[DOSSIER] Christophe Dabin : « Du sport, partout où c’est possible »

Le sport doit être un levier pour reconstruire socialement la Nouvelle-Calédonie, insiste Christophe Dabin. Photo: Gilles Caprais

La reprise des activités sportives est essentielle au retour de la cohésion sociale, estime le président du CTOS, Christophe Dabin. Dans la perspective de reconstruction du pays, il invite les pouvoirs publics à ne pas procéder à des coupes budgétaires sans mesurer les conséquences sociales de long terme.

DNC : Comment avez-vous vécu les semaines post-13 mai ?

Christophe Dabin : Dès le 14 mai, toutes les activités sportives ont été arrêtées sur l’ensemble du territoire. Tout le monde avait évidemment d’autres préoccupations. Pour notre part, on a dû gérer nos athlètes hors territoire, et on a réussi à rapatrier la plupart d’entre eux. On est parvenu à faire partir ceux qui étaient attendus pour des échéance internationales, comme les nageurs Chrissander Cerda et Blanche Freulon. Au bout de trois semaines, l’activité a repris dans certains endroits, pour l’entraînement, pour occuper les jeunes. Maintenant, on s’attache à ce que les athlètes qui préparent des échéances importantes puissent continuer à utiliser les installations.

Dans les cas les plus dramatiques, comme ceux de l’escalade et du bowling, que peut faire le CTOS ?

Notre marge de manœuvre est très réduite. Les responsables des disciplines n’ont pas les cartes en main. L’une des seules solutions, dans l’immédiat, est de faire appel à l’Agence nationale du sport [ANS, NDLR]. On les a interpellés sur deux points. Vis-à-vis de leurs dépenses d’équipement ordinaires, on leur a demandé d’apporter un regard particulier sur ces installations. Deuxièmement, on essaie de voir si l’ANS peut mettre en place une aide de solidarité, comme elle l’avait fait lors du Covid. Tout en sachant que si le mur d’escalade est une installation communale, le bowling est une installation commerciale, ce qui complique un peu les choses.

Quelle est votre position vis-à-vis de la reprise ?

Le fait de faire revenir nos enfants à l’école est une très bonne chose, ça permet de retrouver une normalité. De la même manière, il faut que les activités sportives reprennent partout où c’est possible. Même sans compétition, il faut que les clubs puissent de nouveau accueillir les enfants. On ne peut pas rester à se morfondre, il faut envisager demain. Il faut que l’activité reprenne.

Anticipez-vous des réductions de subventions ?

Tout le monde devra faire des efforts. En ce qui concerne les projets des ligues, et notamment les déplacements, il est clair que certains ne seront pas réalisés, ce qui rendra les subventions inutiles. Il y a un gros travail à faire, discipline par discipline, pour voir ce qui doit être maintenu ou annulé. Mais attention aux impacts… Il ne faut pas tout supprimer. Le sport est un vecteur de cohésion sociale, comme les activités artistiques, culturelles et d’éducation populaire, donc il ne faut pas l’abandonner. Quand on part aux Jeux du Pacifique, on est 350, on est une équipe de Nouvelle-Calédonie unie, solidaire, fraternelle.
Si l’on doit revoir notre modèle sociétal, il faut penser au sport. S’il est mis de côté, si on n’est pas aidé financièrement, ce sera encore plus difficile d’arriver à reconstruire le pays. De plus, la situation de l’emploi est déjà compliquée dans de nombreux secteurs : si on perd les salariés du mouvement sportif, ça va devenir ingérable.

Le sport est un vecteur de cohésion sociale (…) il ne faut pas l’abandonner.

La préparation des prochaines grandes compétitions sera-t-elle difficile ?

Celle des Mini-Jeux de Palaos 2025 va être extrêmement délicate. Pour les Jeux de Tahiti 2027, on a un peu plus de temps pour s’adapter. Base arrière des équipes de France pour les Jeux de Brisbane 2032, éventuelle candidature pour accueillir les Jeux du Pacifique de 2035…

Ces projets sont-ils menacés ?

Pas question de les abandonner. Ces projets peuvent aider à la reconstruction, au vivre ensemble, aux objectifs communs. Dans le cadre professionnel, j’ai eu la chance de rencontrer la mission de médiation et de travail [installée par le président de la République, NDLR]. Le politique, on ne s’en mêle pas. Mais sur la partie reconstruction, je leur ai dit que la société civile doit à tout prix être impliquée, car je pense que c’est par ce biais qu’on trouvera des solutions pour cette jeunesse qui est en difficulté aujourd’hui.

Propos recueillis par Gilles Caprais