Le projet éducatif prend forme

Plus de 68 000 élèves ont repris cette semaine le chemin de l’école, de la maternelle au post-bac. Si tous n’en ont pas encore forcément conscience, cette rentrée, qualifiée d’« historique », est marquée par le début de la mise en œuvre concrète du fameux projet éducatif de la Nouvelle- Calédonie, en marche donc vers l’école de demain…

Savoureux mélange d’excitation et d’appréhension, la rentrée des classes est toujours un grand moment dans la vie des élèves. Mais l’émotion était toute particulière, lundi matin, au lycée du Mont-Dore. Pour donner vie à ce bel établissement, flambant neuf, il y avait là les nouveaux élèves, bien sûr, leurs parents, leurs professeurs, mais également toute la représentation locale : le vice-recteur, le président du gouvernement, le député… Il faut dire que l’ouverture du lycée revêt tout un symbole.

Du Mont-Dore à Pouembout

Plus exactement, un symbole de rééquilibrage dans le respect des engagements de l’Accord de Nouméa. « Ça nous ramène des années en arrière, quand, avec Jean-Yves Lemenand, on s’était dit que les enfants du Mont-Dore n’avaient pas toutes les chances de réussite à cause des déplacements, des transports… », s’est souvenu le maire de la commune, Éric Gay. Progressivement, l’idée de ce lycée de « proximité » a pris corps et il a fallu convaincre l’État (qui l’a financé à 100 % à hauteur de 5 milliards de francs) jusqu’à la prise de décision finale en 2009. Puis, la rentrée a été repoussée d’un an, pour se faire finalement (presque) sereinement cette année pour plus de 300 élèves, avec un objectif à plus de 800 élèves à l’horizon 2019. Cette création va effectivement permettre d’accueillir les élèves provenant des quatre collèges publics de la zone sud (Boulari, Plum, Yaté, Normandie) et de désengorger les trois lycées de la province Sud.

« Une belle opportunité » selon les mots du vice-recteur, Jean-Charles Ringard- Flament, qui ajoute qu’au-delà de la proximité, « c’est aussi une réponse en matière de spécialités puisque des axes de formation, qui n’existaient pas sur le territoire, sont proposés en particulier sur les systèmes numériques et le développement durable ». Dans cette même logique de rééquilibrage, on ne peut pas penser au Mont-Dore sans citer l’extension du lycée Michel-Rocard, lycée agricole et général, bientôt professionnel, de Pouembout, nommé en hommage à l’ancien Premier ministre sous l’autorité duquel avait été décidée la réalisation de cet établissement. Les travaux de rénovation et d’extension financés à hauteur de 5,7 milliards de francs par l’État, vont permettre de recevoir 950 jeunes d’ici 2019 avec, là aussi, une nouvelle offre de formation. À terme, ce seront près de 1 500 élèves qui seront accueillis dans les filières, technologiques et professionnelles proposées dans ces deux établissements.

Le proviseur du nouveau lycée du Mont-Dore, Gabriel Loaec, accueille ses élèves.

Ouverture sur notre environnement et notre région

On a longtemps entendu parler du fameux projet éducatif de la Nouvelle-Calédonie, instauré au Congrès, l’année dernière. Le voilà donc qui se concrétise de maintes façons : à travers l’ouverture de ces lycées, à travers également l’augmentation sur l’ensemble du territoire des capacités d’accueil en CAP (104), bac pro (219) et BTS (217) permettant aux élèves d’accéder plus largement aux formations de leur choix ou encore par l’ouverture d’un Pôle espoirs rugby, un outil de performance et de très haut niveau qui viendra compléter l’offre de formation du lycée du Grand Nouméa (qui compte déjà les pôles de natation, de handball, de judo et de karaté).

Autre élément essentiel et pour le moins historique : la mise en place obligatoire des éléments fondamentaux de la culture kanak et du développement des langues kanak. Cette rentrée voit naître un premier parcours d’enseignement de la culture kanak de 18 heures par an, à l’entame de chaque cycle d’enseignement du secondaire (6e, 1re année de CAP, 2nde). Cette année sera l’occasion d’ouvrir les chantiers pour déployer un tel programme, de la maternelle au lycée, et de poursuivre l’enseignement des langues kanak au collège avant de l’étendre au lycée (avec l’ajië, le drehu, le nengone et le paicî en option au bac).

Le projet éducatif se développe, par ailleurs, avec la mise en place de sections internationales franco- australiennes (Sifa) au collège de Dumbéa-sur-Mer et à Baudoux. Ce sont les premières du territoire républicain et les premières entre la France et l’Australie. 46 élèves sont accueillis dans ces classes de 6e Sifa avec un programme de quatre heures de langue, littérature et culture australienne et deux heures d’histoire et de géographie australienne, le tout en anglais. Tous pourront prétendre au diplôme national de brevet, option internationale (DNBI), à la fin de la 3e pour poursuivre ensuite leur cursus en section internationale au lycée et obtenir l’option internationale du baccalauréat (OIB), gage certain d’ouverture sur la région et sur le monde.

Une correction du bac en local

Le sujet avait été largement débattu, c’est désormais acté : la correction du bac s’effectuera localement dès cette année. Objectif avancé : « la reconquête du temps scolaire pour tous » et le fait de « légitimer l’action pédagogique des enseignants ». Inutile de revenir sur cette décision, qui a fait couler beaucoup d’encre, indiquons simplement que quatre garanties sont apportées par le vice-rectorat en cette rentrée. Pour « l’objectivité de la correction », les sujets restent élaborés en métropole comme la grille d’évaluation, et le déroulement des corrections se fera en « loge » (tous les correcteurs seront convoqués au même endroit, au même moment et recevront tous les mêmes consignes). En ce qui concerne « l’anonymat des copies », il est précisé que compte tenu des « modalités de brassage des copies » notamment, « aucun enseignant ne pourra corriger une copie d’un de ses élèves ». Le vice- rectorat d’ajouter qu’une mission d’Inspection générale de l’éducation nationale (IGEN) attestera du bon déroulement des épreuves sur le plan réglementaire et opérationnel et que la délivrance du diplôme se fera par un recteur d’académie de métropole « afin de garantir, la valeur nationale du diplôme et de faciliter l’inscription des jeunes bacheliers calédoniens dans les universités ». Une bonne nouvelle, en espérant que ces garanties résistent à l’épreuve du temps.

Travail sur la réforme des collèges

Autre priorité cette année, la préparation de la réforme des collèges, dont l’application est prévue pour la rentrée 2018. Elle impliquera, on le rappelle, une nouvelle organisation des enseignements, des cycles, des programmes. On parle en particulier d’un nouveau cycle 3 qui comprendra le CM1, le CM2 et la 6e – à cheval entre l’école primaire et le collège – d’une nouvelle prépa pro, d’une nouvelle Segpa, etc. Des réflexions et des expérimentations doivent encore être menées, du personnel formé et cette année s’annonce très dense pour les acteurs concernés. En 2018, la nouvelle organisation du collège entrera en vigueur, « pour tous les niveaux d’enseignement, de la sixième à la troisième, dans tous les collèges ».

Des résultats

Ne nous y trompons pas, ces innovations, mises bout à bout, vont transformer en profondeur notre système éducatif. Et chaque année, désormais, différents objectifs vont être mis en œuvre à partir de la feuille de route que constitue la charte d’application du projet éducatif de la Nouvelle- Calédonie. C’est ce pour quoi se sont positionnés les élus, ce pourquoi ont travaillé les acteurs de l’éducation, des enseignants aux syndicats. « On est dans une phase historique dans le sens ou une décision politique trouve sa traduction quasi immédiate dans l’année qui suit, conclut le vice- recteur. Et c’est important de passer ce message à la population : les discussions sur le projet éducatif ont été longues, maintenant il ne s’agit plus discuter, il s’agit de mettre en œuvre. » Jean-Charles Ringard- Flament de promettre de se porter « garant » de l’application de ces mesures et d’espérer que l’on verra rapidement « un impact positif des décisions que les élus ont prises ».


Les Chiffres

68 158 élèves de la maternelle au lycée

27 280 élèves dans le premier degré public

7 432 élèves dans le premier degré privé

23 034 élèves dans le second degré public

9 887 dans le second degré privé

525 élèves dans le privé hors contrat

Le public accueille 23 034 élèves (70 %), le privé 9 887 (30 %)

16 milliards consacrés à l’éducation pour le premier degré par la province Sud.

La ville de Nouméa, à elle seule, compte 9 700 écoliers dans 51 écoles publiques maternelles et élémentaires, dont 13 dites prioritaires (plus de 45 % de boursiers), et 425 classes. Plus de 400 enfants ont des parents qui résident en dehors de la commune, soit l’équivalent des effectifs de deux écoles primaires.


Évolution des effectifs

Les effectifs d’élèves en collège et lycée sont en légère progression avec une croissance prévisionnelle de 178 élèves pour atteindre 32 921 jeunes. Ils baissent légèrement dans les collèges (-1,9 %, – 344 élèves) et ils augmentent en lycée (+111 élèves et + 142 en lycée professionnel) avec l’ouverture du lycée du Mont-Dore et l’extension du lycée agricole et général de Pouembout. En post-bac, la progression est importante avec + 269 élèves (+ 17, 2%).


Sécurisation des établissements

 Le vice-rectorat annonce avoir pris une série de mesures spécifiques visant à anticiper et se prémunir contre les risques (y compris le risque « terroriste », dit-il, même s’il est « faible ») auxquels peuvent être soumis, élèves et personnels des collèges et lycées. Une convention de partenariat a été signée entre le vice-rectorat et la Direction de la sécurité publique sur le renforcement des échanges d’information, les actions de prévention à mener avec la police nationale et sur la lutte contre les faits de délinquance et de violence aux abords des établissements (en particulier contrer la vente et la consommation de produits stupéfiants). Une convention de même nature doit être signée avec la gendarmerie nationale. Des propositions propres à chaque établissement scolaires vont être faites pour améliorer encore la sécurité. La révision du plan particulier de mise en sûreté (PPMS) de tous les établissements sera achevée dans les prochaines semaines. Un protocole de « gestion de crise » a par ailleurs été transmis à tous les établissements scolaires et une cellule de gestion de crise constituée au vice-rectorat pour faire face à toute situation d’urgence particulière. Les autorités seront notamment attentives « aux attroupements préjudiciables à la sécurité des élèves », au respect de l’interdiction de fumer dans les établissements et rappellent que la présence des chefs d’établissement à l’entrée des collèges et des lycées est « plus que jamais un impératif ».
Notons qu’à compter de cette rentrée, tous les élèves des collèges publics auront bénéficié, avant la fin de la 3e, d’une formation « aux gestes qui sauvent » ou au PSC1.


« Innov école » à Paul-Duboisé

©P.Sud/F. Wenger

À l’occasion de la rentrée scolaire, le président de la province Sud s’est rendu à l’école Paul-Duboisé de Katiramona où l’équipe éducative s’engage dans un projet pilote. À travers son projet « Innov école », cette équipe va mener des expérimentations sur les rythmes scolaires, l’épanouissement des élèves (activités proposées l’après-midi sur le temps scolaire et périscolaire, accompagnement à la scolarité…), la santé à l’école, sur les relations avec les partenaires de l’école et sur la valorisation du patrimoine touristique et culturel de la Nouvelle-Calédonie. Il y aura par ailleurs un conseil d’école, et une liaison avec l’école maternelle Les Colibris (grande section/CP) et le collège Jean-Fayard (CM2/6e). Objectifs généraux : améliorer l’encadrement des enfants, renforcer l’autonomie de l’école, et dynamiser son fonctionnement.


Nouvelle école catholique à Dumbéa-sur-Mer

©Ddec

La Direction diocésaine de l’école catholique était également heureuse d’ouvrir sa nouvelle école au lotissement Brigitte, à Dumbéa-sur-Mer. L’établissement flambant neuf accueille les élèves de la petite section de maternelle jusqu’au CM2. La capacité d’accueil est d’environ 180 élèves pour six classes de maternelle et 280 élèves pour dix classes de primaire. Situé sur un terrain cédé gratuitement par la province Sud, le groupe scolaire s’intègre dans un environnement de 2 300 m2. Les thèmes comme l’eau, l’environnement, la gestion des déchets et la prévention routière y sont des aspects particuliers relève la Ddec.


L’uniforme pour tous les écoliers de la province Sud

Du changement dans les garde-robes de tous les écoliers de la province cette année, soit 20 600 enfants. Les kits comprenant cinq polos, une veste polaire et une surveste imperméable sont modélisés par la société locale IPC. Le coût unitaire du pack est de 4 450 F. Les commandes peuvent se faire sur le site wwww.tenue-commune.nc ou directement au dock de la société au 21 rue Lavoisier à Ducos. Les packs seront livrés directement dans les écoles du 27 au 31 mars et du 18 au 24 avril.

 

C.M.

©CM/P.Sud – F.Wenger/ Ddec