La SLN optimiste dans la tourmente

Dans le cadre de sa réflexion sur la stratégie nickel, le Medef-NC recevait la SLN mardi matin. L’occasion de faire le point sur la situation du Nickel et les soutiens qui lui seront indispensables pour passer la crise. Le directeur général a également profité du rendez-vous pour introduire son nouveau plan de performance.

 

A moins de vivre sur la Côte oubliée, il est difficile, voire impossible, d’ignorer la crise qui frappe durement l’industrie du nickel. Dans le cadre de son cycle de conférences sur le nickel, le Medef-NC recevait la SLN pour son troisième rendez-vous. L’occasion de faire un point sur la conjoncture et les évolutions attendues ainsi que sur la situation de la SLN. Une situation préoccupante que le directeur général du Nickel, Jérôme Fabre, a lui même décrit comme une agonie.

Mais le plus vieil outil métallurgique du territoire n’est pas mort pour autant. Selon son directeur général résolument optimiste, la SLN a encore toute sa place dans le paysage calédonien. Premier pourvoyeur d’emplois privé, représentant près de 10 % du PIB, la disparition de ce poids lourd est tout simplement inenvisageable, d’autant plus que les trois provinces calédoniennes détiennent 34 % de son capital et que l’État est aussi indirectement actionnaire au travers des participations du Fonds stratégique d’investissement dans le capital d’Eramet.

25 % de gain de productivité

L’appel au secours a été entendu par l’État comme par la Société territoriale calédonienne de participation industrielle (STCPI) et les collectivités qui ont assuré de leur soutien à l’industriel. En échange de cette solidarité, la SLN soumet à ses actionnaires un « plan de performance SLN 2018 », continuité du plan d’amélioration de la compétitivité. L’idée est de parvenir à un coût de production hors investissement (cash cost) de 4,5 dollars US par livre de nickel produite à la fin 2017 pour un coût actuel de 6 dollars par livre. Ce dollar et demi de gagné est dans la continuité du PAC (plan d’amélioration de la compétitivité) qui avait déjà permis de gagner un dollar mais entraîné la suppression de 325 postes.

Pour y parvenir, l’industriel doit réduire ses dépenses de 10 milliards de francs cette année. L’équation est simple, tous les postes de dépenses doivent subir une cure d’amaigrissement. De manière très symbolique pour les Calédoniens, la SLN mettra un terme à la production de mattes par les fours Bessmer au troisième trimestre. Déjà premier producteur mondial de ferronickel, le Nickel ne réduira pas sa production mais remplacera les mattes par davantage de ferronickel. Pour le métallurgiste, passer de 47 000 à 55 000 tonnes représente un enjeu commercial important.

Gestion en temps réel des mines, optimisation des teneurs, productivité, maintenance, valorisation des scories mais aussi pression sur les sous-traitants, rien ne sera épargné pour parvenir à l’objectif de 25 % de gain de productivité. Pour la SLN, il y va de sa crédibilité à solliciter l’aide de ses actionnaires. Eramet a d’ores et déjà mis la main à la poche, à hauteur d’un peu moins de 28 milliards de francs. La STCPI, selon la volonté de ses administrateurs, devrait suivre à proportion de ses participations. Grâce à un prêt de l’État dont les conditions ne sont pas encore totalement négociées, la société calédonienne pourrait apporter 127 millions d’euros, soit un peu plus de 15 milliards de francs. L’actionnaire japonais, Nisshin Steel, semble pour sa part ne pas vouloir apporter de liquidités. Selon Jérôme Fabre, le Japonais soutien toutefois la SLN de manière indirecte. Le sidérurgiste, client de la SLN en plus d’en être actionnaire, achète son nickel au-dessus du prix du marché.

Dans l’attente de la stratégie pays

Mais pour survivre, le directeur général estime le besoin de financement de la SLN entre 30 et 60 milliards de francs, l’aide des actionnaires correspond donc à la fourchette basse. La somme couvrirait les pertes plutôt importantes du métallurgiste jusqu’aux environs de 2020, date à laquelle les prévisionnistes de la SLN estiment que les stocks (actuellement aux alentours de 400 000 tonnes) auront retrouvé un niveau normal, permettant une remontée des cours. Entre le début de la crise, à la mi-2012, et aujourd’hui, la SLN a perdu 52 milliards de francs. Ses ressources propres étant asséchées, le Nickel doit maintenant s’endetter.

C’est précisément pour se donner une meilleure visibilité que l’industriel appelle la stratégie nickel de ses vœux. Pour le directeur général, elle permettrait de sanctuariser le soutien des pouvoirs publics et donc de redonner des perspectives et de l’attractivité aux investisseurs.

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Attention aux aléas

Le cours actuel de 4 dollars US la livre fait perdre beaucoup d’argent à la SLN. Si le métallurgiste atteint ses objectifs de compétitivité, il produira une livre de nickel avec 4,5 dollars. Ces prévisions sont effectuées avec des conditions économiques constantes, notamment un cours du pétrole très faible. Un point important pour la SLN dont le coût de l’électricité pèse de manière importante sur les coûts de production (près de 60 %).

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La centrale C toujours en attente

L’avenir de la SLN est intimement lié à la construction d’une nouvelle centrale électrique, plus performante. Si le projet de centrale C est aujourd’hui en stand-by, il ne devrait redémarrer qu’avec la constitution d’un consortium (probablement porté majoritairement par Enercal) dont les financements sur emprunt devraient être garantis par l’État. Charbon, mix charbon-renouvelable, rien n’est encore arrêté, même si le projet de centrale C est déjà prêt. Ce qui est certain, c’est que la mise en service de cette future centrale n’est pas pour demain. Pour pouvoir continuer à exploiter la centrale mise en service en 1970 au-delà de 2021, la SLN a déjà budgété 5 milliards de francs.

 

M.D