Le goût de bien manger

Semaine du goût, Journée de la prise en charge de l’obésité… Hasard du calendrier, ces deux rendez-vous se déroulent la même semaine. L’obésité est un véritable fléau qui touche plus d’un Calédonien sur quatre. Davantage de prévention et une meilleure prise en charge devraient permettre de lutter contre cette maladie qui ne cesse de gagner du terrain.

Manger est une nécessité que l’homme a transformée en plaisir. Un plaisir qui est devenu une catastrophe pour une grande partie de la population. Selon le baromètre santé de 2010, 54 % de la population est en surpoids. Un chiffre inquiétant qui pourrait avoir explosé en cinq ans. Les prochains chiffres du baromètre devraient être disponibles l’année prochaine et montrer une importante détérioration de la situation, même si nous ne sommes probablement pas encore au niveau des Samoa américaines où les problèmes de surpoids touchent de 80 % de la population.

« Il faut s’attendre à un tsunami d’obésité, prévient Frédéric Lemaître, attaché de recherches cliniques pour la clinique île Nou-Magnin à l’initiative de la Journée de la prise en charge du surpoids et de l’obésité le vendredi 9 octobre, en partenariat avec le groupe de recherche d’études médico-sportif. On parle d’épidémie, certains parlent même de pandémie, c’est-à-dire que l’on ne contrôle plus. » En Calédonie, 15 % des enfants sont obèses et, statistiquement, la moitié le restera à l’âge adulte. Un constat qui pose plusieurs problèmes à commencer par celui de la santé publique.

Un risque pour le système d’assurance maladie 

Diabète, hypertension, augmentation des risques de cancer, AVC ou encore insuffisance respiratoire… Les conséquences ou les maladies associées à l’obésité sont innombrables et l’on estime qu’elles diminuent l’espérance de vie de sept ans. Cette multiplicité des pathologies implique un traitement pluridisciplinaire, comprenant notamment l’intervention d’un psychologue, d’un coach et d’une diététicienne. L’obésité est d’ailleurs considérée comme une maladie et un handicap à part entière qui cause la mort de 320 000 personnes en Europe, la deuxième cause de décès évitable après le tabagisme.

Il en découle directement un coût de la prise en charge important, voire davantage. « La Direction des affaires sanitaires et sociales avait prévu de réaliser une étude de coût mais cela a été mis en stand-by, relève Frédéric Lemaître. Pour l’obésité, on estime que l’on a à peu près les mêmes dépenses de santé par habitant qu’aux états-Unis. » Un rapport du docteur Nathalie Deboucher du CHT de 2012 fait état d’un coût de 2 à 6 % du total des dépenses de santé. Des chiffres de l’Organisation mondiale de la santé qui datent de 2002 et pourraient être nettement plus importants aujourd’hui, d’autant plus en Calédonie si l’on considère le poids du diabète et des Evasans. « Il y a un vrai risque de mettre en péril le système d’assurance maladie, assure Frédéric Lemaître. D’où l’intérêt de l’organisation d’une journée dédiée à la prise en charge afin de regrouper les professionnels et de faire le point sur la maladie et sa prise en charge. »

Le fléau de la malbouffe

Mais au-delà de la prise en charge se pose la question de la sensibilisation des populations. Depuis près de sept ans, l’Agence sanitaire et sociale a lancé la campagne de prévention « Mange mieux, bouge plus ». Même si cela ne se traduit pas dans les chiffres, Frédéric Lemaître estime que toute prévention est bonne à prendre à long terme. Il n’en reste pas moins que les habitudes alimentaires de Calédoniens se sont dégradées et que les efforts en matière de prévention restent relativement modestes. C’est en particulier le cas dans les cantines où les produits frais sont plutôt rares.

« Notre objectif est de marquer le coup et de montrer qu’il y a des produits frais et pas que des poissons carrés, explique Fabrice Louyot, responsable de l’antenne locale des Disciples d’Escoffier qui relaye la Semaine du goût du 5 au 9 octobre. La malbouffe est un vrai fléau. Nous avons mis des fast-foods à côté de chaque école… On peut y aller, mais trop souvent, c’est dangereux ».

Pour Sabine Martinez, l’enseignante de la section moyens-grands de l’école des Capucines, cette initiative est importante. Elle lui permet notamment de travailler sur les bonnes habitudes alimentaires. « Nous avons fait un projet dont la finalité était de transformer la classe en restaurant. Nous sommes allés au marché et avons cuisiné en classe, note l’enseignante. Les parents étaient là et se sont investis. Leur présence est importante. C’est important pour les sensibiliser et leur faire découvrir les fruits et les légumes. » Une manière d’en finir avec les « beurk, j’aime pas », avant même d’avoir goûté.  

La Journée de la prise en charge du surpoids et de l’obésité se tiendra vendredi 9 octobre au Méridien, de 8 h à 18 h 15. Elle s’adresse en particulier à toutes les personnes concernées par la prise en charge de l’obésité et du surpoids.

Texte et photo : MD 

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La chirurgie, une des solutions, pas un miracle

La chirurgie, plus connue sous le nom de sleeve, est une des solutions pour traiter la maladie. Mais attention, il ne s’agit pas d’une solution miracle. Comme toute intervention chirurgicale, elle comporte des risques et présente l’énorme inconvénient d’être irréversible. Il faut également savoir qu’elle n’est pratiquée que chez des personnes présentant une obésité sévère et morbide. D’autres critères sont également requis, comme l’association d’autres pathologies comme le diabète par exemple. Suivis par un psychologue, les patients doivent aussi avoir essayé de changer sérieusement leur mode de vie pendant au moins six mois. À l’occasion de la Journée de la prise en charge, le professeur David Nocca, expert international de la question viendra faire une présentation sur les différentes techniques chirurgicales qui permettent d’obtenir de bons résultats.