600 cannettes par an et par habitant

Les Calédoniens boivent plus qu’avant, en grande quantité et de plus en plus jeune. Les filles sont aussi de plus en plus concernées. Face à ce fléau – qui est à l’origine de 11 % des décès sur le Caillou – l’Agence sanitaire et sociale entend débanaliser le produit et son usage. Une première campagne d’information a débuté mardi, pour la période festive…

La tendance n’est pas bonne. Sur les dix dernières années, les Calédoniens ont augmenté leur consommation d’alcool d’au moins 10 %. 40 % des adultes boivent de façon régulière, c’est-à-dire lors de dix occasions ou plus par mois. La consommation annuelle par habitant de plus de 15 ans est d’environ 10 litres d’alcool pur par habitant et par an, soit 600 cannettes de bière ou 34 bouteilles de whisky !

Autre fait marquant, le rajeunissement des consommateurs : alors que la vente aux mineurs est interdite, la moitié d’entre eux boivent régulièrement. 50 % des jeunes de 13 ans ont déjà goûté à l’alcool. Enfin, la féminisation des consommateurs est en hausse constante.

Ces chiffres de l’Agence sanitaire et sociale (ASS-NC) sont récents puisque issus en majorité d’une enquête réalisée, il y a tout juste un mois auprès de 1 000 personnes. Et ils ont forcément de quoi inquiéter lorsque l’on connaît les conséquences de l’alcool.

« Biture express »

Nous ne sommes certainement pas les seuls à boire beaucoup (trop). « Notre consommation est globalement moindre sur l’année par rapport à la métropole, par exemple. Seulement cette consommation est plus intense », précise Patrice Hoarau, responsable du programme Addictologie à l’origine de cette campagne.

Le « binge drinking » ou « biture express » est un mode fréquent d’alcoolisation. Le fait de boire cinq verres et plus par occasion concerne de fait une grande partie des Calédoniens. 40 % des 13- 18 ans ont été ivres dans l’année, 59 % des plus de 15 ans. En clair, la plupart des gens ne boivent pas tous les jours mais quand ils boivent, c’est une alcoolisation massive, avec par conséquent des dégâts majeurs.

Les chiffres font froid dans le dos. 51 % des accidents de la route impliquent directement l’alcool, environ 80 % des adultes incarcérés le sont pour des faits commis sous l’emprise de l’alcool. Le rôle désinhibant de l’alcool peut se révéler dramatique dans certaines situations : il est présent dans 50 % des cas d’homicides ou de suicides. Les hospitalisations (après le passage aux urgences) dans un contexte d’intoxication éthylique aiguë sont aussi en forte hausse, à plus de 400 cas par an. L’alcool est à l’origine de problèmes cardiovasculaires, de cancers… Et tue environ 150 personnes par an sur le territoire (11 % des décès), légèrement moins que le tabac.

Combattre les idées reçues

La campagne d’information lancée cette semaine vise à banaliser le produit et son usage. « Il faut comprendre que l’alcool nous concerne tous parce qu’il engendre des problèmes pour la société toute entière », souligne Patrice Hoarau. Par le biais d’affiches, de spots à la radio ou à la télévision, elle vise surtout à déconstruire les idées reçues. La première thématique concerne la jeunesse. « Il faut savoir que la consommation des jeunes impacte de manière importante leur développement, jusqu’à 20 ans environ. Boire n’est pas sans conséquence à cet âge. Surviennent des problèmes d’apprentissage, des réactions non adaptées de violence, et un risque accru d’alcoolo-dépendance. En fait plus on s’initie tôt, plus on est en danger », ajoute le responsable. La campagne se penche aussi sur l’alcool et la fête ou sur l’anormalité de l’alcoolisation massive et ses risques. Mais aussi sur l’alcool et la sexualité, l’idée étant de dire qu’il est faux de croire que l’on est plus « performant » sous l’emprise de l’alcool. Enfin, une dernière thématique s’intéresse à l’alcool et le travail, le temps d’élimination de l’alcool dans le corps et la mise en danger de soi et d’autrui lorsque l’on se rend au travail après une « cuite ».

Cette campagne marquera le point de départ de plusieurs actions et notamment d’une journée symbolique « sans alcool ». En ce mois de décembre la DASSPS, Direction des affaires sanitaires et sociales et des problèmes de société de la province Nord, a décidé d’accompagner la campagne par des actions de terrain à Belep, Koné, Koumac, Ouégoa, Kouaoua et Canala.

C.M.

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« Une grande partie des consommateurs pensent que la consommation raisonnable d’alcool est de … 7 verres dans la journée ». 

« La moitié des consommateurs estime qu’une consommation excessive se situe autour de … 15 canettes de bière soient 22 verres par fête ». 

Dépendance

Ce n’est pas parce que l’on ne boit que pendant les coups de fêtes que la dépendance n’est pas là. « Le fait ne pas pouvoir faire la fête sans surconsommer de l’alcool est déjà une forme de dépendance », fait savoir Patrice Hoarau. Cela est aussi le signe d’un certain mal- être. Et qui dit addiction, dit aussi vraie maladie et possibilité de se faire soigner. Si l’on se pose des questions ou que l’entourage fait des remarques, il est conseillé d’évoquer la problématique avec son médecin qui pourra à son tour réorienter vers les services adaptés, comme le centre de soin en addictologie ou le programme Declic’ pour les jeunes.

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