Congrès : les indépendantistes libres pour deux ans ?

Roch Wamytan a été élu mardi 30 août pour un quatrième mandat successif à la présidence du Congrès. Les indépendantistes gardent une majorité absolue grâce au soutien de l’Éveil océanien. Les non-indépendantistes, cette fois unis derrière la candidature de Gil Brial, s’installent chacun à leur manière dans l’opposition.

Pas de surprise mardi dans l’hémicycle du boulevard Vauban. Les deux candidats ont fait le plein de voix. Roch Wamytan (UC) a bénéficié d’une majorité absolue dès le premier tour grâce aux 29 voix de l’UC-FLNKS et Nationalistes et l’Éveil océanien ‒ groupe tout juste reformé ‒ l’UNI et deux voix sans étiquette.

Gil Brial (Les Loyalistes) a recueilli les 25 bulletins non indépendantistes (Loyalistes, Avenir en confiance et Calédonie ensemble). « Roch Wamytan est élu président », a clamé l’intéressé en tant que doyen de cette séance avant de s’inviter lui-même à prendre place et prononcer son discours.

Responsabilité

Le président est revenu sur la mandature marquée par une crise sanitaire « violente », les importantes conséquences économiques, la « grande frustration » de la troisième consultation, l’intense calendrier électoral « accentuant les clivages ».

Mais il a relevé des signes d’espoir : « La capacité de résilience des Calédoniens, l’innovation, la solidarité ». Face aux « enjeux immenses », Roch Wamytan a appelé les élus à sortir des postures politiques au nom de l’intérêt général, à s’engager pour réduire les inégalités, relancer l’économie, redonner pouvoir d’achat et confiance.

C’est le sens, a-t-il dit, des réformes structurelles et de l’effort de stabilisation des institutions engagés par la majorité. Simplement a-t-il dénoncé le processus de « stigmatisation à outrance » des minorités politiques.

« Sale boulot »

L’accord de stabilité institutionnelle 2022- 2024, signé à l’occasion de cette élection entre l’Éveil océanien de Milakulo Tukumuli et les deux groupes indépendantistes, a fait grand bruit. Il repose sur une série de réformes, de propositions pour « l’océanisation de la politique institutionnelle », mais aussi sur une répartition des présidences, des collaborateurs et des frais de représentation supplémentaires.

L’Éveil océanien a expliqué avoir fait le choix de la stabilité, de coéquipiers « solides », partageant des valeurs de respect et de considération de « partenaires à partenaires» pour mettre en œuvre les réformes qui s’imposent et qui sont notamment demandées par l’État. Renvoyant les non-indépendantistes à leur mauvais esprit collaboratif à la province Sud, leur instabilité chronique, le manque de courage politique du 16e gouvernement.

Le parti n’a pas apprécié leurs commentaires acérés sur les « marchandages ». Il juge que c’est : « l’hôpital qui se fout de la charité » avec le cumul des mandats de la secrétaire d’État, « dont le collaborateur est aussi un élu » ou encore les « soupçons d’affaires » de « prises illégales d’intérêt, achat de voix, emplois fictifs » dans ce camp. Mais s’ils gesticulent, la situation est plutôt une « aubaine » pour eux, jugent-ils. « Ils laissent à la majorité que nous formons, faire ce qu’ils considèrent comme le sale boulot » pour pouvoir un jour en « récolter les fruits ».

Opposition

Lors d’une conférence de presse, Christopher Gyges a expliqué qu’ils avaient fait des propositions d’un autre ordre, de programme. Nicolas Metzdorf a jugé que l’Éveil océanien se stabilisait dans le camp indépendantiste. Gil Brial a évoqué un « déni de démocratie », problème de représentativité qu’il « faudra changer » avec la fin de l’Accord. Mais au moins ont-ils pu se réjouir de l’unité affichée lors de cette échéance, très prometteuse pour la suite : la venue de Jean-François Carenco ou le prochain Comité des signataires.

Sur les grandes questions : « Il y a un seul chemin possible », a dit Gil Brial, et pas de place pour des questions d’héritage politique ou autres considérations. Reste à savoir comment influer dans nos institutions. Philippe Michel s’est inquiété de « l’absence d’espaces de discussion » avec ces « majorités d’appareils ». Selon Gil Brial, Les Loyalistes, dont les propositions ne sont pas prises en compte, devront quelque part se retrancher là où ils peuvent influer, c’est-à-dire en province Sud.

L’Avenir en confiance, dont l’absence a été remarquée à cette conférence de presse, a plutôt insisté sur les « spécificités » de chacun qui peuvent s’exprimer sur les votes. Il a par ailleurs pris acte de la décision de l’Éveil océanien sans pour autant les tacler. « Il va falloir travailler avec ces alliances » a glissé Alcide Ponga, prônant une opposition constructive.

Chloé Maingourd

Photo : Roch Wamytan a eu des paroles moins dures qu’à l’accoutumée insistant sur la nécessité de « sauvegarder la cohésion et la paix ». / C.M.