Coup de chaud du photovoltaïque

Le gouvernement vient d’autoriser dix projets de centrales photovoltaïques. Elles permettront de faire un saut au niveau de la production d’énergie renouvelable et d’atteindre quasiment les objectifs fixés par le schéma pour la transition énergétique à l’horizon 2025. Une bonne nouvelle qui devra conduire à une réflexion sur les nouveaux objectifs à venir.

A près des années d’atermoiements, les élus ont fini par voter le schéma pour la transition énergétique, STENC. Un vote qui a permis de redonner de la visibilité aux producteurs d’énergie renouvelable qui était à l’agonie. Mais le STENC n’est pas suffisant. S’il fixe les grands objectifs, c’est la programmation pluriannuelle des investissements qui encadre la construction des projets dans les différentes filières : photovoltaïque, éolien et hydraulique.
Et s’il y a bien une filière qui tire son épingle du jeu, c’est celle du photovoltaïque dont les coûts sont en véritable chute libre. « Il y a encore deux ou trois ans, le prix du kilowattheure pour équilibrer ces projets était de l’ordre de 18 à 19 francs », explique Philippe Dunoyer, le porte-parole du gouvernement également en charge de l’énergie. Aujourd’hui, ils sont compris entre 13,5 et 15,5 francs. C’est dans cette fourchette de prix du kilowattheure que s’inscrivent les dix projets validés par le gouvernement, mardi 4 avril. Dix projets sur les quinze présentés qui illustrent la chute des prix du matériel et l’engouement pour ce type de production d’énergie renouvelable. Signe que le coût baisse, sur les dix projets retenus, seuls trois ont fait appel à la défiscalisation. Les autres n’en ont pas besoin pour être rentables.

Le photovoltaïque a le vent en poupe

Si le schéma de transition énergétique prévoit un mix avec les autres filières, le photovoltaïque prend clairement le large, pour des questions de coût, plus abordable que l’éolien et nettement en dessous de l’hydraulique, mais également plus simple à mettre en œuvre. L’hydraulique, outre de coûteux travaux, a un impact nettement plus important. On parle également d’impact environnemental pour l’éolien, mais beaucoup plus, sûrement, du refus des populations vivant à proximité des projets, notamment en raison du bruit et de l’aspect visuel.

Le photovoltaïque recueille donc tous les suffrages. Nos voisins australiens vont prochainement réaliser le plus grand parc solaire au monde avec 3,4 millions de panneaux solaires et plus d’un million de batteries. Si les projets calédoniens sont un peu plus modestes, ils présentent toutefois quelques innovations. Sur les 10 portés, six sont des centrales classiques sans stockage de l’électricité. Les quatre autres sont plutôt innovantes. Deux prévoient un stockage de l’électricité, ce qui ne se fait pas encore sur le territoire et représente l’avenir pour une meilleure maîtrise du système électrique. Les deux dernières sont des centrales un peu particulières que nous vous avions présentées dans une édition précédente.

Ces projets, qui doivent se concrétiser d’ici la fin de l’année et sont tous situés sur la Grande Terre, vont multiplier par quatre la puissance photovoltaïque installée, la faisant passer de 22 Mwatts crête à près de 80 Mwatts. Cette puissance fera passer l’autonomie énergétique de la Grande Terre de 21 à 31 % dès la fin 2017. Ces projets s’inscrivent dans le cadre de la programmation pluriannuelle des investissements. Seul souci, ils sont nettement en avance par rapport aux prévisions initiales. Le séquençage prévoyait trois phases de cinq années, de 2015 jusqu’en 2025. En matière de photovoltaïque, les objectifs à 2020 étaient fixés à 62 Mwatts. Uniquement avec les deux projets comprenant du stockage, l’objectif est atteint.

Et le gouvernement a décidé de ne pas s’arrêter en si bon chemin puisqu’un nouvel appel à projet sera ouvert, de mai à août. Mais cette accélération aura des conséquences à prévoir. Elle va être accompagnée d’une étude sur les adaptations nécessaires du réseau lancée très prochainement par le gouvernement et les gestionnaires de réseaux, Enercal en particulier. Pour faire simple, les énergies produites par des énergies fossiles sont différentes de celles dont l’origine est renouvelable. Les deux sont compatibles mais doivent être mélangées de façon à assurer la stabilité du réseau. La généralisation du stockage devrait permettre de simplifier le problème en permettant une injection d’électricité plus maîtrisée.

Des avantages environnementaux et économiques

La réflexion technique aura peut-être aussi des conséquences sur les zones d’implantation des projets. Les dix autorisés sont tous situés sur la côte Ouest (Koumac, Voh, Païta, la Foa, Farino, Moindou et Boulouparis). L’essentiel des besoins étant dans le Grand Nouméa, les porteurs de projet pourraient être incités à s’implanter à proximité de ce bassin de population de façon à limiter les pertes liées au transport. Si la côte Ouest accueille davantage de projets photovoltaïques, c’est également en raison de la topographie, plus adaptée. La côte Est sera destinée davantage à des projets hydrauliques. Si l’éolien prend plus de temps pour trouver ses marques, quelques projets sont également dans les cartons. C’est notamment le cas d’un promoteur d’une centrale photovoltaïque autorisée au mois de mars sur Lifou.

En matière environnementale, les centrales permettront d’éviter l’émission de près de 60 000 tonnes de dioxyde de carbone par an. Mais les effets positifs ne seront pas seulement environnementaux. Ces dix centrales représentent un investissement global de 13,3 milliards de francs et la création de 30 à 60 emplois, sans compter les emplois, nécessaires par la suite pour la maintenance, et la montée en qualification du personnel. Ces projets sont également synonymes d’une réduction de la consommation de carburant. Chaque année, l’économie est estimée à environ un milliard de francs auquel il faut rajouter une économie de 100 millions de francs sur le coût du système électrique. Pour rester sur cette dynamique, la PPI devra maintenant être revue et fixer de nouveaux objectifs plus ambitieux.


Une agriculture qui produit de l’énergie

Le projet de serre photovoltaïque a été imaginé en 2007 par la société Akuo, en partenariat avec Jean-Christophe Niautou, un producteur agricole investi dans le collectif Repair pour la promotion d’une agriculture responsable, et une filiale d’Enercal. Le concept fonctionne déjà à La Réunion où des serres du même type permettent de produire des fleurs. Les serres anticycloniques porteront des panneaux solaires qui auront une capacité de production de 1,7 Mwatt. D’autres idées innovantes de ce type sont également dans les cartons de la société Akuo. Elle a notamment développé un projet similaire mêlant aquaculture et production l’électricité photovoltaïque.