Les établissements publics passés à la moulinette

En décembre dernier, le Congrès a examiné le rapport d’activité 2017 des établissements publics de la Nouvelle-Calédonie. Un état des lieux qui montre les difficultés de certains d’entre eux et plus généralement l’assèchement des ressources, en particulier pour les établissements à vocation culturelle.

Les établissements publics font régulièrement l’objet de fortes oppositions entre les groupes politiques. Ces structures publiques disposent d’une certaine autonomie financière leur permettant de remplir des missions d’intérêt général. Elles sont aussi diverses qu’importantes pour l’économie de la Nouvelle-Calédonie et font intégralement partie du quotidien des Calédoniens. OPT, ADCK, Port autonome, Chambres consulaires, bibliothèque Bernheim ou encore Ocef : les établissements publics sont aujourd’hui au nombre de 28 et assurent des missions extrêmement variées. Pour remplir ces missions d’intérêt général, ils reçoivent directement ou indirectement des financements publics. Avec l’assèchement des recettes publiques, certains établissements ont été touchés de plein fouet.

C’est notamment le cas des établissements à vocation culturelle qui ont dû faire face à une baisse de dotations importantes nécessitant de profondes réorganisations. Ainsi, l’Agence de développement de la culture kanak (ADCK), gestionnaire du centre culturel Tjibaou qui dispose d’une autonomie financière relativement faible de l’ordre de 10 %, est aujourd’hui prise à la gorge, tenue par des coûts d’entretien d’un bâtiment qui représentent près de 58 % d’un budget inchangé depuis 10 ans. Pour 2018, les participations de l’ensemble des collectivités étaient tout de même en baisse de 66 millions de francs. Comme le soulignent les perspectives du rapport de l’ADCK, « le secteur culturel est dans une spirale de décroissance préoccupante ».

La culture prend le bouillon

Il en est de même pour la bibliothèque Bernheim dont l’autonomie financière est de 2 %. L’établissement connaît de gros problèmes financiers, tout comme les autres structures et notamment en province Nord où les dotations ont également très fortement chuté. Pour la bibliothèque, signe que les choses vont mal, il n’y a eu aucun budget d’acquisition, plus d’abonnement aux périodiques et plus d’achat de CD. Ces restrictions budgétaires ont conduit à une réorganisation complète en interne et à l’obligation pour le personnel de mutualiser les moyens et développer la polyvalence.

Le Conservatoire de musique et de danse a également été fortement impacté avec un budget en baisse de plus de 107 millions de francs en 2018. Révision des programmes à la baisse, fin de certains dispositifs de formation, limitation du nombre de concerts, redimensionnement des partenariats tels qu’avec l’Afmi, réduction de la masse salariale… Un plan de redimensionnement est prévu cette année, comme le précise le rapport du Conservatoire. Pour les populations les plus éloignées de Nouméa, l’accès à la formation musicale risque donc d’être de plus en plus compliquée.

De nouvelles réformes pour la CLR

Dans un domaine tout à fait différent, les choses ne vont pas forcément mieux. Exemple, à la Caisse locale de retraites (CLR) qui verse les pensions de la fonction publique territoriale. Et pourtant, une réforme avait été validée en 2014 pour lui donner un nouveau départ et un horizon à 2040. Dans le plan figuraient une baisse des prestations servies, une hausse des cotisations ainsi qu’un plan d’intégration et de recrutement de la fonction publique afin de rétablir un équilibre entre le nombre de cotisants et de retraités, qui est de l’ordre de deux actifs pour un retraité. C’est d’ailleurs une des principales explications de la hausse des recrutements dans la fonction publique à laquelle on a pu assister depuis 2017, et ce, malgré des budgets plus contraints.

Si le nombre de fonctionnaires est souvent mis à l’index, c’est bien le Congrès qui a voté cette augmentation en 2014. Selon les derniers chiffres, la Calédonie compte environ 90 fonctionnaires pour 1 000 habitants, un niveau très proche de celui de la Métropole, pas très éloigné de celui des États-Unis (un peu plus de 70), mais nettement inférieur aux pays d’Europe du Nord, comme la Suède, qui en compte 138 pour 1 000 habitants, le Danemark et ses 142 fonctionnaires ou encore 159 pour la Norvège, en tête du classement.

Mais outre le fait que la Nouvelle-Calédonie se charge de nouvelles dépenses incompressibles sans consensus sur le besoin de nouveaux fonctionnaires, la réforme pourrait déjà bien être au bout. C’est du moins ce que suggère la CLR dans son rapport. La caisse relève notamment que l’âge moyen de départ à la retraite, qui devait idéalement être de 60 ans, régresse pour atteindre 56 ans en 2017. Un élément qui met à mal les équilibres. Le plan d’intégration et de recrutement devrait se poursuivre encore trois ans, mais la caisse pourrait avoir à réformer une nouvelle fois dès cette année en revoyant notamment les taux de cotisations salariales et l’âge de départ.

M.D.

©Marc Le Chelard/ AFP