La SLN a annoncé la « mise en sécurité du site minier » de Poum à compter du 14 août. Cette procédure signe tout simplement la fin de l’activité pour les salariés, les sous-traitants et l’extrême nord.
La fermeture du site minier de Poum dépasse le sort des 95 salariés. Selon des chiffres de la SLN datant de 2022, près de 200 emplois indirects seraient en plus touchés. Le drame économique et social s’ajoute à la liquidation de la Sonarep, sous-traitant de la SLN employant 88 personnes, dans l’incapacité de faire face à ses lourdes dettes.
Ces conséquences n’englobent pas tous les services, épicerie, restauration, hébergement ou transport, qui gravitaient autour de l’activité minière. « Il y avait une redistribution qui profitait à toute la commune, décrit Henriette Tidjine-Hmae, la maire UC de Poum. Les sous-traitants venaient des communes aux alentours. » Ce sont tous les « gens du Nord » qui sont touchés, déplore Patrice Parent, le secrétaire CSTNC du comité d’établissement de Tiébaghi-Poum. « C’est un gros bassin d’emplois qui est concerné, de Poum jusqu’à Hienghène et Voh », développe Antonio Newedou, secrétaire général de la fédération des mines, des carrières et de la métallurgie de l’USTKE, syndicat majoritaire sur le site.
L’APRÈS NICKEL
La SLN a annoncé la fermeture, faute d’autorisations d’exploitation « nécessaires à la poursuite des activités minières ». Les incertitudes planaient depuis plusieurs mois. En mars, le site avait été mis en sommeil et ses salariés au chômage partiel. « Ni la richesse, ni la fréquence [des] échanges n’auront permis la délivrance » des permissions par la province Nord, indique l’entreprise dans un communiqué.
Depuis le 14 août, il ne reste plus que neuf personnes en service à Poum sur les 95 salariés. Celles-ci seront chargées de la « mise en sécurité du site minier », c’est-à-dire de l’arrêt de ses activités et de la réhabilitation de ses espaces. « C’est un retour en arrière de 30 ans. On a toujours connu une activité minière depuis 1996, déplore Henriette Tidjine-Hmae. Du jour au lendemain, il n’y a plus rien. On le ressent quand on circule dans la commune, on ne croise plus autant de personnes. »
Cette décision laisse un grand vide. « Nous regrettons que la SLN ait demandé la montée en puissance de l’activité et que maintenant tout s’écroule », critique l’élue indépendantiste. En janvier 2022, la municipalité signait une convention avec l’industriel et la Sonarep pour diversifier l’économie. Il était question de développer la pêche avec un centre de transformation des produits de la mer. La piste du tourisme de croisière a aussi été évoquée. Le wharf avait été rénové en ce sens pour accueillir des petits navires. Cet « après nickel » que les trois partenaires tentaient d’imaginer est dorénavant une réalité. Le retrait de la SLN et la liquidation de la Sonarep suspendent tout. « Nous devons chercher comment vivre avec d’autres activités », poursuit Henriette Tidjine-Hmae.
EXPORT
L’annonce est de « mauvais augure ». Antonio Newedou (USTKE) rappelle les difficultés de la filière entière face à la concurrence mondiale. « Les responsabilités sont partagées », précise-t-il. Patrice Parent (CSTNC) invite justement politiques et industriel à trouver des « solutions aux divergences » pour éviter le pire. « Certaines réactions inquiètent pour les autorisations à Tiébaghi ou Népoui, avance-t-il. Il faudrait mettre de l’eau dans son vin pour que tout le monde s’y retrouve entre la doctrine nickel et le maintien des emplois. »
Le site minier fonctionnait principalement avec les exportations. Un faible pourcentage de la production, de l’ordre de 5 %, était envoyé vers l’usine de Doniambo. C’est Poum qui devait notamment fournir à la SLN une grande partie des 2 millions de tonnes de minerai brut à basse teneur supplémentaires accordées par le gouvernement l’an dernier.
Sauf que Paul Néaoutyine demeure attaché à la « doctrine nickel » défendue par une partie des indépendantistes, en refusant toute exportation. « Je reste opposé, a fortiori de la part des métallurgistes, a réaffirmé le président UNI-Palika de la province Nord dans un communiqué daté du 10 août. Ce n’est pas le rapport de l’IGF, ni les déclarations du président de la République qui changeront les choses. » En avril, à l’annonce de la mise en sommeil, il dénonçait déjà des envois non autorisés vers la Chine, la Corée et le Japon. Paul Néaoutyine pointe toujours la responsabilité de l’industriel qui aurait exploité sans disposer des « autorisations administratives requises ».
La direction de la SLN sous-entend qu’elle souhaite poursuivre les échanges avec les autorités compétentes dans l’objectif de redémarrer l’activité. De son côté, le président de la province Nord compte réunir un comité local d’information à Poum, afin de « bien remettre les choses et chacun à sa place ».
Brice Bacquet
Les salariés ont été placés en congés rémunérés pour les trois prochains mois, le temps de trouver des solutions de reclassement en interne et à l’extérieur de la société. Les personnes licenciées bénéficieront de six mois de congé de reclassement, avec 75 % de leur salaire maintenu et un accompagnement personnalisé. Elles pourront obtenir une aide à la reconversion, à la formation ou à la création d’entreprise. La SLN accompagnera financièrement la mobilité.́ Une cellule a été spécialement créée pour suivre les 86 salariés touchés. L’industriel échange aussi avec les sous- traitants impactés.