Visite de Gérard Larcher : du chemin parcouru à la sortie de l’accord

En prenant la parole cette semaine devant les élus du Congrès, c’est à toute la Nouvelle-Calédonie que le président du Sénat s’est adressé. Devant la première institution du pays, Gérard Larcher n’est pas seulement venu faire des constats à deux ans de la sortie programmée de l’accord de Nouméa, il a aussi prodigué quelques conseils et lancé quelques flèches. 

Outre le fait que Gérard Larcher s’est montré plus à l’aise que nombre de ses prédécesseurs au pupitre du Congrès, le président du Sénat a su manier avec habilité le verbe et prouver qu’il n’ignorait rien de l’art de discourir.
C’est ainsi qu’après avoir salué le souvenir de ceux qui « resteront dans la mémoire universelle » pour avoir restaurer la paix et jeter les bases de la mise en œuvre d’un destin partagé, il a pointé avec acuité les grands défis qui incombent désormais aux élus en place, soulignant au passage le poids de l’héritage qu’ils doivent assumer.
Le premier de ces défis, souligne Gérard Larcher, c’est d’être à la hauteur de ce qu’ont accompli les « anciens » pour parvenir à prolonger leurs réussites et à entretenir « l’espérance ».
Logiquement, le deuxième défi consiste à réussir la sortie des accords qui se sont succédé depuis 1988. Pour y parvenir, le président du Sénat a exhorté la classe politique calédonienne à rechercher l’unité plutôt que la division, avec comme argument que depuis bientôt trente ans, le refus de la partition n’a jamais été remis en cause.

« Cet acquis de l’unité doit être l’un des fondements de l’avenir de la Nouvelle-Calédonie »

Se référant aux conclusions du dernier Comité des signataires, Gérard Larcher a ainsi souligné que le temps est venu pour les acteurs politiques locaux de passer à la vitesse supérieure, même s’il a inscrit son discours dans la perspective, qui semble inéluctable, d’une consultation sur l’accession à la pleine souveraineté, mais sans jamais user du mot référendum. « Le temps des experts est dépassé, est-il venu dire, c’est désormais au politique de prendre le pas sur les techniciens. »
Gérard Larcher change alors de registre pour démontrer son implication personnelle et pour dire que le Sénat qu’il préside de nouveau depuis 2014 aura tout son rôle à jouer dans les mois qui viennent.
Il lance ensuite: « Avoir une notion trop juridique ou trop doctrinale (de la souveraineté, NDLR ) serait une erreur », avant d’ajouter : « Toute souveraineté politique , aussi puissant soit l’État qui l’exerce, se heurte à de fortes contraintes exogènes (…). Est-on souverain en matière de développement économique lorsque ses poumons industriels sont animés par des puissances financières lointaines et non maîtrisables ? » C’est l’un des temps forts de l’allocution.
C’est sur la base de cette réalité, insinue-t-il, qu’il faut faire preuve de pragmatisme dans les choix institutionnels qui seront faits, comme il faudra envisager avec réalisme les futurs relations avec les pays de notre grande région, y compris avec les autres terres françaises du Pacifique.
Avant de conclure sur le rôle qui devra être celui de l’État et du Sénat dans le processus de sortie de l’accord, rôle qu’il considère comme majeur, Gérard Larcher a pointé deux écueils qui pourraient mettre à mal toute la démarche et déstabiliser le processus.
En premier lieu, la crise du nickel, dont l’importance menace la prospérité calédonienne dans la durée et le malaise d’une partie de la jeunesse du pays qui porte en elle les ferments d’une fracture sociale.
Optimiste malgré tout sur la capacité des autorités calédoniennes à surmonter ces difficultés, le président du Sénat a conclu que seule une volonté affirmée de tous les partenaires (locaux et État) permettrait de franchir « avec succès la nouvelle étape qui est devant nous ».

C.V.