Législatives 2017: Les enseignements du premier tour

Backes contre Dunoyer à Nouméa et dans les Îles ; Gomès contre Mapou sur la Grande terre moins la ville. Le casting des duels du second tour est désormais posé et repose sur le report des voix à droite et chez les non-indépendantistes…

Participation au plus bas. – Malgré un taux de participation décevant pour toute la classe politique (33,9% dans la première et 37,1 dans la deuxième), les électeurs calédoniens ont tranché. Dans la première circonscription, Sonia Backes sort vainqueur de la primaire à droite et au centre et affrontera Philippe Dunoyer, le candidat Calédonie ensemble, arrivé premier au score mais ne disposant plus de réserves de voix.

Dunoyer au taquet. – Avec 27,9% des suffrages, soit un peu plus de 7 700 voix, le candidat de Calédonie ensemble vire en tête à Nouméa et dans les Loyauté. Mais la faiblesse de la participation tempère cette première place, d’autant qu’il ne bénéficiera au second tour d’aucun apport de voix supplémentaire. A moins de les monnayer chez les indépendantistes, comme Philippe Pentecost en 1997… ce qui lui avait valu une défaite face à Jacques Lafleur. A-t-il pour autant fait le plein de ses voix : mathématiquement non, puisqu’il en perd par rapport au dernier scrutin législatif de 2012. Mais nul n’est bien évidemment propriétaire de ses suffrages…

Backes emporte la primaire… – Face au candidat de Calédonie ensemble, qui devra maintenant assumer le lourd bilan économique du gouvernement auquel il collabore, Sonia Backes réussit la plus belle opération de ce scrutin, puisqu’elle emporte « la primaire des Républicains » sans autre appareil politique que sa bonne foi et se place en pole position d’éligibilité à la députation…si chacun joue le jeu. Avec 17,3% des suffrage, elle dame le pion de l’ex-député (lui aussi sans appareil) Gaël Yanno (15,8% des voix). Surtout, elle efface le cacique du Rassemblement, soutenu par le sénateur Frogier et par François Fillon en son temps, qui n’a totalisé que 14% des suffrages, malgré l’expérimentée machinerie du parti à son service… « J’endosse ma responsabilité dans ce résultat », a dit Bernard Deladrière très fair play : un mea culpa tout à son honneur et qui présage d’un bon report de voix sur sa vainqueure…

… Et se place pour la suite. – Candidate affichée de la Calédonie dans la France, elle conserve une crédibilité intacte, qui l’a empêchée d’être taquinée par le vote FN, qui se tient à 6,75% dans la première circonscription, comme Harold Martin dont les voix loyalistes ont été siphonnées par Bianca Hénin. Mesurée et modeste dans sa victoire, qui appelait à l’union des forces républicaines venues en ordre dispersée à ce scrutin, Sonia Backes a d’emblée trouvé le ton juste pour parler à sa famille… Ajoutons à cela que la députée-maire de Nouméa n’a toujours pas envoyé le moindre message de « sympathie » à l’attention du successeur autoproclamé de son parti : Philippe Dunoyer ! Le ferait-elle cette semaine, ce serait pire encore…pour lui.

Le Ouf de Gomès. – Dans la seconde circonscription, Philippe Gomès peut pousser un « Ouf » de soulagement : il arrive second avec 23,45% des suffrages contre Louis Mapou, premier avec 30,1% et 11 370 voix, malgré le prétendu boycott de l’UC. Et même si le leader ne perd pas tout à fait « la moitié de ses voix », comme l’affirmait, hier soir, Harold Martin sur RRB, il décroche de 10 points en pourcentage par rapport à 2012. Et ses voix s’éparpillent.

Il manquait un chouilla à Martin. – Harold Martin, qui avec ses révélations sur les « machiavéliques projets d’indépendance-association de Christnacht et Gomès » a pimenté la campagne de la 2e circonscription, n’a recueilli que 15,4% des suffrages. Dans le même temps le Front national de Bianca Hénin a réalisé son meilleur score à une législative, avec 11,7% des voix. La campagne du maire de Païta a aussi profité aux frontistes, dopés par le score de Marine Le Pen sur la côte Ouest et dans l’agglo, c’est clair !

Merci qui ? – Philippe Gomès doit dire « merci » à Gil Brial et à ses 10% de suffrages, qui ne sont pas allés à Harold Martin. Comme Harold Martin doit dire merci à son ancien porte-parole du gouvernement, Pascal Vittori qui a réuni 6,8% des suffrages. Sans ces deux candidatures… Résultat : Philippe Gomès croisera donc le fer avec Louis Mapou, comme il l’avait fait avec Jean-Pierre Djaïwé il y a cinq ans. Sauf que Louis Mapou bénéficie sur le papier de la possible mobilisation des électeurs de l’UC, qui ne se seraient pas déplacés pour ce tour de scrutin : une belle réserve en somme.

A la merci des reports. – Alors que Philippe Gomès doit compter sur le report de voix des non-indépendantistes, qui l’accusaient de préparer l’indépendance-association : belle gageure, non ? Mais que vaudrait aujourd’hui une consigne de vote en faveur de Philippe Gomès, de la part d’un Harold Martin, d’une Bianca Hénin ou même d’un Pascal Vittori. Un reniement ? Ils le savent bien…

Sincérité. – Pour mémoire et réflexion, en 2012 les seconds du premier tour de scrutin l’avaient emporté au deuxième : qu’il s’agisse de Sonia Lagarde dans la première ou de Philippe Gomès, dans l’agglo et la brousse. L’histoire se répètera-t-elle ? Sur le papier c’est une évidence. Mais tout dépendra des reports de voix et de leur sincérité.

M.Sp.