Un indépendantiste dirige le Congrès

L’élection de Roch Wamytan (UC-FLNKS) à la présidence du Congrès, vendredi, a créé la surprise. Il a été élu au deuxième tour de scrutin grâce aux voix de l’Éveil océanien, jusqu’alors plutôt considéré proche des loyalistes.

«C’ est une majorité océanienne et c’est historique », a lancé Roch Wamytan à l’issue de son élection à la présidence du Congrès. Une présidence qui mathématiquement était possible, mais qui a surpris tous ceux qui s’étaient avancés d’un pronostic, voyant le camp loyaliste l’emporter. Pourtant, c’est bien Roch Wamytan qui a été élu, pour la quatrième fois de sa carrière, à la tête du Congrès grâce à l’Éveil calédonien, le nouveau venu dans l’hémicycle, pourtant aux valeurs loyalistes.

Une séance surprenante

Tout a commencé par l’annonce des candidats du premier tour avec Magali Manuohalalo pour les groupes loyalistes, L’Avenir en confiance et Calédonie ensemble, Veylma Falaeo pour l’Éveil océanien, et Roch Wamytan présenté par les deux groupes indépendantistes constitués. À l’issue de ce premier tour, Roch Wamytan et Magali Manuohalalo ont obtenu 25 voix chacun, Veylma Falaeo a obtenu les trois voix de l’Éveil océanien et un bulletin blanc a été mis dans l’urne, sans doute celui de Louis Kotra Uregei qui siège en non-inscrit.

Au deuxième tour, l’Éveil océanien a retiré sa candidate et le groupe a porté ses voix aux indépendantistes, mettant au perchoir Roch Wamytan. Un choix « évident », comme l’a souligné le président de l’Éveil océanien, Milakulo Tukumuli. « Nous incarnons le changement, ce n’est pas une majorité indépendantiste, c’est une majorité océanienne que nous venons de constituer. Je l’ai dit tout au long de ma campagne : au-delà du clivage indépendantiste et non-indépendantistes, nous devons construire un modèle de société qui soit le miroir de la population de Nouvelle- Calédonie », a-t-il déclaré.

Roch Wamytan, 68 ans, a donc récolté une majorité absolue de 29 voix contre 25 pour Magali Manuohalalo. Comme l’a souligné le leader indépendantiste dans son discours d’investiture, « il est temps que les Océaniens, qui entretiennent des échanges millénaires, mais qui ont été séparés par les frontières de la colonisation et artificiellement opposés, se retrouvent aujourd’hui autour de valeurs ancestrales et qu’ils puissent les partager avec toutes les populations qui vivent dans ce pays océanien, leur pays d’adoption (…) On espère que ce rassemblement océanien, ici au Congrès, puisse se poursuivre au niveau du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ».

« Une trahison »

Pour le camp loyaliste, cette élection est une véritable déconvenue. Tout semble s’être joué quelques heures avant le vote des élus, alors même que l’Éveil océanien était pressenti pour voter en leur faveur. Assurant avoir fait « des propositions généreuses : vice-présidence à la province Sud, exécutif du gouvernement, exécutif de la province avec les vice-présidences également. Pour trois élus au Congrès… », pour Virginie Ruffenach, présidente de L’Avenir en confiance au Congrès, il s’agit « d’une trahison. Ce choix est un acte politique très fort et ne présage pas d’un avenir particulièrement serein » et d’ajouter à propos de l’élection du gouvernement : « Il serait inenvisageable qu’il y ait un président du gouvernement indépendantiste, alors que les Calédoniens, le 4 novembre et le 12 mai, ont fait le choix de dire : « Nous sommes majoritairement, très majoritairement, non indépendantistes.» Ce serait un déni de démocratie. »

Pour Calédonie ensemble, qui a encore du mal à diriger les résultats des provinciales, et la « trahison » de ses prodiges, cette défaite et le choix de l’Éveil océanien s’expliquent dans la mise en place des vice-présidences de la province Sud, le 17 mai. « En trustant tous les postes de vice-présidence de la province Sud et en nous promettant une présidence du Congrès qu’il ne maîtrisait pas, L’Avenir en confiance a commis une faute politique dont on mesure aujourd’hui toutes les conséquences puisque l’Éveil océanien a fait élire Roch Wamytan. Je ne sais pas jusqu’où cette faute aura des répercussions », a cinglé Philippe Michel, chef du groupe Calédonie ensemble au Congrès.

L’Éveil océanien enfonce le clou

La volonté de donner le Congrès aux indépendantistes s’est confirmée lors de l’élection des vice-présidents et des commissions. L’Éveil océanien, par ses voix, a permis à Jean Creugnet, de l’Uni, de devenir premier vice-président et de placer Caroline Machoro (UC-FLNKS) à la présidence de la commission permanente, la seule instance de décision. Autant dire qu’en attendant l’élection du gouvernement, le FLNKS occupe désormais une position déterminante dans la dernière mandature de l’Accord de Nouméa et avant le deuxième référendum de 2020, et ce, avec l’appui de l’Éveil océanien. Mais avec l’Éveil océanien, on l’a compris, rien n’est figé et le président du Congrès n’est élu que pour un an.


LES VICE-PRÉSIDENTS

Premier vice-président : Jean Creugnet (Uni).

Deuxième vice-présidente : Pascale Montagnat (L’Avenir en con ance).

Troisième vice-président : Sylvain Pabouty (UC, FLNKS et Nationalistes).

Quatrième vice-présidente : Sonia Backes (L’Avenir en confiance).

Cinquième vice-présidente : Wali Wahetra (Uni).

Sixième vice-présidente : Annie Qaeze (Calédonie ensemble).

Septième vice-présidente : Henriette Tidjine-Hmae (UC, FLNKS et Nationalistes)

Hutième vice-président : Gil Brial (AEC)

C.S