Sage-femme, un métier encore trop mal connu

A midwife conducts a monitoring on a pregnant woman, on February 17, 2009 at the maternity hospital of Caen, northern France. The super-short maternity leave of Justice Minister stirred debate in France over how to juggle a high-powered political career with the demands of motherhood. AFP PHOTO MYCHELE DANIAU

On réduit bien souvent le travail des sages-femmes à l’accouchement, sa préparation et à la rééducation. En réalité, les sages-femmes ont un panel d’actes assez étendu et souvent méconnu des patientes. L’ensemble du système de santé y gagnerait pourtant puisqu’elles font partie des praticiens les moins chers.

C’est très probablement le premier visage que chacun d’entre nous a vu au moment de sa naissance. La sage- femme est le praticien de référence pour l’accouchement sans pathologie. Ce sont elles qui mettent au monde la grande majorité des enfants, ici comme ailleurs. Ces professionnels de santé et leurs compétences sont pourtant mal reconnus. Si on les associe spontanément à la maternité, le champ de leurs actes ne se s’arrête pas là, loin de là.
Outre la surveillance et le suivi médical pendant la grossesse, elles proposent des séances de préparation à la naissance et à la parentalité. La sage-femme est un acteur clef de l’accompagnement des femmes au travers de leur suivi préventif gynécologique. Elles peuvent notamment prescrire des contraceptifs, réaliser des échographies et des frottis. Depuis peu, elles ont le droit de réaliser des interruptions volontaires de grossesse médicamenteuses. Un acte pratiqué en Métropole, mais qui devrait concerner uniquement les sages-femmes des centre médicaux sociaux dans un premier temps, notamment en raison des installations nécessaires. Un cabinet est souvent inadapté.

Des compétences diverses et mal connues

Autre compétence peu connue : la possibilité de prescrire des vaccins pour la femme, le nouveau- né, ainsi que toutes les personnes de l’entourage de la future maman et ce, jusqu’à la n de la période postnatale. En la matière, le territoire fait preuve d’une certaine incohérence. Au cas où une sage-femme effectuerait une vaccination, la patiente devra aller consulter un médecin quand même pour faire signer son certi cat de vaccination, indispensable pour les allocations familiales. Un doublon aussi inutile que coûteux. Mais que l’on se rassure, il n’y a pas qu’en Calédonie que la profession est mal connue et le constat est le même en Métropole. A la différence près que le gouvernement a lancé une campagne de communication visant à mieux faire connaître la profession. Pour faire simple, la sage-femme pourrait être le premier recours pour les femmes, avant un médecin généraliste ou un spécialiste. La base de leur travail consiste en une prise en charge globale où la prévention occupe un rôle central.

L’idée est justement de faire en sorte d’éviter de basculer dans la pathologie grâce au dépistage. Si la patiente souffre d’une pathologie, la sage-femme la renvoie vers un médecin ou un spécialiste dont le métier est précisément la pathologie. À l’occasion d’une audition par les élus du Congrès, certains d’entre eux s’inquiétaient que l’on ne vienne retirer de l’activité au médecin pour la donner aux sages-femmes. Ce n’est précisément pas le cas puisque ces professionnels de santé sont complémentaires et non pas concurrents. Il suffit de prendre l’exemple d’un frottis. Le délai pour un rendez-vous pour cet acte chez un gynécologue peut atteindre trois mois, ce spécialiste ayant bien des pathologies prioritaires à traiter.
En résumé, les autorités de santé n’optimisent pas les compétences des professionnels, ce qui pénalise l’ensemble du système, y compris sur le plan économique. Pour la consultation de suivi du nouveau-né, de la naissance à huit semaines, par exemple, le prix de la consultation sera de 5 430 francs pour un spécialiste, 4 750 francs pour un médecin généraliste et de 3 100 francs pour une sage-femme. À compétences égales, le calcul est rapide pour la Cafat. De manière plus générale, les actes d’une sage-femme sont très nettement moins bien rémunérés. Les coe cients d’indexation dont béné cient les professions médicales sont compris dans une fourchette de 1,3 à 1,8, exception faite des sages-femmes qui ont le même niveau de rémunérations que les praticiens métropolitains. Un décalage assez incompréhensible.

Revaloriser une profession importante sur le plan sanitaire et social

D’autant que les sages-femmes, en plus de leur rôle en matière de santé, jouent un rôle social. Le lien qu’elles entretiennent avec leur patiente et la durée des consultations plutôt longue (généralement une demie heure) leur permet d’aborder la question des violences sexuelles, qui touchent un grand nombre de femmes, mais aussi d’alimentation ou encore d’allaitement, domaine sur lequel un gros travail est encore à réaliser. Pour l’anecdote, à l’occasion de leur audition par le Congrès, un des élus expliquait tranquillement qu’avoir des rapports sexuels avec une femme donnant le sein à son enfant faisait tourner le lait.

Si les sages-femmes libérales sont les professionnels de santé les moins bien rémunérées à compétences égales, certains de leurs actes devront être revalorisés. C’est notamment le cas des retraits d’implant contraceptif. Un acte qui demande environ 45 minutes et qui nécessite également un matériel spécifique. La sage-femme fait payer 2 750 francs mais n’en gagne qu’environ 1 000 alors que les généralistes comme les spécialistes facturent 10 200 francs. De la même manière, les sages-femmes demandent une revalorisation de leur consultation à hauteur de 3 520 francs. Un niveau qui permettrait au tiers des sages-femmes libérales qui luttent contre la cessation d’activité de mieux boucler les fins de mois.


Rembourser sur la base du tarif le moins cher

Le syndicat des sages-femmes propose le « génériquage » des actes à compétences égales. Pour faire simple, cela consiste à rembourser l’acte sur la base de la consultation la moins chère. C’est- à-dire que si vous faites un frottis, vous serez remboursé sur la base d’une consultation d’une sage-femme. Rien n’empêche toutefois les patientes de se rendre chez un médecin généraliste ou un spécialiste, mais dans ce cas, le dépassement par rapport au prix de la consultation des sages- femmes sera à la charge du patient ou pris en charge par sa mutuelle. Cette idée permettrait de faire des économies tout en valorisant les compétences de chaque professionnel de santé.

M.D