[DOSSIER] Clotilde Dechanet : « Depuis quelques années, la maladie est mieux diagnostiquée »

Les règles très douloureuses et les difficultés à concevoir un enfant sont les signes d’alerte qui doivent inciter les patientes à consulter un gynécologue.

DNC : Qu’est-ce que l’endométriose ?

Clotilde Dechanet : L’endométriose est une maladie qui touche la femme plutôt en âge de procréer. Les règles qui sont censées s’écouler vont aussi passer dans les trompes et dans le ventre.

Le tissu endométrial va rester collé aux trompes, aux ovaires, derrière l’utérus, devant, entre l’utérus et la vessie, entre l’utérus et le rectum. Ça va donner ce qu’on appelle des lésions d’endométriose.

On en parle de plus en plus. Avant, on disait qu’avoir des règles douloureuses c’était normal et en fait non. »

Quels sont les symptômes ?

Ce sont des douleurs surtout pendant les règles, quand les femmes vont à la selle, quand elles urinent et pendant les rapports sexuels. L’autre symptôme, c’est la difficulté à avoir un enfant.

Que faut-il faire face à une suspicion de la maladie ?

Quand on a mal au ventre ou quand on a du mal à avoir un enfant, c’est là qu’on va le suspecter. Il faut donc consulter un gynécologue. Depuis quelques années, c’est mieux diagnostiqué.

Les patientes disent clairement : « Je crois que j’ai de l’endométriose ». Parce qu’elles en ont entendu parler. Avant, la moyenne de diagnostic était entre 7 et 10 ans.

Comment est-elle diagnostiquée ?

S’il y a des gros kystes ou des gros nodules, on va le voir à l’échographie ou à l’IRM. La chirurgie permet d’aller voir dans le ventre, on regarde, on fait des prélèvements qu’on analyse et on traite en enlevant les lésions.

Les lésions d’endométriose.

Des traitements existent-ils ?

Il y a des traitements qui existent, mais ça dépend si les patientes veulent un enfant ou pas. Pour les douleurs, il y a des traitements hormonaux ou la chirurgie. Les hormones vont couper l’ovulation donc elles ne pourront pas avoir d’enfant.

Et si elles en veulent un, elles devront avoir recours à la fécondation in vitro (FIV). Sachant que la grossesse améliore les symptômes. Quand on est enceinte, on a un statut hormonal qui fait que l’endométriose est endormie.

Est-ce qu’on recense différents stades ?

Oui, il y a minime, modéré et sévère. On a des classifications et on stadifie de 1 à 4 en fonction de la sévérité des lésions.

Cette maladie est-elle de plus en plus connue ?

On en parle de plus en plus. Avant, on disait qu’avoir des règles douloureuses c’était normal et en fait non. Mais ce n’est pas parce qu’on a mal au ventre pendant les règles qu’on a de l’endométriose. Tout le monde n’en a pas.

Combien de Calédoniennes serait concernées ?

Quand on fait des chirurgies chez des patientes pour une autre raison, on en trouve chez 10 à 30 % des patientes.

Un des symptômes est l’infertilité. Comment l’explique-t-on ?

Quand on analyse le liquide dans le ventre, on se rend compte qu’il y a des molécules qui font qu’il y a une toxicité de l’environnement. Les ovocytes sont de moins bonne qualité, les spermatozoïdes sont donc de moins bonne qualité mais ça n’empêche pas qu’un jour ils peuvent quand même se rencontrer.

C’est comme quand on fume. On a moins de chance mais ça peut marcher. Il y a quand même des femmes chez qui on découvre l’endométriose qui ont déjà eu des enfants et il y a aussi des femmes qui auront des enfants naturellement.

Même si les ovocytes et les spermatozoïdes sont de moins bonne qualité, ils peuvent quand même se rencontrer. »

Quels sont les recours pour les femmes qui ne peuvent pas avoir d’enfant ?

Avant on les opérait mais maintenant on ne fait quasiment plus que des FIV. Une personne qui a de l’endométriose et qui n’a pas de compagnon peut aussi déjà congeler ses ovocytes, vu qu’elle aura peut-être besoin de faire une FIV plus tard. On a de plus en plus de femmes qui le font

Propos recueillis par Edwige Blanchon

Photo : Clotilde Dechanet, coordinatrice du centre d’assistance médicale à la procréation. / E.B.

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