Comment mieux se préparer aux crues et aux inondations

Les crues et les inondations sont fréquentes, particulièrement lors de la saison cyclonique de novembre à avril. / © Archives Ville du Mont-Dore

Gouvernement, Sécurité civile et service météorologique travaillent ensemble sur un système de vigilance des crues dans le cadre du projet PROTEGE, financé par l’Union européenne et mis en œuvre par la Communauté du Pacifique (CPS).

  • DE QUOI PARLE-T-ON ?

Un nouvel outil est dans les cartons des experts et des secouristes. Il permettrait de prévenir plus facilement les crues et les inondations qui ont ponctué les trois dernières années marquées par La Niña.

Ce système de vigilance inédit a été testé localement par un bureau d’étude de Nîmes, dans le cadre du projet PROTEGE. « C’est un outil informatique d’aide à la décision, explique Stéphane Delichère, chef de projet chez BRL ingénierie. On vise à être capable de dire, avec un délai d’anticipation, que tel ou tel endroit va déborder. »

  • COMMENT ÇA MARCHE ?

« Il faut imaginer une carte avec les secteurs qui se colorent en fonction du niveau de risque, précise Stéphane Delichère. Cet outil repose sur un réseau de mesures météorologiques et hydrologiques. » Les crues et les inondations seraient prédites grâce aux observations pluviométriques.

La Direction des affaires vétérinaires, alimentaires et rurales (Davar) et Météo-France Nouvelle- Calédonie partageraient leurs données avec la Direction de la sécurité civile et de la gestion des risques (DSCGR). « L’étude a montré qu’on était capable de prévoir l’élévation du niveau des cours d’eau à deux ou trois heures d’échéance, simplement à partir des pluies que l’on observe », précise le météorologue Alexandre Peltier. Plus tard, des prévisions à 12 ou 24 heures seraient possibles.

  • POURQUOI C’EST UTILE ?

Parce que la Nouvelle-Calédonie est loin d’être épargnée par les inondations. Les zones à risque sont connues depuis de nombreuses années. Elles ont été référencées, des panneaux et des échelles de crue les indiquent. « Quand il pleut, on sait les routes qui vont être bloquées. La Coulée, La Foa ou Bourail sont toujours impactées par les inondations », reconnaît le capitaine Alexandre Rossignol, officier de communi- cation de la Sécurité civile.

L’outil offre une longueur d’avance aux secouristes en donnant un aperçu des conséquences des fortes pluies sur ces zones vulnérables ou inondables. « Cela va permettre d’avoir des indicateurs supplémentaires sur les hauteurs d’eau. De savoir si on peut traverser un cours d’eau. »

Ces éléments « plus précis » aideront les prises de décision, appuie Stéphane Delichère. « En un clin d’œil, la Sécurité civile peut repérer un danger potentiel et se préparer à intervenir. » Pour les secours, l’objectif est d’être plus efficace et plus rapide.

La prévisibilité des crues sera un enjeu majeur dans les années à venir. Selon plusieurs études scientifiques, le réchauffement climatique accentuera l’intensité des précipitations. C’est déjà une réalité, prévient Benjamin Roger, coordinateur régional eau du projet PROTEGE, « les phénomènes pluies sont en train de s’amplifier dans la région ».

  • EST-CE DÉJÀ DISPONIBLE AILLEURS ?

La France hexagonale s’est dotée en 2006 d’alertes de crues, avec le service d’information public Vigicrues. La Réunion a aussi quelques années d’avance avec son propre système. À l’inverse, l’Australie et la Nouvelle-Zélande n’utilisent pas encore ce genre d’outils. « La Nouvelle-Calédonie est loin d’être en retard, élargit Stéphane Delichère. Ce prototype est un outil performant et innovant que pas mal de pays du Pacifique n’ont pas. »

  • QUAND SERA-T-IL MIS EN PLACE ?

Aucune date n’a été arrêtée. Il n’est pour l’instant question que d’un prototype testé sur 14 bassins versants, principalement sur la côte Ouest. « Avant de pouvoir mettre en place ces outils, il nous faut des données pour les alimenter », précise Stéphane Delichère.

Ces observations existent. La Davar veille sur les cours d’eau. Météo-France Nouvelle- Calédonie surveille les intempéries. Pour imaginer une application à l’échelle de la Grande Terre, de nouvelles stations doivent être aménagées. Trois nouveaux radars météo sont par exemple en projet à Poya, Nouméa et Lifou, à partir de 2024. Des équipements de télécommunication plus performants devront aussi être déployés. « Il faudrait un système sur la plupart des sites ciblés pour transmettre l’information au fil de l’eau », schématise l’expert de BRL ingénierie.

L’outil, insiste Benjamin Roger, n’en est pas moins « opérationnel ». Des discussions doivent s’engager avec le gouvernement calédonien qui décidera de son application.

Brice Bacquet