L’institut Jeanne-d’Albret au pied du mur

Faute de subvention de la province Sud, l’institut Jeanne-d’Albret, internat pour jeunes filles, indique qu’il pourrait fermer l’année prochaine après presque 90 ans d’activité. Selon ses responsables, la province Sud ne serait plus non plus intéressée pour reprendre l’établissement par le biais d’une donation.

« Pratique », « bien situé », « bien équipé », « bien encadré » … les filles de Jeanne-d’Albret, à l’instar d’AlidaLengsau, ne tarissent pas d’élogessur leur établissement et sont inquiètes pour l’avenir. Certaines d’entre elles n’ont pas encore fini leur cursus et pourraientdevoir trouver un autre logement dès la rentrée prochaine.

Bien connu des Calédoniens de Brousse, l’établissement installé boulevard Vauban, dans la vieille maison coloniale de John Higginson, avait été créé par plusieurs grandes familles avec l’aide de la paroisse protestante. Il accueille actuellement 56 jeunes filles dont 17 en « internat d’excellence ». Les élèves, venues de Brousse, des Îles voire du Vanuatu suivent leur scolarité dans les lycées à Nouméa ou dans les communes de l’agglomération, mais rentrent chaque soir étudier et dormir à Jeanne-d’Albret où elles bénéficient d’activités, de soutien scolaire. Ici le taux de réussite atteint 90 %.

Subvention enlevée…

Mais l’avenir de Jeanne-d’Albret est en suspens. Ses responsables expliquent avoir été notifiés, début novembre, par la province Sud que la subvention prévue pour 2018 ne serait pas versée. «Il a été estimé que l’établissement avait suffisamment de ressources pour l’année prochaine », précise Jeanine Gayon, membre du conseil d’administration, qui n’est visiblement pas de cet avis. Pour fonctionner, dit-elle, l’établissement a besoin chaque année de 25 millions de francs de budget et la subvention de la province Sud s’élève à 10 millions. Il lui reste certes 23 millions de francs en épargne qui doivent permettre de se retourner, mais seulement 8 millions en fonctionnement. Sans rentrée d’argent durant les grandes vacances, il sera compliqué, dit-elle, de joindre les deux bouts malgré l’apport constant de donateurs traditionnels.

… et donation avortée

Les partenaires de Jeanne-d’Albret accusent le coup et pensent avoir été « traités avec mépris » par la collectivité. Car déjà au mois d’octobre, ajoutent-ils, la province Sud avait fait savoir qu’elle ne souhaitait plus reprendre l’établissement par le biais d’une donation pour en faire un internat d’excellence à part entière, soit provincial soit territorial. « Elle préfère construire son propre internat sur la commune de Dumbéa et se concentrer sur les collèges, relevant de sa compétence. »

Cette option avait été discutée depuis le mois de mars et pensant à un aboutissement « heureux », l’équipe de Jeanne-d’Albret avait engagé une remise aux normes pour livrer un « bâtiment impeccable ». « Nous avons fait les peintures, nous sommes passés au photovoltaïque, nous avons effectué un diagnostic amiante et les services de l’équipement sont même venus », détaille Jeanine Gayon. « Depuis le début, nous avons vraiment l’impression d’avoir été bien promenés. On leur reproche de ne pas avoir été francs », ajoute la directrice, Mathurine Wéa.

Au pied du mur, l’institut lance donc un appel aux dons (provinces, associations, etc.) pour 2019 « afin que les internes puissent finir leur cycle ». Et pour la suite, elles espèrent trouver une solution « durable et pérenne  », quitte à passer la main, envisager un nouveau mode de gouvernance… « À l’heure où l’on parle constamment de soutenir la jeunesse, il faut réaliser que c’est dès maintenant qu’il faut le faire, pas demain ! », conclut Jeanine Gayon, qui tient à ce que « l’héritage soit transmis » et pas que le bâtiment – et son histoire – disparaisse « sous les coups de pelle d’un promoteur ».

La province n’est visiblement pas fermée aux discussions puisque les responsables de l’institut seront reçus ce jeudi matin. Elle n’a pas souhaité répondre à nos sollicitations.

C.M.