Mapou drague les non-indépendantistes ; Gomès dans la tourmente des soutiens perdus

Dans la 2e circonscription (brousse et agglo sans la Ville) où Louis Mapou (Uni) a recueilli 30,1 % des suffrages et Philippe Gomès (Calédonie ensemble) 23,93 %, tout est possible. Les deux duellistes du second tour ont chacun perdu du terrain : en cause l’abstention pour l’un ; l’usure du pouvoir et les divisions pour l’autre. Jusque-là, l’entre-deux-tours a été favorable aux indépendantistes qui se rassemblent.

Érosion. – Philippe Gomès n’a pas retrouvé au premier tour ses voix de 2012 : il perd 9 % d’un scrutin à l’autre. Même dans son fief de La Foa, il ne totalise que 44 % des suffrages, contre 65 % il y a cinq ans. A contrario, cela signifie aussi qu’il bénéficie d’un petit réservoir de voix, s’il joue la carte du réveil des abstentionnistes. Insuffisant cependant pour passer la barre des 50 % des suffrages, sans un confortable report des voix loyalistes de la circonscription.

L’essentiel du sortant. – C’est le sens de son appel lancé à l’issue du scrutin : « Au premier tour, on exprime des sensibilités. Au deuxième, on se retrouve sur l’essentiel, à savoir maintenir la Calédonie dans la France ». Les accents patriotiques et solennels du député sortant, accusé de « préparer l’indépendance-association » en ont fait sourire plus d’un…

Soutiens mesurés. – Aussi, et logiquement, l’UCF de Gil Brial prône « un vote en faveur de Gomès pour faire barrage à l’indépendance ». Tout aussi logiquement les instances parisiennes du FN demandent aux électeurs frontistes de voter pour Philippe Gomès, « à condition qu’il prenne l’engagement sur l’honneur de ne jamais accepter l’indépendance de la Calédonie ». Un soutien que se refuse pour sa part à suivre Bianca Hénin, qui ne fait pas confiance au député sortant.

«Gomès méprise mes 6000 voix !»– Harold Martin ne brade pas ses 15,36 % et avait demandé à Philippe Gomès « des engagements clairs de ne pas changer la question du référendum pour ou contre la France » et l’avait invité à « prendre des engagements écrits sur sa volonté de défendre la Calédonie dans la France et sans rien bricoler dans le dos des électeurs ». Depuis rien. Le maire de Païta en tire donc les enseignements : « Nous avons le choix entre un indépendantiste dur, que je respecte parce qu’il dit les choses en face, et un indépendantiste mou » en proie aux démons de la « souveraineté en partage avec la France ». Pas de consigne de vote pour Harold Martin, qui indique simplement à titre personnel « ne pas pouvoir voter Gomès » et invite ses électeurs à se prononcer « en leur âme et conscience ».

Mapou en chasse. – Côté indépendantiste, la donne est un peu plus claire. Louis Mapou, dont la campagne de proximité au premier tour s’était longuement arrêtée sur la Côte Ouest, a constaté des « scores honorables » dans certaines communes non indépendantistes. Il exploite donc le filon au second tour, misant sur un possible rejet du député sortant. Et tentant de séduire au-delà de son cercle d’influence, sur le thème : « N’ayez pas peur ! Un député indépendantiste ne changera rien au processus de sortie de l’Accord… » Et d’ajouter, avec quelque perfidie : « Avoir un député indépendantiste dans la 2e et un autre de droite dans la 1re, faciliterait certainement les discussions d’avenir ».

L’UC retrouve de la voix. – Un message reçu 5/5 au RASP comme à l’UC, officiellement absente des urnes au premier tour, qui dès mardi s’est prononcée « en faveur d’un vote Mapou, dimanche ». Le plus vieux parti calédonien lance même un appel à la mobilisation par la voix de son président, Daniel Goa, selon lequel « il n’a jamais été question de boycotter le scrutin… » Admettons.

La clef. – On peut donc s’attendre à une mobilisation plus forte de l’électorat indépendantiste dimanche. Mobilisation, qui tirerait la participation vers le haut. Or, c’est la clef de cette élection.

M.Sp.