Le Comité des signataires se rapproche, pas les positions des protagonistes…

Fixé au jeudi 2 novembre, le prochain Comité des signataires de l’Accord de Nouméa, premier de l’ère Macron, ne sera vraisemblablement pas le dernier avant le référendum d’autodétermination, tant il est vrai que les positions des acteurs du dossier sont éloignées et complexes à un an, exactement, du référendum.

La copie de l’État. – Sur la copie que discute l’État avec les groupes politiques calédoniens, figurent à l’heure actuelle pas moins de cinq points :

1-l’organisation du scrutin de 2018 ;
2-le corps électoral concerné par cette consultation ;
3-le rôle des observateurs de l’Onu ;
4-la conjoncture du nickel et l’accompagnement des pouvoirs publics ;
5-un bilan de l’Accord de Nouméa, pour finir.

Alors, on le comprend, certains points passeront comme des lettres à la poste : c’est le cas de l’organisation matérielle du référendum ; de l’accompagnement des entreprises du nickel… D’autres feront débat : d’autant qu’en filigrane du « programme officiel », certains vont tenter, comme chaque fois, d’avancer leurs pions à Paris.

La crédibilité des listes électorales. – Elle est nécessaire. Sur ce point, tout le monde est d’accord. Pour que le résultat du référendum soit incontestable, la liste électorale doit être irréprochable ou s’en approcher à quelques décimales près. Et si inscription automatique il doit y avoir, elle doit concerner autant les Kanak que les non-Kanak : une évidence, qui ne coulait pas de source il y a cependant quelques mois… Aujourd’hui, chacun s’accorde sur le sujet, même si, on le sait, la finalité des uns et des autres est sensiblement différente : arracher le maximum d’inscriptions automatiques, pour les indépendantistes ; limiter le recours aux procurations, pour les non-indépendantistes.

Le rôle de l’Onu. – Contestée au début par les loyalistes, l’expertise des missions de l’Onu a finalement freiné les ardeurs indépendantistes sur l’inscription automatique des Kanak. Petit à petit, l’Onu a trouvé sa place en Calédonie, sans contrarier les prérogatives étatiques, ni froisser les susceptibilités locales : « à force d’écoute, d’accompagnement et de conseils avisés », dit un « tuteur » de l’État des missions onusiennes, plutôt réticent au départ. Conséquence : un accord sur la liste référendaire devrait être possible, d’autant qu’un travail considérable a déjà été fait pour rapprocher les points de vue.

La question du référendum. – Profitant de cet élan pour le consensus, l’État cherchera à pousser l’avantage en tentant de mettre d’accord les signataires et les groupes politiques sur la question qui sera posée aux Calédoniens lors du référendum de 2018. Et là, les choses se corsent. Fidèle à la lettre de l’Accord, les Républicains calédoniens veulent s’en tenir à une question binaire : pour ou contre l’indépendance, puis ouvrir des discussions d’avenir une fois le scrutin passé. C’est pourquoi le score de la victoire du « Oui à la France » importe tant pour le groupe de Sonia Backes, car il fixera « l’amplitude de la marge de négociation » avec les indépendantistes. Des indépendantistes, qui sont grosso modo sur la même ligne d’un référendum binaire, « tel qu’il a toujours été prévu qu’il soit organisé », argumentent-ils.

On en reparlera plus tard – Au sein de la plateforme, Gaël Yanno défend également la même posture. D’autres, au sein du Rassemblement et de Calédonie ensemble, s’accommoderaient d’une question plus tarabiscotée, du style : « Oui à plus d’indépendance » ou « Oui à plus d’autonomie dans la France ». Une option, où « les perdants seraient moins perdants », disent-ils. Mais où les gagnants, ne seraient pas gagnants du tout !

C’est pourquoi, « une commission pour établir le libellé de la question du référendum » vient d’être constituée. Sa première réunion est fixée ce jeudi et elle aura jusqu’au mois de mai 2018 pour se mettre d’accord : « Faute de quoi, ce sera oui ou non à l’indépendance », ce que vient de confirmer, cette semaine, Roch Wamytan à la ministre des Outre-mer, Annick Girardin.

Le transfert de l’article 27. – Le sujet n’est pas officiellement à l’ordre du jour du Comité des signataires, mais pourrait resurgir dans les discussions. Bien évidemment les indépendantistes sont pour et mettent en avant que « transférer ces dernières compétences, c’est aller au bout de l’Accord de Nouméa » : une étape « obligatoire avant le référendum », selon eux. Ce qui est faux, puisque ces transferts ne sont qu’optionnels. Mais, dans la sémantique marxiste, « ce qui est optionnel est un acquis » et devient intégralement nécessaire. Fermes sur leurs positions, Les Républicains calédoniens ont par avance dit « Non » à de nouveaux transferts.

D’autres voix… – D’autres formations loyalistes sont plus « coulantes » sur le sujet. Ainsi, certains plateformistes évoquent déjà la possibilité de fractionner l’article 27 et de céder aux indépendantistes le transfert de l’audiovisuel et de l’université, mais pas encore le contrôle de légalité. Cette fois encore, l’État et les signataires ont décidé de biaiser en créant une commission ad hoc pour étudier les conséquences, notamment financières, du transfert de l’article 27 : elle aussi doit se réunir pour la première fois cette semaine. On le comprend bien, le temps presse pour les partenaires de l’Accord, qui souhaitent en écrire le dernier chapitre… Mais certainement faudra- t-il (encore) un ultime Comité des signataires pour entériner les accords et les désaccords, avant le référendum de 2018…


Sur l’agenda…

En marge du Comité des signataires, le président de la République, Emmanuel Macron, cèdera à la tradition instaurée par Nicolas Sarkozy et recevra les délégations calédoniennes à l’Élysée : le lundi 30 octobre en soirée. Sonia Backes, la chef de file des Républicains calédoniens, sera, pour sa part, reçue par le Premier ministre, Édouard Philippe, à Matignon, le vendredi 27 octobre. Question référendaire, sujets économiques et questions sécuritaires à la veille de 2018 devraient être au cœur de cet entretien.


On parlera sécurité le 3 novembre, place Beauvau

Une réunion dédiée à la sécurité en Calédonie durant la période référendaire se tiendra, sous l’égide du ministre de l’Intérieur, place Beauvau, vendredi 3 novembre, à la demande du groupe des Républicains calédoniens. Soit 24 heures après le Comité des signataires. « Sécuriser la période préréférendaire » apparaît comme une préoccupation de l’Etat, après que le directeur de la Sécurité publique (DSP) ait inondé les ondes de propos « rassurants » : au regard de la Métropole, la délinquance en Calédonie est plutôt en recul… Reste que l’on reparlera certainement des textes sur la consommation excessive d’alcool, déposés par les Républicains calédoniens, qui prennent la poussière au Congrès. Comme avant eux les dispositions du plan Isa, jamais votées…


Quel bilan pour l’Accord ?

Trente ans après, signataires et partenaires de l’Accord de Nouméa veulent en établir un bilan : les plus, les moins ; les ombres, les lumières. Bilan impartial, bien évidemment. Et d’emblée, on mesure toute la difficulté de l’exercice. Pour autant, une commission composée d’élus locaux et de l’Etat a été chargée d’évaluer la période écoulée.

M.Sp.