SOS associations en danger

Miné par les restrictions budgétaires, le manque de considération voire le « clientélisme », le monde associatif est un « trésor à l’abandon ». Voilà ce qu’affirme le collectif des associations du territoire qui somme les élus de revoir leurs priorités.

La Nouvelle-Calédonie peut se targuer d’avoir une vie associative foisonnante. Elle est même, selon une étude menée fin 2014 citée par le collectif, la « région française » où se crée le plus d’associations chaque année, après la région parisienne.

Centres aérés, associations sportives, culturelles, caritatives, d’aides spécialisées, de défense environnementale et de consommateurs… les centres d’intérêt sont variés et les structures, sont présentes jusqu’aux endroits les plus isolés, particulièrement nombreuses aux îles et dans le Nord. Elles fédèrent toutes les ethnies de Nouvelle-Calédonie dans un esprit de solidarité, de citoyenneté. Mieux, elles « assurent à moindre coût avec efficacité et régularité » des missions d’intérêt général, des « actions essentielles », en « palliant les carences ou parfois même en se substituant aux politiques publiques » et elles vont jusqu’à être des « vecteurs d’innovations sociales avec des projets précurseurs et d’initiatives citoyennes », résume Pascal Hébert, secrétaire général de la FOL, Fédération des œuvres laïques.

Pourtant, explique Catherine Poédi, présidente de l’Association des parents d’enfants handicapés (APEHNC), la situation va de mal en pis pour une majorité d’entre elles, qui subissent des « coupes budgétaires brutales », allant « bien au-delà » des baisses appliquées aux dépenses publiques.

Au pied du mur, des associations disparaissent, d’autres limitent drastiquement leurs actions, leur accueil ; des emplois sont supprimés. Et clairement, elles s’inquiètent sur leur capacité à mener dans les prochains mois leurs actions de proximité au service de ceux qu’elles aident au quotidien. C’est le message que 72 d’entre elles ont en tout cas souhaité porter aux autorités du territoire dont elles ne comprennent pas la logique.

« Clientélisme »

Dans un contexte où la lutte contre la délinquance est soi-disant portée en priorité absolue, les associations ont en effet du mal à comprendre que l’on puisse s’attaquer à ceux qui empêchent « des milliers d’enfants de traîner », qui assurent des formations et offrent parfois une opportunité d’épanouissement inespérée.

Dans un contexte grandissant de difficultés financières pour les familles, elles se demandent si ce soutien aux « plus faibles » et aux « plus pauvres » est pris à sa juste valeur. Enfin, alors que la citoyenneté est présentée comme un nouveau « Graal », notamment à l’école, elles s’interrogent sur le fait qu’on ne considère pas plus « tous ces gens qui sont prêts à donner de leur temps bénévolement » pour l’intérêt commun.

Au-delà des aspects financiers, les associations estiment qu’elles sont trop souvent « utilisées comme des prestataires et non comme des partenaires » et que trop rarement associées aux grandes orientations des politiques publiques, alors qu’elles assument une partie de ces actions.

Elles sont par ailleurs chagrinées de voir se tarir ce qu’elles considèrent comme un « contre-pouvoir » essentiel, la voix des citoyens qui peut s’élever pour prendre leur défense quand elles estiment que leurs droits sont lésés. Pire, elles font valoir des « instrumentalisations » et du « clientélisme ». « Si on ne travaille pas la cote d’amour, on devient directement un adversaire et on ne reçoit plus rien », regrette un responsable.

Feuille de route

Concrètement, les associations se plaignent du manque d’encadrement de la vie associative et de valorisation des bénévoles. Elles réclament depuis plus de dix ans la mise en place d’une charte associative et un statut de bénévole et, depuis deux ans, attendent un état des lieux de la vie associative qui permettrait notamment de savoir exactement « à combien de gens elles profitent ».

Il est maintenant demandé au gouvernement de prendre ses responsabilités sur ce dernier sujet et au Congrès de « s’engager significativement dans ce domaine », de faire de la vie associative « une priorité en parallèle des échéances de la fin de l’Accord de Nouméa » de « discuter d’une feuille de route ».

« Il y a urgence à mettre cette question au cœur du débat public en ces moments où nous recherchons ce qui fait lien », résume Alain Grabias, de l’Association pour la sauvegarde de l’enfance, de l’adolescence et des adultes de la province Nord. Faute de quoi, comme tout « trésor » s’il n’est pas bien apprécié et protégé, le tissu associatif dépérira, estiment les responsables.

C.M.


72 signataires

Parmi les signataires de cet appel, on trouve des membres du collectif et d’autres associations du territoire avec toutes sortes de démarches en faveur de la jeunesse, des femmes, de la diversité sexuelle, de défense des droits humains, des aînés, des malades, des handicapés, des consommateurs, de la culture, des animaux, des insectes, de l’environnement, du sport…