Macadam Partage prend ses quartiers à Doniambo

Depuis le mois de septembre, le centre d’accueil de jour pour les SDF géré par l’association Accueil a déménagé du centre- ville vers Doniambo. La nouvelle structure correspond mieux à leurs besoins disent les autorités, mais elle nécéssitera un temps d’adaptation…

Le transfert était souhaité depuis de nombreuses années. « Les conditions d’accueil dans la ville n’étaient pas optimales », a résumé Sonia Lagarde, maire de Nouméa, « fière » de pouvoir enfin inaugurer ce nouveau centre lundi, aux côtés des représentants de l’État et de la province Sud. Les locaux municipaux rue de la Somme étaient clairement devenus vétustes et inadaptés et la mairie, avec ses partenaires du CHRS (Centre d’hébergement et de réinsertion sociale), cherchait un lieu pour relocaliser cette structure de jour. Mais les discussions avaient jusqu’alors toutes échoué jusqu’à ce que cette véritable opportunité émerge : l’association des anciens “ateliers protégés” s’est dissoute et les terrains de la mairie occupés à Doniambo ont été remis à disposition. « C’est alors qu’on a pu très aisément basculer Macadam Partage avec un véritable projet », poursuit Sonia Lagarde.

Paisibles et fonctionnels…

Le projet en question a bénéficié de fonds conséquents : 120 millions de francs au titre du contrat d’agglomération 2011-2016 dont 49 % pour la ville de Nouméa, 37 % pour l’État ; 14 % pour la province Sud. Et le nouveau centre, destiné à la réinsertion sociale des adultes en grande précarité, est « bien pensé », nous dit Patricia Gérard, la présidente de l’Accueil. « Les agents ont leurs bureaux séparés, le réfectoire est séparé également, chacun est bien dans sa zone de confort », ce qui apporte une certaine harmonie au lieu.

Les autorités ont également insisté sur le bénéfice d’une situation géographique dans la zone industrielle. « Les conditions sont réunies pour les amener vers la réinsertion, les inciter au travail, on n’est pas très loin de la ville et il y a ici sur place des entreprises qui peuvent avoir des besoins », a souligné la maire de Nouméa. Cela reste à prouver mais  « tant mieux si les partenariats se développent avec les entreprises alentours, répond Patricia Gérard. C’est que nous sommes bien reçus, car c’était une de nos craintes au départ », concède t-elle.

Trois travailleurs sociaux aident chaque jour les accueillis dans la recherche d’emploi. Ils les assistent également pour refaire leurs papiers, pour qu’ils aient un suivi médical. « On essaie de les accompagner dans leur projet pour qu’ils se réalisent », résume la présidente. Les SDF bénéficient également d’ateliers, manuels et pédagogiques, durant lesquels on leur apprend l’estime de soi, le respect. Au sein de cette nouvelle structure, ils se sont déjà approprié le jardin, dont les plantes ont été données par l’Institut agronomique calédonien (IAC). Un partenariat est par ailleurs établi avec la Société Saint-Vincent-de-Paul, tandis que la SLN a prêté main-forte en offrant symboliquement les briques qui forment l’entrée du centre.

… mais sous les fumées

Si ces locaux sont moins vétustes que les anciens, il ne s’agit pas pour autant de faire de la langue de bois. La décentralisation faisait d’abord craindre une grande déperdition, elle serait actuellement de 20 %, pour une population habituelle de 60 à 80 personnes. « Nous craignions d’en perdre beaucoup plus et nous avons bon espoir de les voir revenir », confie Patricia Gérard. Des navettes font le trajet matin et soir depuis la place Bir Hakeim. L’un des accueillis, Antoine, assure cependant que certains ne refont pas le trajet vers les centres de nuit de la Vallée-des- Colons (30 places pour les hommes, 7 pour les femmes) et dorment sur place. De fait, le souhait « le plus cher » des membres du bureau était que les centres de jour et de nuit soient au même endroit, mais le terrain ne s’y prêtait pas.

Autre inquiétude et pas des moindres, les fumées de la SLN : le centre est situé juste derrière l’usine. « Il y a beaucoup de problème avec la poussière et beaucoup d’entre nous ont déjà des problèmes de santé surtout nos vieux », explique Antoine qui souhaiterait voir l’installation d’un petit cabinet médical. Enfin, pensionnaires comme personnel se plaignent du manque d’ombre, mais des installations sont prévues à cet effet.
L’objectif en tout cas reste le même pour tous ceux qui se sont investis dans ce projet et qui s’investissent au quotidien : sortir ce public en détresse de la rue… Ils sont deux à trois par an à sortir des foyers.


« Tolérance zéro »

Nouméa a toujours entretenu une relation compliquée avec ses SDF. Régulièrement, les pétitions ont circulé pour voir ces personnes éloignées des logements et des commerces de la ville. En cause, « l’insécurité liée à la présence de ces sans domicile fixe », une image « ternie des quartiers »… L’association Accueil rappelle qu’elle applique une « tolérance zéro » pour l’alcool et les substances.

« Après, il y a ceux qui n’intégreront jamais nos foyers parce qu’ils ne sont jamais à jeun et c’est plutôt ceux-là qui causent nuisance et non ceux qui sont dans nos locaux, souligne Patricia Gé- rard. Seulement, les gens font un amalgame, ce sont des SDF donc ce sont forcément des gens à problème. Mais pas du tout. Ce sont simplement des gens en difficulté. Aujourd’hui, c’est eux demain, ça pourrait être nous. Ça peut arriver à n’importe qui, donc plutôt que de leur jeter la pierre, on ferait mieux de leur tendre la main. »


Réhabilitation des locaux du centre-ville

Le fait d’avoir sorti Macadam Partage du centre permet à la collectivité de pouvoir réaliser la réhabilitation de La France australe pour y loger les services de la culture. « Cela fait vingt ans que ce bâtiment est à l’abandon, qu’il se détériore. Il fait partie du patrimoine historique, donc c’est de notre devoir et il s’agira aussi de repositionner le service des archives qui est disséminé un peu partout dans la ville », précise Sonia Lagarde.

C.M.