Diabète : Un problème économique de poids

La Journée mondiale du diabète s’est déroulée le 14 novembre dernier. Un problème majeur dans le Pacifique où la maladie progresse de manière exponentielle au point de mettre en péril les budgets de certains États.

Les chiffres font froid dans le dos. 36 % de la population diabétique dans le monde vit dans le Pacifique et « sur les dix pays où l’on recense proportionnellement le plus d’obèses dans le monde, neuf se situent dans le Pacifique Sud », constate Paula Vivili, directeur du département santé publique du Secrétariat de la Communauté du Pacifique (CPS). Or, le surpoids est la première cause de diabète.

À Nauru, Tonga, Niue, aux Samoa ou aux îles Cook, le taux de personnes en surpoids ou obèses est compris entre 80 et 92 %. Dans le petit royaume de Tonga, le poids moyen des femmes est ainsi passé de 73,9 kilos en 1973 à 95 kilos en 2004. Quant à Kiribati, on y dénombre 25,7 % de diabétiques. Un record mondial. Cette crise sanitaire est aussi une crise économique. Selon un rapport de la Banque mondiale, aux Samoa, le coût du traitement par dialyse des personnes ayant des problèmes rénaux causés par le diabète atteint 4,3 millions de francs par patient et par an. Soit douze fois le revenu national brut du pays. Des dépenses qui ne permettent pourtant pas de prolonger la vie de la plupart des malades : 30 % décèdent dans les deux ans qui suivent le début de leur traitement.

Chez nos voisins vanuatais, le coût des tests de glucose (qui permettent aux patients atteints de diabète de connaître leur taux de sucre dans le sang) peut sembler dérisoire puisqu’un test coûte seulement 50 francs. Seulement, ceux- ci doivent être faits tous les jours. Résultat, la facture grimpe à 18 402 francs par an et par diabétique, plus que le budget annuel de la santé par Vanuatais.

Enfin, dans deux pays de la région, que Paula Vivili ne souhaite pas nommer, la situation est désormais hors de contrôle. « Dans l’un d’eux, 1,3 % de la population seulement peut être traitée par injection d’insuline avant que le budget total du pays pour l’achat de médicaments soit dépassé. Dans un autre, on ne peut tout simplement ni tester, ni soigner les personnes atteintes de cholestérol, un des facteurs de risque conduisant au diabète. »

La Calédonie et Wallis loin d’être épargnées

On estime à près de 20 000 le nombre de diabétiques en Nouvelle-Calédonie, soit entre 8,4 % et 15,3 % de personnes selon les zones géographiques et les communautés (Européens et Mélanésiens : 8,4 %, Polynésiens : 15,3 %). Près d’un tiers d’entre elles serait dans l’ignorance de leur état.

En comparaison, cette prévalence le taux n’est que de 4 % en métropole. Cette différence peut s’expliquer par l’accélération de l’occidentalisation des modes de vie, la sédentarité grandissante des populations calédoniennes et la présence d’une forte communauté polynésienne.

D’une année sur l’autre, le nombre total de diabétiques pris en charge par la Cafat augmente de près de 6 %. Cette progression augure une explosion du nombre de diabétiques sur les 20 années à venir. 62 % des diabétiques pris en charge par la Cafat sont atteints d’au moins une complication. Les maladies cardiovasculaires sont ainsi responsables pour environ 40 % de l’ensemble des décès, la rétinopathie est la principale cause de cécité chez les adultes et la néphropathie la principale cause de dialyse. Les dépenses annuelles du Ruamm pour le diabète sont de 5,5 milliards pour les 12 000 diabétiques diagnostiqués et suivis, soit 15 % des dépenses annuelles du régime d’assurance maladie, et ce, hors évacuations sanitaires et hospitalisations.

À Wallis-et-Futuna, la situation est encore plus dramatique. Un rapport de la Cour des comptes de juin 2014 sur « La santé dans les outre-mer » a révélé qu’entre 1980 et 2010, le diabète et l’obésité avaient doublé et la prévalence de l’hypertension triplé. 60 % des habitants de l’archipel sont obèses. Au point que l’espérance de vie y recule. Un cas unique en France.

Ch.M.