Christophe Dabin : « En 2021, le sport risque de ne plus avoir de financement »

Avec son équipe, il est à la tête du CTOS, Comité territorial olympique et sportif, depuis maintenant un an. Mais pour Christophe Dabin, le plus dur semble encore à venir entre restrictions budgétaires, absence de gouvernement et crise sanitaire.

DNC : Quel regard portez-vous sur cette première année de mandature ?

Christophe Dabin : Je pense qu’on a voulu être au plus proche des ligues et comités, c’était une de nos promesses. On a beaucoup communiqué, parce que c’est un point qu’on nous avait reproché durant l’ancienne mandature. On a mis en place des temps de parole ou de formation. Et je pense qu’on joue à fond notre rôle en tant que CTOS. Le début de mandature a aussi été intense, puisqu’en mai dernier, le premier travail de la nouvelle équipe a été de préparer la reprise, après plusieurs semaines de confinement, puis de restrictions, entre mars et juin. Il a fallu qu’on fasse le nécessaire pour que nos élus comprennent que nous avons des bénévoles qui sont des gens responsables et qu’avec des activités bien cadrées, il n’y avait pas de risque particulier de propagation.

Le déconfinement a donc été mieux géré cette année ?

Oui. Grâce à tout ce travail fait l’an dernier par nos équipes et par les ligues, le déconfinement cette année s’est beaucoup mieux passé parce que les choses ont été anticipées.

La Nouvelle-Calédonie est aujourd’hui dans une période politique compliquée avec la démission du gouvernement. De quelle manière le sport est-il impacté ?

On est dans l’attente. Aujourd’hui, nous n’avons plus d’interlocuteur au gouvernement. Nous avons, malgré tout, pu être reçus par le cabinet de Christopher Gyges (porte-parole du 16e gouvernement démissionnaire, NDLR) qui a géré la crise sanitaire, lors du confinement. Mais Jean-Pierre Djaïwé (en charge des sports, NDLR) est lui aussi démissionnaire. C’est dommage parce qu’on avait beaucoup travaillé avec lui et la Direction de la jeunesse et des sports. Notamment sur le financement du sport. Mais entre le référendum, les problèmes sociaux et la crise sanitaire, on savait bien que nous n’étions pas la priorité du gouvernement. On espérait relancer les discussions dès le début de cette année. Mais avec la chute du gouvernement, on est dans un statu quo total.

La Cour des comptes a pris en main le budget de la Nouvelle-Calédonie. Est-ce qu’il y aura des conséquences sur le sport ?

Comme le budget 2021 n’a pas été voté, aucune ligue n’a reçu de financement. En général, les associations reçoivent 60 % en début d’année, le reste plus tard. Cette année, ce n’est pas le cas. Cela durera tant que le budget n’est pas voté. Et dans le cas où c’est la Cour des comptes qui fera le budget, le monde associatif, au-delà même du sport d’ailleurs, risque de ne pas être considéré comme prioritaire. Donc on est parti d’un début de mandat en 2020 où il fallait travailler pour le financement nouveau du sport, à une année 2021 où il n’y aura peut-être même pas de financement du tout. Et nous, nous ne pouvons rien faire, c’est entre les mains des politiques.

Quel message voulez-vous passer aux politiques ?
On sait que le financement ne peut plus être le même et on a fait des propositions en ce sens. Maintenant, on aimerait pouvoir renouer le dialogue. Et pour cela, il faut un gouvernement, avec un membre en charge des sports désigné et impliqué. Mais au-delà, il faut aussi que les élus nous disent ce qu’ils veulent pour le sport et son rôle dans la société calédonienne qui est en train de se construire. On s’interroge vraiment sur la volonté politique de donner une vraie place au sport.

Sur un plan plus sportif, comment ce contexte joue-t-il sur la préparation des prochains Jeux du Pacifique en 2023 ?
En 2019, on avait demandé un financement sur trois ans. En 2020, cela n’avait pas été possible. Puis, avec Jean-Pierre Djaïwé, on avait acté une première enveloppe en 2021 pour cette préparation. Mais c’était avant la chute du gouvernement et le blocage budgétaire. Aujourd’hui, nous n’avons rien et cela va mettre tout le monde en difficulté.

Votre mandat avait commencé par un litige sur le scrutin et une plainte déposée par l’équipe de Paul Poaniewa. Où en est ce dossier ?
C’est vrai que nous avons dû aller devant le tribunal. En septembre, le tribunal de première instance nous avait donné raison : il n’y avait pas d’irrégularité dans notre élection. Nos adversaires avaient alors décidé de faire appel, donc il y aura un nouveau procès. Nous devons déposer nos conclusions cette semaine.

Est-ce que vous le vivez comme une épée de Damoclès ?
Non, parce que depuis le début, nous avons continué à travailler. Nous avons des salariés, une équipe et un programme donc on se doit d’aller de l’avant. S’il y a une situation qui doit changer, on verra à ce moment. Ce qui est gênant, c’est le temps qu’on a pu perdre et qui aurait pu servir à mener d’autres dossiers.

Est-ce que vous avez peur de perdre ce procès ?
(Sans réfléchir) Non.


Le financement du sport en question

C’était le dossier majeur de la mandature actuelle. Mais sans gouvernement et avec une Direction de la jeunesse et des sports qui n’a pas encore remplacé son responsable, parti à la retraite, la recherche d’un nouveau modèle de financement du sport est renvoyée aux calendes grecques. Parmi les pistes proposées par le CTOS, la création d’un fonds abondé par des taxes (sur les produits sucrés notamment), par la mise en place d’une loterie (sur le modèle métropolitain et le financement par la FDJ, Française des jeux) ou encore par la promotion du mécénat. L’objectif étant de ne pas subir les fluctuations d’un budget voté par le territoire, qui est passé de 65 millions en 2015 à 25 millions cette année, selon les projections du CTOS.