Avenir institutionnel : le Sénat aura son mot à dire

Les sénateurs de la commission des lois, dépêchés par le président Gérard Larcher, sont sortis « profondément enrichis » de leur mission sur le territoire. L’institution, qui entend prendre toute sa place dans les discussions d’avenir, fera des propositions. Et il lui reviendra aussi de se prononcer sur la stratégie du gouvernement.

Le Sénat pourrait-il devenir un garde- fou en ces temps politiques incertains en Métropole comme en Nouvelle- Calédonie ? Plutôt un « tiers de confiance », avance François-Noël Buffet (LR), le président de la commission des lois, au terme de cette visite menée avec Philippe Bas (LR) et Jean-Pierre Sueur (PS). Les sénateurs produiront un rapport vers le mois de septembre qui devra être validé par tous les membres de la commission, avec plus qu’un constat, des « lignes d’avancée ».

Retenue 

Pour l’heure, les mots sont pesés. D’abord parce qu’ils engageraient l’institution dans un climat général de tension. Les propos du sénateur Buffet sur l’absence de fondement juridique du référendum de projet proposé par Sébastien Lecornu, extraits d’une audition juridique, avaient fait bondir la représentation locale de la majorité présidentielle avant même son arrivée. Pourtant, il ne s’agissait pas d’un point de vue, mais d’un simple fait de droit a précisé l’intéressé.

Ensuite et surtout parce que le « travail ne fait que commencer ». Après les rencontres avec des spécialistes en Métropole, les sénateurs ont procédé ici à 36 auditions, de représentants politiques, de la société civile, agrémentés de séquences historiques, culturelles. Il y avait, ont-ils dit, une « volonté d’être physiquement présent, d’avoir l’image la plus fidèle possible de la Nouvelle-Calédonie », comprenons en cet instant post-référendums.

« Rien n’est jamais terminé »

Sur le fond, ils retiennent de ces échanges que « l’avenir reste à écrire ». Si certains estiment qu’avec « trois référendums, c’est terminé » ou visent un objectif de « souveraineté, indépendance, terminé », « rien n’est réglé », selon les mots de Jean-Pierre Sueur qui préfère visiblement s’appuyer sur les paroles « moins abruptes ».

D’ailleurs, ils ont trouvé ici « plus de points communs qu’on ne l’imagine ». Ils observent, au passage, une grande lassitude au sein de la population sur ces questions et une jeunesse qui s’inscrit de moins en moins dans ces clivages.

Pour l’avenir, avance Jean-Pierre Sueur, le moyen d’avancer est certainement de dire qu’« il y a une part d’autonomie nécessaire » et « un partenariat avec la France nécessaire ». « On n’imagine pas qu’il y ait une coupure irrémédiable », commente Philippe Bas. Autre conviction : « Il n’y a pas de solution unilatérale qui soit durable ».

Dans cette nouvelle étape, la forme sera particulièrement importante. Le dialogue est à renouer entre tous les interlocuteurs. Par ailleurs, « l’appui de l’État sera essentiel et cet appui ne sera efficace que s’il est impartial ». Les indépendantistes ont visiblement fait passer le message.

Le Sénat, dirigé par Gérard Larcher ‒ qui suivrait la situation « au détail près » ‒ voudrait, pour sa part, nouer une relation de confiance avec les acteurs calédoniens. Car l’institution aura de grandes responsabilités. Lorsque le gouvernement aura fixé une stratégie et déposera un projet de loi, c’est au Sénat que ce texte sera examiné en premier, a-t-il été rappelé. Ce qui n’est pas neutre quand l’Assemblée nationale présente une telle configuration !

Mais Jean-Pierre Sueur se veut rassurant : il y a 34 ans, « Michel Rocard ne disposait pas d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale. Donc on peut faire de grandes choses à condition que la volonté politique soit là, dans toutes les configurations ».

Chloé Maingourd

©C.M.