Confrontée à une baisse de chiffre d’affaires de près de 60 %, la compagnie a annoncé mercredi 10 juillet une série de mesures : chômage partiel, suspension de Melbourne et Tokyo, réductions de vols sur les autres lignes… Le lancement anticipé de Nouméa-Paris doit éviter les licenciements.
♦ LE CHIFFRE D’AFFAIRES EN CHUTE LIBRE
Entre le 13 mai et le 7 juillet, 317 des 477 vols programmés ont été annulés, soit un taux de réalisation de 34 %. Le chiffre d’affaires mensuel de la compagnie, qui s’élève habituellement à environ 2 milliards de francs, se situe actuellement entre « 800 et 900 millions » de francs, soit près de 60 % de chute.
« À cette baisse soudaine d’activité s’ajoutent des perspectives pessimistes de reprise des voyages en général, et du tourisme en particulier », indique Georges Selefen, directeur général d’Aircalin, qui s’attend à une diminution du trafic « d’au moins 50 % » pour les mois à venir. Sans préciser de montant, il annonce un déficit pour l’année 2024.
♦ LES LIGNES VERS MELBOURNE ET TOKYO SUSPENDUES
Melbourne fait l’objet d’une « suspension immédiate ». Sydney passe de trois vols par semaine à deux, Brisbane et Auckland de trois à « un ou deux », Papeete de deux à un. Wallis conservera un à trois vols. Port-Vila reprendra pendant les vacances scolaires d’août avec un seul vol. Dans l’immédiat, Singapour et Tokyo tombent de sept vols par semaine à « quatre ou cinq ». Puis la ligne tokyoïte sera interrompue à partir de septembre et « jusqu’à nouvel ordre ».
♦ CHÔMAGE PARTIEL POUR 35 % DES 500 SALARIÉS
Pour survivre à la crise du Covid, la direction avait réduit de 20 % la masse salariale, notamment via un plan de départs volontaires. Pour l’instant, pas de mesure aussi drastique. « Le maintien des effectifs, et donc des compétences, est au cœur des préoccupations d’Aircalin », dit Georges Selefen.
Entre « 35 et 40 % » des 500 salariés font d’ores et déjà l’objet d’un placement en chômage partiel. « On n’y était pas favorable au départ, parce qu’on nous en avait parlé très tôt et qu’on avait du mal à mesurer les contours de la situation. Aujourd’hui, on n’applaudit pas des deux mains, mais on est obligé de s’adapter au contexte », reconnaît Franck Manauté, délégué syndical Usoenc.
♦ INVESTISSEMENTS GELÉS, REMBOURSEMENTS REPORTÉS…
« Nous suspendons l’ensemble des dépenses d’investissement prévues cette année, indique Georges Selefen. Nous prévoyons aussi le report de l’ensemble des engagements que nous devions honorer en 2024 », notamment le remboursement du prêt garanti par l’État (PGE) lié à la crise Covid, qu’il espère rééche- lonner jusqu’en 2028, et celui des emprunts qui ont financé le renouvellement de la flotte, réalisé entre 2019 et 2023.
♦ NOUMÉA-PARIS VIA BANGKOK, UNE LUEUR D’ESPOIR
Le 26 décembre, Georges Selefen avait affiché la nouvelle ambition de la compagnie : en 2026, relier Nouméa à Paris avec une simple escale technique de « deux ou trois heures » en Asie, au moyen d’un nouvel avion gros porteur, un A350neo. L’investissement est gelé, mais le projet est avancé de deux ans.
Pour se donner du travail au plus vite, Aircalin compte lancer la nouvelle ligne Nouméa-Paris via Bangkok « d’ici la fin de l’année » avec ses actuels A330neo. « C’est la bouée de sauvetage qu’on entrevoit, souffle Franck Manauté. On espère qu’on aura du monde sur cette ligne. Encore faut-il que les gens aient l’envie et les moyens de voyager… » Si le succès n’est pas au rendez-vous, le plan de licenciement deviendra inévitable.
♦ FUSION DES COMPAGNIES : DISCUSSIONS EN COURS
Le vieux projet de fusion d’Aircalin, Air Calédonie et Air Loyauté peut-il renaître ? « La situation actuelle est de nature à imaginer ce type de rapprochement, répond Georges Selefen. Je sais que les actionnaires sont en discussion sur le sujet. Les prochaines semaines seront décisives pour certaines compagnies, et la question va être posée pour revoir la desserte aérienne en Nouvelle-Calédonie et imaginer quelque chose d’assez rationnel. »
Gilles Caprais