Relance économique : les collectivités ouvrent les vannes en grand

Le gouvernement a présenté, lundi, son plan de soutien à l’économie, le Pulse. Pour la première fois, la stratégie développée est concertée avec l’ensemble des provinces du territoire. Ce plan ambitieux de plusieurs milliards vise à soutenir l’emploi et les entreprises en mobilisant les dispositifs existants et en créant de nouveaux. Il devrait être mis en œuvre sans tarder, au travers d’arrêtés et de délibérations, et est prévu jusqu’à fin 2017.

Tous les indicateurs sont au rouge. L’économie calédonienne n’est pas encore en récession mais clairement à bout de souffle. Le monde économique avait déjà tiré la sonnette d’alarme, tout comme les partis politiques. En réponse à ces vives inquiétudes, le gouvernement a présenté, lundi, son plan de relance, baptisé Pulse pour plan d’urgence local de soutien à l’emploi. Pour la première fois, cette feuille de route a été conçue avec les trois provinces, collectivités qui disposent des leviers et des compétences pour venir directement en aide aux demandeurs d’emploi et aux entreprises (au moment de la présentation du plan, la province Nord n’avait pas encore totalement bouclé son programme d’aide, ces mesures n’ont donc pas été présentées). Cette coordination devrait permettre d’optimiser le soutien à l’emploi et aux entreprises en mobilisant au plus juste l’ensemble des dispositifs, qu’ils soient gouvernementaux ou provinciaux. Des dispositifs qui sont par ailleurs adaptés à chaque province, en fonction des ses besoins et particularités. Rien que pour le gouvernement, le plan représente un effort budgétaire de 2,5 milliards de francs répartis de manière assez large. Il vient en aide à l’économie au travers d’une mutualisation des dispositifs, mais aussi et surtout du maintien de l’emploi en allégeant les charges des entreprises et en soutenant l’activité.

Soutenir l’emploi et l’activité
C’est d’ailleurs en grande partie par manque d’anticipation de l’activité que notre économie se retrouve aujourd’hui dans cette situation. Pendant près de quinze ans, nos entreprises ont bénéficié de grands chantiers. Ces cinq dernières années, il y a pourtant eu un certain flottement entre la fin des usines ou encore du Médipôle et le démarrage des projets censés en prendre le relais. Et des grands chantiers, il en existe. Projets d’hypermarchés, carré Rolland, Hilton de Lifou, marina à Dumbéa, aire de stockage de Vale, centrale électrique de Doniambo, barrage de Pouembout et Ouinné… Autant dire des dizaines de milliards et la liste n’est pas exhaustive.
Mais la croissance calédonienne n’est expliquée à 30 % par l’investissement, les 70 % restants, qui constituent le grand pilier de l’économie calédonienne, se concentrent dans la consommation. Ce volet, qui est loin d’être réglé et suscitera encore bien des polémiques, consiste à redonner du pouvoir d’achat aux Calédoniens, via la réforme de l’impôt sur les revenus ou encore de la fiscalité indirecte. Mais avant de pouvoir relancer la croissance, l’idée est de sauver ce qui peut l’être. C’est tout l’enjeu de ce plan qui devrait commencer à se concrétiser dès la semaine prochaine avec les premiers arrêtés pris par le gouvernement.

Les mesures phares

 

Des guichets uniques

• Des guichets uniques seront créés dans chacune des trois provinces. Ils visent à regrouper l’ensemble des services du gouvernement et des provinces afin d’expertiser au mieux les situations des entreprises et de mobiliser les différents dispositifs existants et notamment les mesures d’accompagnement.

Chômage partiel et entreprises en difficulté

• Le dispositif du chômage partiel sera étendu. Aujourd’hui, une entreprise peut y recourir chaque année dans la limite de 900 heures avec une indemnisation plafonnée à 66 % du SMG. Le gouvernement va porter le volume d’heures à 1 800 et une prise en charge de 100 %. C’est
la caisse chômage de la Cafat qui portera cette augmentation. Elle dispose aujourd’hui d’une réserve de trois milliards de francs mais le coût de la mesure est estimé à 450 millions de francs.
• Les dettes sociales et fiscales des entreprises en difficulté seront étalées. Chaque situation sera étudiée au cas par cas par un nouveau comité
et des échelonnements à moyen long terme ou des remises pourront être envisagés. Le comité sera composé du trésorier-payeur général, de la Direction des services fiscaux, de la Direction des douanes ou encore de la Cafat.
• Les entreprises sous-traitantes de l’industrie métallurgiques et du BTP (de moins de 10 salariés) qui ont une baisse d’activité de 35 % verront les cotisations patronales et les salaires pris en charge par la province Sud et le gouvernement. La province Îles va encore plus loin puisqu’elle étend cette mesure à l’ensemble des secteurs d’activité et pas seulement au BTP. Les cotisations patronales sont prises en charge pour une durée de 24 mois.
• Le comité de suivi bancaire, créé en 2008 pour surveiller le bon financement de l’économie, sera relancé. Il regroupe notamment les directions des provinces, l’Agence française de développement, la Caisse des dépôts et consignations, le tribunal du commerce, les chambres consulaires ou encore le haut-commissariat.

Formation et insertion

• Dans le cadre du financement de la formation professionnelle, les entreprises de dix salariés et plus doivent investir chaque année 0,7 % de leur masse salariale ou payer une taxe en contrepartie. Certaines formations obligatoires étaient jusqu’à présent exclues de ce 0,7 %, comme la formation incendie, par exemple. Elles entreront désormais dans ce cadre.
• Le volume des contrats du programme d’insertion citoyenne de la province Sud va être augmenté au profit des salariés licenciés et des membres
de leur famille.
• Cent nouvelles bourses vont être ouvertes en 2017 aux étudiants désirant aller se former au Québec, en métropole ou encore à ceux qui veulent intégrer l’UNC. La formation professionnelle qui coûte 350 millions de francs par an (pour environ 250 bénéficiaires) recevra une dotation supplémentaire de 100 millions de francs.

La promotion de l’emploi

• La prime à l’embauche de la province Sud va être revalorisée avec le soutien du gouvernement. Elle passera à 200 000 francs, sera élargie à tous les secteurs d’activité, plus seulement à certains prioritaires.
• Aux Loyauté, les entreprises créant des emplois (dans la limite de cinq) verront la totalité des salaires et des cotisations sociales pris en charge par les collectivités, plafonnées au SMAG ou au SMG pendant 18 mois. À 100 % les six premiers mois, à 50 % les six mois suivants et à 25 % les six derniers.
• En province Sud, jusqu’au 31 décembre 2017, les salariés licenciés présentant un projet de création d’entreprise pourront ne pas tenir compte des restrictions normales en termes de secteurs d’activité ou de zones géographiques.

La commande publique assouplie

• Les règles de la commande publique vont être assouplies. Pour tous les marchés inférieurs à
100 millions de francs, les entreprises auront systématiquement une avance de 25 % et les délais de paiement seront réduits en deux temps. À 36 jours au 1er avril 2017 et à 30 jours au 1er janvier 2018. Mauvais élève en la matière, le gouvernement a fait savoir que des instructions avaient été passées pour accélérer le mouvement et notamment mandater plus rapidement les paiements. Les délais de paiement ne commencent qu’à partir du moment où les sommes ont été mandatées.

Le soutien au BTP

• Le gouvernement va solliciter les services de Bercy de façon à raccourcir les délais d’instructions des dossiers de défiscalisation. Aujourd’hui, s’ils sont déposés au second semestre, leur instruction ne se fera qu’au début de l’année suivante. Près de 18 milliards de francs de projets sont ainsi en attente au ministère des Finances. Le gouvernement va également faire une demande pour que les dossiers soient instruits localement par les services de l’État de façon à réduire encore davantage les délais.
• Une enveloppe de 1,7 milliard de francs sera allouée en urgence à des travaux pour soutenir le BTP. Il ne s’agit toutefois pas de crédits nouveaux. Le gouvernement qui avait inscrit 14 milliards de francs d’investissement à son budget a fait le tour des directions de façon à voir ce qui ne serait pas réalisé cette année. 1,7 milliard a ainsi pu être dégagé pour être engagé sur d’autres opérations dès cette année.
• Le PTZ (prêt à taux zéro) va être aménagé de façon à l’ouvrir au couple sans enfant et aux familles monoparentales. L’idée est de créer une demande d’une centaine de logements supplémentaires par an pour stimuler le BTP. Il bénéficie aujourd’hui chaque année à près de 500 familles.