.

La galère, il l’a connue. Du travail, il en a cherché pendant quatre ans. « Et là, c’est arrivé quand je ne m’y attendais pas. » Un changement tellement important. « Cela me donne une raison de me lever le matin, du sens à ma vie. » Et de quoi assurer un revenu à Nicolas qui habite chez sa mère. « Elle est âgée, alors il faut que j’aie une situation pour être autonome le jour où elle ne sera plus là, je pourrai au moins me débrouiller. »

L’ancien agent d’accueil et opérateur de saisie à l’Isee en est convaincu : « Ce n’est pas parce qu’on est en situation de handicap qu’on va freiner l’activité de l’entreprise. On peut, comme n’importe qui, exécuter des tâches en fonction de nos compétences. »

 

A.-C.P. (© A.-C.P.)