L’épidémie passe à la vitesse supérieure

L’épidémie de dengue gagne du terrain. Pour faire face à ce qui s’annonce déjà comme une catastrophe sanitaire, les autorités ont décidé de renforcer le nombre d’équipes sur le terrain. Le plus important est de se protéger et de protéger les autres.

Cent mille cas… C’est le nombre de Calédoniens qui pourraient être contaminés au cours de cette épidémie de dengue qui promet d’être particulièrement virulente. Une épidémie que l’on voit lentement se développer depuis le début de l’année et qui présente la particularité de regrouper trois épidémies en une. Contrairement aux épisodes infectieux classiques, les trois types de dengue sont simultanément en circulation, ce qui la rend d’autant plus dangereuse. Face aux risques, qui ont déjà conduit aux décès de deux jeunes femmes, mais surtout à la multiplication des cas, les collectivités ont décidé de mettre en œuvre une deuxième phase d’action.

Pour près de 60 millions de francs, le gouvernement et la province Sud vont mobiliser sur le terrain 85 agents supplémentaires. La province mettra à disposition de la Dass et des différents services municipaux 60 PPIC. Dix agents du service civique, dix pompiers volontaires de la Sécurité civile ainsi que cinq infirmiers de la Dass seront également mis à contribution pour constituer des équipes opérationnelles sur le terrain. Leur but sera de faire du porte à porte, à l’instar des équipes qui interviennent déjà sur le terrain afin de dépister les malades et lutter contre les gîtes larvaires.

Un coût de la dengue très lourd

La Direction des affaires économiques est également mise à contribution afin de s’assurer que les commerçants n’aient pas la tentation d’augmenter le prix des répulsifs, ce que l’on constate malheureusement très fréquemment et qui est d’autant plus grave que les produits répulsifs et des tortillons sont réglementés. Le gouvernement travaille à encadrer celui des plaquettes murales, au moins de manière temporaire. La DAE a également la charge de voir avec les pharmacies et les autres détaillants si leurs stocks sont suffisants, ce qui est loin d’être le cas partout. Pour pallier le problème, la Dass a elle-même fait ses stocks. Elle dispose de 20 000 bombes de répulsifs qu’elle distribuera dans les centres médico-sociaux et auprès des familles nécessiteuses. Des autorisations parentales vont enfin être sollicitées afin que des séances d’application de répulsifs puissent être faites dans les établissements scolaires.

Toutes ces actions ont un coût qui vient s’ajouter aux près de 300 millions de francs dépensés chaque année pour lutter contre l’arbovirose. Il faut aussi ajouter le coût social lors de l’absence des salariés au travail notamment et le coût sanitaire. Les analyses sérologiques ne sont d’ailleurs plus pratiquées. Seuls les quinze médecins du réseau sentinelles les pratiquent encore et chaque test coûte 10 000 francs. On peut toutefois s’interroger sur l’absence d’accord permettant d’accéder à ce type de test à moindre coût. Mais au-delà, le résultat est que l’on dispose de chiffres qui ne sont pas véritablement représentatifs de ce que peut être l’état de la maladie sur le territoire. Dans tous les cas, la meilleure et la première chose à faire est de se protéger, ce qui permet au passage de protéger les autres.


Des solutions dans la lutte contre le moustique 

©eliminate dengue 

Lutter contre la maladie passe par la lutte contre son vecteur : le moustique. Pour cela, il existe
différentes solutions. La première est bien sûr d’éviter l’élevage chez soi en supprimant tous les petits endroits susceptibles de retenir de l’eau et de servir de nid. Pour la première fois, en partenariat avec la mairie de Nouméa, la Dass teste une solution permettant de limiter la prolifération des moustiques en agissant sur les larves. Les agents pulvérise du Bacillus Thuringiensis Israelensis, plus simplement appelé BTI. Cette toxine bactérienne, une fois dans les eaux de ponte, empêche les larves de se développer. D’autres biocides sont utilisés de manière sensiblement différente qui ne sont pas testés en Calédonie. Le pyriproxyfène peut être placé dans un piège qui servira à contaminer la femelle. Une fois contaminée, celle-ci ira contaminer tous ses lieux de pontes, pour elle mais aussi tous les autres moustiques.

Il existe également des pièges relativement efficaces et qui commencent à être installés un peu partout en métropole. L’idée est de capturer le moustique grâce à un système de production de CO2. Si ces solutions ne sont pas testées en Calédonie, la Dass en partenariat avec l’Institut Pasteur ou l’Université réfléchissent à un projet très prometteur : introduire en Calédonie un moustique infecté par une bactérie qui viendrait remplacer l’Aedes. L’avantage est que le nouveau moustique ne serait plus vecteur de maladies. La mise en œuvre de ce projet est prévue pour 2018.

M.D.