Cafat, une situation inextricable

Les séances du Congrès offrent parfois un spectacle assez étrange. C’était tout particulièrement le cas lors de la séance du 16 octobre (qui peut être revue sur la chaîne YouTube du Congrès de la Nouvelle- Calédonie). Les réactions des élus interrogent sérieusement sur la prise de conscience de la gravité de la situation. Lors de cette séance, Dominique Cheveau est venu présenter l’état de santé du CHT. Les chiffres sont éloquents. Depuis deux mois, la Cafat n’a plus versé un franc au CHT. À noter que le financement du budget annuel du CHT (environ 30 milliards de francs) est assuré à 80 % par la dotation globale de fonctionnement, normalement prise en charge à 64 % par la Cafat. C’est donc un peu plus de 50% de son budget que le CHT ne perçoit pas.

La Cafat a par ailleurs suspendu le règlement de 20 % du « payé à l’acte », selon Dominique Cheveau, ce qui représente un manque compris entre 3 et 3,5 milliards de francs par an. La visibilité à court terme est quasi-nulle puisque la Cafat n’est pas en mesure d’apporter des éléments au CHT. On peut aussi relever que la Cafat a cessé de payer de manière normale et régulière la dotation globale de fonctionnement depuis octobre 2018. Depuis cette date, les paiements sont erratiques. La dette de la Cafat au CHT s’élève aujourd’hui à près de 18 milliards de francs. Pour réduire la pression sur la trésorerie, le CHT a pris la décision de préserver les salaires, mais de suspendre certaines dépenses non liées aux soins. Le CHT ne fera ainsi aucun investissement, ce qui pose des questions quant au maintien en bon état du Médipôle. Les fournisseurs sont également fortement impactés puisque la dette du CHT, qui est de l’ordre de deux milliards de francs, ne cesse de s’alourdir.

Face à ce tableau dramatique, le gouvernement, en l’absence du président, en charge du dossier, n’a pas été en mesure de donner des pistes aux élus du Congrès. On a toutefois également appris qu’une réunion d’urgence sur la question avait été demandée sans qu’il n’y ait encore eu de suite. Calédonie ensemble a par ailleurs soulevé la question de savoir si les difficultés de trésorerie de la Cafat étaient partagées par l’ensemble des prestataires et pas seulement le public. S’il n’a pas pu avoir de réponses en l’absence de représentants du conseil d’administration de la Cafat, l’élu a toutefois indiqué qu’il lui semblait que c’était le cas.

En dehors des manquements du conseil d’administration de la Cafat, composé par les représentants des partenaires sociaux, le gouvernement et le Congrès ont également leur part de responsabilité dans la situation. Le déficit du Ruamm est lié en partie à des exonérations de charges sociales décidées par les élus, mais non compensées, du moins pas totalement, dans le budget de la Cafat. Et c’est sans compter les réformes du système de protection sociale qui peinent à être mise en œuvre après que l’ensemble des diagnostics aient été posés. On peut le comprendre, car la réforme risque bien de faire quelques remous dans le landerneau politique. En d’autres termes, il va falloir prendre des décisions courageuses, car impopulaires. C’est un secret de polichinelle, il faudra trouver de nouvelles ressources, ce qui ne sera pas une mince affaire dans le contexte économique et social actuel. Il faudra aussi probablement améliorer le contrôle des dépenses qui ne répondent aujourd’hui à aucun objectif.

M.D.