Pour Nicolas Wahetra et Malia-Falakika Maluia, alias Sewe et Kika, l’expérience à l’usine de Vavouto dépasse aisément l’apport professionnel.
Une poignée de main sonore accompagne spontanément les premiers mots de la rencontre entre ces employés, près des bureaux. Non pas pour une salutation définitive, mais en reconnaissance d’un travail commun accompli.
Malia-Falakika Maluia, dite Kika, coordinatrice des systèmes de la formation, est entrée à Koniambo Nickel il y a 13 ans. Son collègue Nicolas Wahetra, appelé Sewe à Vavouto, est revenu pour le démarrage de l’usine du Nord en 2012 après cinq ans et demi de pratique au Canada sur les procédés de production du cuivre et du zinc.
Tous deux, titulaires d’un Deust Métallurgie de l’Université de la Nouvelle-Calédonie, emploient sans se concerter le même vocabulaire pour décrire l’expérience au sein du complexe industriel de Voh : ces salariés ont « le sentiment d’avoir grandi avec KNS », tant sur les aspects humains que professionnels. « J’ai travaillé avec des Portugais sur les fours, des Brésiliens, des Canadiens, mais aussi des Australiens, très intéressants pour la manière d’atteindre les objectifs », explique Nicolas Wahetra, conseiller HSEQR (hygiène, sécurité – sûreté, environnement, qualité et risques), originaire de Kedeigne à Lifou, qui se présente comme « un gars de tribu ». Cette vie à l’usine a « toujours été un élément important pour [sa] stabilité ».
« LÀ, C’ÉTAIT DIFFÉRENT »
À travers les partenaires industriels successifs, de Falconbridge et Xstrata à Glencore, les « cultures canadienne puis australienne » ont beaucoup apporté à Malia-Falakika Maluia, déjà dans la très bonne maîtrise de la langue anglaise. La jeune femme de Dumbéa Nord est « un produit KNS » selon ses propres termes, Koniambo Nickel ayant été son tout premier employeur. « Je me suis épanouie avec le poste de RH [ressources humaines] et de la formation. »
Les employés ont vécu plusieurs crises dont le complexe métallurgique s’est toujours relevé. Mais les dernières communications de Glencore ou de la direction de l’usine ont été perçues comme teintées d’une certaine gravité. « Nous savions, cette fois, que c’était différent », souffle Kika. Pour tous, ces licenciements constituent un choc, mais Sewe ne voit « pas un échec » à son niveau. « Il y a eu un investissement personnel important dans le projet. On a fait notre boulot. »
Reste demain. Malia-Falakika Maluia a « besoin de prendre un temps pour retrouver la famille à Nouméa et préparer une nouvelle aventure ». Le Drehu rejoindra son île natale « pour se ressourcer ». Avec à l’esprit « un plan A » : le retour à Vavouto. Car « en tant que Kanak calédonien », Nicolas Wahetra a « une part de responsabilité dans le projet. Il faut qu’il redémarre. C’est une question de fierté ».
QUELLES VOIES APRÈS ?
Les chiffres sont connus. Environ 1 000 salariés de KNS sont concernés par un licenciement économique au 31 août. Près de 200 employés assureront la transition vers la veille froide jusqu’à la fin octobre et 20 jusqu’en décembre, avant de partir à leur tour. Seuls une cinquantaine d’agents resteront en poste pour la sûreté ou encore le contrôle environnemental.
Diverses actions d’accompagnement ont été mises en place. Comme l’organisation de quatre journées avec des partenaires extérieurs – CCI, province Nord, Adie… – « pour pouvoir préparer l’après », note Jérémy Euritéin, directeur des ressources humaines de KNS, qui cite en outre la connexion avec des entreprises et l’actionnaire financeur pour évoquer d’éventuelles opportunités d’emploi. D’ailleurs, « plus d’une dizaine de personnes ont déjà signé un nouveau contrat sur des sites de Glencore dans le monde et d’autres vont suivre », observe Alexandre Rousseau, vice-président de Koniambo Nickel.
Si deux cabinets externes locaux accompagnent les salariés dans une recherche classique d’emploi ou pour une aide à la reconversion professionnelle, beaucoup de gens vont a priori monter leur propre projet, et « l’indemnité de licenciement leur permettra un petit coup de pouce », poursuit le dirigeant. Un calcul de l’indemnité jugé favorable aux salariés, même engagés depuis peu à KNS.
Yann Mainguet